Il ya quelques années, le fonctionnaire chargé de gérer les ressources publiques devrait user de favoritisme ou de surfacturations pour avoir « sa part » dans les marchés qu’il est chargé d’attribuer. Aujourd’hui, la formule est beaucoup plus simple : la plupart des fonctionnaires sont en même temps commerçants, fournisseurs, prestataires de services, opérateurs économiques.
S’il y a un phénomène qui mine sérieusement notre économie, c’est sans aucun doute la souplesse dans l’application des textes….
D’abord, c’est ce manque de rigueur qui fait que nos entreprises commerciales et industrielles, sont déloyalement concurrencées par les entreprises étrangères.
Ensuite, c’est le manque de fermeté dans l’application des textes qui fait que, le policier, l’agent fiscal, ou le douanier prend impunément des pots-de-vin avec le contrevenant, le fraudeur, etc…
C’est enfin, la même légèreté dans l’application des textes qui fait que, n’importe qui peut faire n’importe quoi. C’est le cas par exemple de l’exercice du commerce auquel désormais, tout le monde peut s’atteler dans notre pays.
Or, aussi bien le code du commerce malien que l’acte uniforme de l’OHADA relatif au droit commercial général (applicable au Mali) interdisent l’exercice de toute activité commerciale par certaines couches professionnelles.
Au premier plan, ceux qui ne doivent pas exercer une activité commerciale sont les fonctionnaires et personnels des collectivités publiques et des Entreprises à participation publique.
Ensuite, viennent, les officiers ministériels et auxiliaires de justice (avocats, huissiers, commissaires priseurs, notaires, greffiers, administrateurs et liquidateurs judiciaires).
Aussi, les experts comptables et comptables agréés, les commissaires aux comptes et aux apports, les conseils juridiques et courtiers maritimes ne doivent pas, aux termes de l’article 9 du l’acte uniforme de l’OHADA (portant sur le droit commercial général), exercer une activité commerciale.
Au sens de la loi, l’activité commerciale est très étendue.
Il y a, les activités commerciales par leur nature qui sont les achats de biens meubles ou immeubles en vue de leur revente (spéculation), les opérations portant sur la monnaie et les valeurs fiduciaires (opération de banque, de bourse, d’assurance, de transit).
Aussi, l’exploitation industrielle des mines, carrières ou tout gisement de ressources naturelles, les opérations de transport, de télécommunication, la location des biens mobiliers ainsi que la souscription ou la vente d’actions de société commerciale ou immobilière constituent également des activités commerciales de par leur nature.
A ces activités commerciales la loi ajoute d’autres qui sont commerciales par leur forme, indépendamment de ce sur quoi elles portent. Parmi ces activités, on cite notamment les actes effectués par les sociétés commerciales.
Autrement dit, tout acte accompli par les dirigeants des 4 types de sociétés commerciales légalement reconnues (société anonyme, société à responsabilité limitée, société en nom collectif, société en commandite simple) est commercial.
C’est, dans un souci de moralité publique, que la loi a interdit l’exercice de l’activité commerciale à ces différentes couches professionnelles.
Mais, aujourd’hui, force est de constater que, par laxisme, la disposition légale qui prévoit ces interdictions est complètement désuète.
Et pour cause : combien sont-ils, les fonctionnaires qui ont des camions de transport et qui, au lieu d’attribuer les marchés de gravier, sable, etc (pour la réalisation et l’entretien des routes) aux vrais transporteurs, se l’attribuent, eux-mêmes ?
Combien sont-ils les fonctionnaires maliens qui, par personnes interposées, approvisionnent l’Etat en matériel informatique, matériel de bureau, matériel de construction, etc ?
Cette situation, ne conduit-elle pas à faire du fonctionnaire, à la fois vendeur et acheteur ?
Et, dans ce cas, la suite n’est-elle connue ?
Malick Camara