La rumeur avait commencé en fin de semaine dernière, elle a persisté puis s’est amplifiée pendant tout le week-end avant de s’emballer le lundi dernier. Cette rumeur faisait état de la démission, lors d’un mystérieux conseil des ministres extraordinaire, du Premier ministre Moussa Mara et de son gouvernement. Elle est allée plus loin en révélant aux oreilles complaisantes que le président Ibrahim Boubacar Kéita avait déjà commencé des consultations de certains membres de la classe politique en vue de la formation d’une nouvelle équipe gouvernementale, restreinte, selon les uns, élargie, selon les autres. En fin de compte, tout cela s’est avérée n’être que rumeur, folle mais rumeur quand même car au moment même où nous mettons sous presse, Moussa Mara est toujours à son poste, à la tête d’un gouvernement de plus en plus décrié et discrédité.
Quarante-huit heures après, on en est à se poser ces questions : qu’est-ce qui s’est passé donc pour que la rumeur s’affole et s’emballe ? Qui a intérêt à lancer cette rumeur car il est évident qu’il n’y a pas de fumée sans feu ?
Ces dernières nuits, les lumières du palais présidentiel de Koulouba sont restées allumées jusque tard, donnant l’impression d’une intense activité chez les officiels, impression renforcée par un impressionnant ballet de véhicules. Cela ne peut paraitre qu’extraordinaire chez des autorités accusées de passivité pathologique chronique. De fait, depuis son élection à la tête du pays, IBK n’a tenu aucune de ses essentielles promesses de campagne, notamment celles relatives à la question du nord et à la lutte contre la corruption et les malversations financières. S’il est en train de travailler, seul Dieu le sait mais pas les Maliens. Alors un tel activisme nocturne ne peut cacher que ce que la quasi-totalité des Maliens attendent avec impatience : un remaniement ministériel afin de débarrasser le pays de cette équipe qui ne gagne rien, qui n’est pas solidaire et dont les membres se donnent des coups bas et se caillassent en plein conseil de ministres.
Des alliés insatisfaits
La deuxième raison pour laquelle la rumeur s’est emballée, c’est le délai accordé au gouvernement pour apporter des réponses crédibles et claires aux questions du FMI concernant les marchés relatifs à l’acquisition d’un second avion présidentiel qui se serait révélé ne pas appartenir à l’Etat malien et à l’achat d’équipements militaires pour les forces armées et de sécurité. Le délai de début décembre se rapproche dangereusement et doit expirer obligatoirement après que les coupables des malversations aient été identifiés, entendus et sanctionnés. Autrement dit, puisque des ministres sont mis en cause, ils doivent être extirpés du gouvernement et mis à la disposition de la justice. Leur remplacement nécessite un remaniement gouvernemental dont le président, s’il n’est pas lui-même trimballé dans la tourmente, doit profiter pour se débarrasser des ministres improductifs, les plus nombreux du gouvernement, et de ceux qu’on accuse d’être là par népotisme ou par acte de lèse-majesté.
La deuxième question est beaucoup plus embarrassante et compliquée car la « fuite » pourrait venir de trois côtés : la mouvance présidentielle, l’opposition cachée et l’opposition apparente.
La mouvance présidentielle s’est fissurée depuis un certain temps, certains de ses composantes tardent encore à récolter des dividendes de leur soutien au candidat IBK, le RPM, parti présidentiel, s’étant révélé beaucoup plus vorace et goulu que prévu, tient à s’accaparer de tous les postes juteux, y compris et surtout celui de Premier ministre pour consacrer leur domination sans partage -ou à peine- de la scène politique. Les caciques du RPM espèrent un remaniement gouvernemental qui leur permettra de prendre toutes les commandes du gouvernement tandis que certains de leurs partenaires comptent enfin être récompensés de leurs efforts de soutien et de ralliement.
Des opposants placides
Parmi ces derniers, l’ADP-Maliba qui ne comprend toujours pas qu’IBK refuse de sauver la mine d’or Wassoul’or de son mentor et parrain, Aliou Boubacar Diallo, en redressement judiciaire et en quête de nouveaux investisseurs pendant que l’Etat garantit ses fournisseurs dans des marchés douteux.
Ces alliés déçus constituent l’opposition cachée car, insatisfaits, ils n’hésiteront pas à tirer non pas sur l’ambulance mais sur le corbillard. Pour l’heure ils se contentent de quelques piques discrètes mais blessantes, à part Oumar Mariko du parti Sadi qui, n’ayant jamais sa langue dans la poche, demande au gouvernement de présenter des excuses au peuple trompé et trahi.
