Adema-Pasj et la présidentielle : Après la bataille, la guerre se prépare

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Candidature Adema à la présidentielle 2018: déjà le clash ?

L’Adema présentera-t-elle un candidat lors de la présidentielle de juillet 2013 ? La question a donné lieu à une rude bataille dans la ruche où deux groupes s’affrontaient : partisans et adversaires d’une candidature du parti contre IBK. Cette question ayant été tranchée, la semaine dernière, par le Comité exécutif (CE) qui a opté pour le « respect des textes du parti », donc d’une candidature de l’Adema, les abeilles se préparent à une guerre qui risque de faire rage entre plusieurs clans dirigés par des barrons candidats à la candidature de l’Adema.

Le mercredi dernier, les regards étaient braqués sur le siège de l’Adema où les membres du Comité exécutif du parti devaient décider de la conduite à tenir face à la prochaine présidentielle. Les débats ont été houleux, dit-on. Finalement, les abeilles ont convenu de présenter un « candidat consensuel et rassembleur » issu des rangs du parti pour la présidentielle de 2018. Il sera fait appel à candidatures. Cette décision, indiquée par les textes, ouvre cependant une autre bataille, plus périlleuse pour la cohésion au sein du parti. En attendant les termes devant définir les contours du processus de désignation d’un candidat, il convient de réviser les textes du parti. Comment le candidat est choisi ? L’article 64 du statut issu du 5è congrès ordinaire de l’Adema est assez explicite. Le candidat du parti à l’élection du président de la République est désigné à l’issue d’un processus de plusieurs étapes. Il y a la définition des éléments du dossier de candidature par le CE, puis l’appel à candidature, le dépouillement des candidatures par une commission ad hoc du CE, la validation des candidatures par le CE, le choix du candidat par le CE et, enfin, la tenue de la conférence nationale d’investiture du candidat. Précision de taille : Tout candidat doit obtenir le parrainage de son assemblée générale de comité, de sa conférence de sous-section et de sa conférence de section. En outre, il doit obtenir le parrainage de la majorité des sections de sa région et d’au moins une section dans les 2/3 des régions administratives du pays. Faut-il le préciser, aucune section ne peut parrainer plus d’une (1) candidature.

Le processus est complexe et certaines de ces dispositions peuvent s’avérer fatales pour les candidats qui ne pèsent pas lourd, comme ils le prétendent, au niveau de la base. « D’où toutes ses agitations de certains cadres, alors que le processus de désignation du candidat n’est pas encore enclenché », analyse un militant de l’Adema qui s’interroge : Qui parmi les cadres du parti peut répondre à toutes ces critères ? Aucun ou presque!

La voie choisie par le CE, c’est-à-dire présenter un candidat, n’en demeure pas moins périlleuse. Comment choisir un candidat consensuel et rassembleur dans une formation politique où pratiquement chaque cadre prêche pour sa propre chapelle ? Aujourd’hui dans la ruche, les intérêts sont si divergeant qu’ils paraissent irréconciliables. Dans cette guerre qui ne dit pas nom, des noms sont cités et soutenus par des clans, représentant chacun un pan (groupe d’intérêt ?) du parti. D’un côté, ceux qui s’estiment redevables d’IBK. Cette tendance compterait dans ses rangs de hauts cadres de l’administration et plusieurs membres du gouvernement qui ne lésineraient pas sur les moyens pour sauvegarder leurs postes. Depuis la semaine dernière, certains d’entre eux souhaiteraient déjà la bourrasque au sein du parti. Aussi, s’ils semblent avoir perdu la bataille, rien ne dit qu’ils ne battront pas, dès le premier tour, campagne pour IBK. Un candidat de l’Adema a, par le passé, vécu la triste expérience… De l’autre côté, il y a ceux qui peuvent aujourd’hui crier victoire : les partisans d’une candidature interne. « L’Adema n’accompagnera personne à l’élection. Si cela doit se faire, on le fera au second tour », confie un militant.  Dramane Dembélé, Kalfa Sanogo, Moustapha Dicko… sont tous de cette tendance qui va ouvrir les hostilités au sein de la ruche. Officiellement, la procédure de désignation n’a pas démarré. Et par conséquent, aucune candidature n’est encore enregistrée à Bamako-coura, au siège du parti. Mais, certains prétendants ont déjà donné de la voix. Kalifa Sanogo s’est placé sur les rangs. Répondant à l’appel de ses nombreux partisans, le maire de Sikasso, un poids lourd de l’Adema, s’est lancé dans la course pour porter les couleurs de son parti. M. Sanogo a deux atouts : il est le maire d’une capitale régionale considérée comme l’une des plus importantes en nombre d’électeurs inscrits, et ancien PDG de la CMDT. Il est donc à même d’avoir des moyens, des réseaux.

Ingénieur agronome de formation, Kalfa Sanogo a été directeur de l’Institut Polytechnique rural de Katibougou. Il a milité très tôt dans le parti clandestin PMRD (Parti Malien pour le Révolution et la Démocratie) qui fusionnera avec le PMT (Parti Malien du Travail) pour former l’Adema-Pasj, après la chute du régime du général Moussa Traoré. Il a gagné sa légitimité politique au cours de longues années de lutte dans la clandestinité aux cotés de figures comme feu Abdoulaye Barry, Mohamed Lamine Traoré, Kassa Traoré… Toutefois, nombreux sont ceux qui pensent qu’en dehors de la sphère politique restreinte de Bamako et de Sikasso, Kalfa Sanogo est très peu connu dans le reste du pays et encore moins à l’échelle internationale.

Le nom de Moustapha Dicko revient constamment dans les débats. Egalement cadre du parti, M. Dicko est connu pour avoir été plusieurs fois ministre, député à l’Assemblée nationale, député parlementaire africain et directeur de cabinet du président de l ‘Assemblée nationale.

Dramane Dembélé est aussi cité comme candidat à la candidature de l’Adema. Il était le candidat du parti à la présidentielle de 2013. Par ailleurs, Dra a été directeur national de la géologie et des mines du Mali, et ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat.

D’autres adémistes estiment que Dioncounda Traoré, ancien président du parti et chef de l’Etat pendant la transition de 2012, serait la meilleure chance du parti de retrouver la magistrature suprême après Alpha Oumar Konaré.

En attendant l’officialisation de ces candidatures, des questions sont posées: Quels seront leurs impacts sur la cohésion de l’Adema? Le parti de l’abeille solitaire (ou du moins ce qui en reste) ne risque-t-il pas de voler en éclats ? Pour certains observateurs, ce processus de désignation du candidat réuni tous les ingrédients pour le grand clash au sein de ce parti historique, déchiqueté, au fil des élections présidentielles, par des conflits d’intérêts. Car, projettent-ils (observateurs), les vaincus n’accepteront jamais leur défaite. Ce qui, le cas échant, conduira les abeilles au triste scénario de 2013. Cette année-là, au sein du parti avait éclaté une querelle de positionnement, faute de consensus sur le candidat à présenter à l’élection présidentielle. Parti en rangs dispersés à ce scrutin, les abeilles sont sorties de la course dès le premier tour.

De plus en plus et à seulement cinq mois de la présidentielle de 2018, le risque d’implosion se précise. Dommage pour ce grand parti qui a été longtemps le premier parti de l’ère démocratique.

 

Chaque élection, le clash !

Pour mémoire, en 1992, l’Adema-Pasj remporte la majorité absolue des sièges aux élections législatives en février et mars et son candidat Alpha Oumar Konaré est élu président de la République lors de la première élection présidentielle de la 3è République 26 avril 1992.