Quant à l’opposition apparente, elle ne s’est jamais tue sur les malversations, la mal gouvernance et la mauvaise gestion de la question du nord. Elle se satisferait certainement d’un gouvernement qui a plutôt le souci du bien commun et de l’intérêt supérieur de la nation que de portes-monnaies individuels, et verrait d’un bon œil le départ de cette équipe qu’il a toujours critiquée. Mais Tiébilé Dramé et ses camarades, toujours placides, pourraient n’avoir fait qu’alimenter la rumeur et non la créer.
Reste IBK lui-même. Il prétend avoir de gros yeux et de grandes oreilles mais est-il suffisamment souverain pour se débarrasser librement de son gouvernement sans susciter, de part et d’autre, des vagues assez hautes pour le submerger et le noyer ? Oui, à condition de se réveiller de sa léthargie et de se poser cette question : que faut-il changer, le RPM ou le PM ?
Cheick TANDINA
CAS SUSPECT EBOLA
La polyclinique Pasteur mise en quarantaine
Ce 11 novembre, notre pays a connu son deuxième cas de décès de maladie à virus Ebola. Il s’agit d’un infirmier de la polyclinique Pasteur âgé de 25 ans déclaré avoir eu des contacts avec un patient d’origine guinéenne.
Au cours d’une conférence de presse animée par Souleymane Doumbia, secrétaire général du ministère de la santé, ce département s’est expliqué sur le décès d’un infirmier de la clinique Pasteur. Des explications, il ressort qu’il s’agit d’un imam sexagénaire de Kourémalé (frontière entre le Mali et la Guinée) qui a été reçu à la policlinique Pasteur, le 25 octobre, pour insuffisance rénale aigue. Au moment de son passage à la frontière ainsi qu’à la polyclinique Pasteur, il avait été soumis à des mesures de contrôle de température pour constater d’éventuels symptômes. Il a été établi qu’il ne présentait pas de symptômes évocateurs du virus Ebola et le traitement a été mis en route. Le 27 octobre, le patient est décédé à la clinique. La famille du défunt a émis le vœu de rapatrier le corps. A en croire le conférencier, suite à des interrogations et avec l’appui de l’Oms, il a été établi que le corps du défunt a transité par une mosquée à Djicoroni avant son rapatriement. Il a ensuite précisé que suite à ces informations, des actions ont été menées pour identifier ladite mosquée ainsi que d’éventuels contacts en vue de les mettre sous surveillance pour éviter la propagation. « La famille qui a reçu le vieux a été identifiée à Djicoroni para près de l’usine céramique, des personnes qui ont rendu visite au vieux. La chose est sous contrôle » a-t-il déclaré. Au niveau de la clinique Pasteur, explique t-il, une équipe est à pied d’œuvre depuis le 11 novembre pour établir l’ensemble des contacts de l’infirmier décédé. Souleymane Doumbia a ajouté qu’il est dit que tout patient au Mali ou en Guinée soit soumis à un contrôle à virus Ebola. « La notion de cas suspect est réglementé et définit selon des directives de l’Oms. Et ce protocole a été respecté », a-t-il souligné. A la question de la fermeture de la frontière avec la Guinée, Souleymane Doumbia a indiqué que dès le début la position du Mali a été claire. « Nous somme dans une organisation internationale qui est l’Oms, nous n’avons pas à des moments critiques fermé la frontière. Nous avons agi dans le sens du respect des règlements internationaux édictés par l’Oms. C’est cette décision qui prévaut. A cet instant il n’a pas été question de fermer la frontière », a-t-il dit. A la question des sanctions contre la clinique Pasteur, il dira que ce serait dans un cadre réglementaire. « Pour sanctionner quelqu’un, il faut avoir la preuve de sa responsabilité. N’agissons pas sous la passion. Nous allons nous donner tous les moyens nécessaires pour analyser cette situation. S’il y a des dispositions à prendre, ce serait dans un cadre règlementaire », a-t-il affirmé. Ainsi, la polyclinique Pasteur a été mise en quarantaine. « Tout ceux qui sont hospitalisés sont en quarantaine. Les personnels seront suivis à la maison. Il n’y aura plus d’admission à la clinique jusqu’à la fin du délai d’observation». Concernant le nombre des personnes qui sont mises en observation par l’équipe de la santé, Souleymane Doumbia dira que 30 personnes ont été mises sous surveillance à Djicoroni para, de même que 40 personnes qui ont eu des contacts avec l’infirmier décédé à Daoudabougou, et 16 malades de la Clinique Pasteur. Les responsables du ministère de la santé ont, à travers un communiqué, rassuré la population que toutes les dispositions sont prises pour identifier toute personne ayant eu un contact avec le défunt. Ils ont tenu à rappeler que les mesures d’hygiène demeurent les meilleurs moyens de prévention contre le virus Ebola. Par ailleurs, ils ont lancé un appel à la population d’éviter les déplacements non nécessaires dans les zones épidémiques.
Boubacar SIDIBE