Mais le parti connaît sa première division avec la création du Mouvement pour l’indépendance, la renaissance et l’intégration africaine par Mamadou Lamine Traoré, ancien vice-président du parti. Le 25 août suivant, l’élection du candidat officiel de l’Adema-Pasj Ibrahima N’Diaye comme maire du district de Bamako marque le début de la guerre de succession du président Alpha Oumar Konaré. Un autre candidat de l’Adéma, proche d’Ibrahim Boubacar Keïta, Boubacar Bâ s’était présenté.

Le 9 octobre 2000, Ibrahim Boubacar Keïta, président du parti, démissionne de toutes ses fonctions alors qu’un « courant rénovateur », opposé à la candidature de l’ancien premier ministre, a obtenu lors de la conférence nationale la relecture des statuts de l’Adema-Pasj. Le 28 février 2001, Ibrahim Boubacar Keïta quitte le navire. Il créé une association baptisée Alternative 2002 et est rejoint par 33 députés de l’Adéma-Pasj, des élus locaux et d’anciens ministres comme Issa N’Diaye. Le 30 juin 2001, il crée un nouveau parti, le Rassemblement pour le Mali (RPM). Dioncounda Traoré est alors élu, en 2001, président. Et le 5 janvier 2002, lors d’une convention, Soumaïla Cissé est investi candidat à l’élection présidentielle face à Soumeylou Boubèye Maïga, ministre de la Défense. Le Premier ministre Mandé Sidibé, candidat à l’élection présidentielle avait décidé de ne pas se soumettre aux primaires organisés par le parti. Mandé Sidibé est exclu du parti tout comme Ahmed El Madani Diallo, ancien ministre du Développement rural qui se présente également à l’élection présidentielle.

Le 28 avril 2002, Soumaïla Cissé, candidat officiel du parti, arrive second au premier tour de l’élection présidentielle avec 21,32 % des voix derrière Amadou Toumani Touré (28,71 %). Entre 2002 et 2012, l’Adema est resté un parti dominant, allié au président Amadou Toumani Touré. Aux élections législatives d’août 2002, l’Adéma-PASJ se maintient comme première force politique du pays en obtenant 51 députés. Mais la division de l’Adema-Pasj se poursuit. Soumaïla Cissé, candidat à l’élection présidentielle quitte le parti pour former le 1er juin 2003 l’Union pour la république et la démocratie (URD).

Pour l’élection présidentielle de 2007, l’Adema-Pasj constitue avec l’Urd et 12 autres partis politiques, l’Alliance pour la démocratie et le progrès (ADP) pour soutenir la candidature d’Amadou Toumani Touré.

Soumeylou Boubèye Maïga qui décide de se présenter contre le président sortant est exclu du parti lors de la conférence nationale des 24 et 25 février 2007 avec plusieurs de ses sympathisants.

Et à l’épreuve de la présidentielle de 2013, la désignation de Dramane Dembélé comme  candidat du parti a occasionné une véritable saignée. Petit à petit, l’Adema s’est vidé de ses hommes. Soumeylou Boubeye Maïga (revenu dans la ruche) et Sékou Diakité ont quitté  avec des milliers de militants. Le premier a créé l’ASMA – CFP et le second a déposé ses bagages à  la CODEM. Quelques mois après, d’autres grosses pointures quittent le navire. Il s’agit d’Iba N’Diaye qui a rejoint  l’URD et Oumarou Ag Mohamed Ibrahim,  alors président en exercice du HCCT, qui a déposé ses valises au RPM. Ce parti aussi bien que l’URD sont  tous sortis des entrailles de l’Adema-Pasj.

C’est dire qu’à chaque élection présidentielle, c’est le clash au sein de l’Adema.

Le parti de l’Abeille parviendra-t-il, en vue de la présidentielle de 2018, à surfer sur les vagues de ces divergences pour désigner un candidat acceptée par tous ?  C’est là toute la question. Déjà, l’Adema accuse un grand retard quant à l’application des textes qui indiquent que le candidat à l’élection présidentielle doit être choisi au moins douze mois avant la convocation du collège électoral.

I B D

 

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