«La démocratie ouvre la porte à la liberté qui débouche sur la revendication; une fois recouvré leur dignité, les hommes ne supportent plus l’insupportable. Démocratiser sans développer, c’est allumer une poudrière» (Emile Fottorino).
Rappelons que le Mali est tombé un mardi 19 novembre 1968 lorsque des soldats apatrides, à la solde de la France coloniale, ont renversé le régime nationaliste de Modibo Keïta. Pour cette sale besogne, c’est le lieutenant Moussa Traoré qui a pris la tête des événements. Six mois après avoir promis au peuple malien le «retour à une vie constitutionnelle normale», voilà le Comité militaire de libération nationale (CMLN) opérer un spectaculaire retournement de veste en refusant de retourner dans les casernes.
Pendant dix (10) longues années, le CMNL a imposé à notre peuple le vide politique pour effacer en lui le nationalisme porteur d’espoir. En 1979 naquit le parti unique sous la bannière de l’Union démocratique du peuple malien (UDPM). Pendant vingt-trois (23) longues années de dictature militaro-udpmiste, notre peuple a enduré les affres d’une gestion calamiteuse de ses affaires.
Bilan d’une démocratie
Le 26 mars 1991, l’heure du pluralisme démocratique a sonné avec un macabre bilan humain lourd: deux cent vingt-quatre (224) fils et filles du Mali massacrés par le pouvoir sanguinaire et autocratique du général Moussa Traoré. Celui-ci, comme un «saint», vit une retraite dorée mais les mains trempées dans le sang de notre peuple travailleur. Nos enfants et femmes des plus valeureux ont donné leur sang pour l’avènement d’un Mali nouveau, démocratique et prospère. Trois (03) régimes se sont succédé, depuis, sans que ce peuple sente souffler le vent de la démocratie pour laquelle il a sacrifié bien de ses fils et filles. Ainsi:
Le Mali sous Alpha Oumar Konaré
- Pendant dix (10) ans de gesticulations politiciennes, le président Alpha Oumar Konaré a berné les Maliens d’un mieux-être populaire. En lieu et place, nous avons assisté, hélas !, à la désagrégation du tissu socio- politique national. Trop de partis politiques pour se faire les poches au lieu de servir la cause pour laquelle notre peuple a versé son sang, en 1991.
Sous Alpha Oumar Konaré, l’école malienne, au lieu d’un redressement patriotique, a continué sa descente aux enfers, descente entamée par le régime de Moussa Traoré. Dès lors, notre système éducatif souffre des grèves intempestives des scolaires et des enseignants, sans le moindre souci, de sauver l’école des turpitudes imposées par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM).
La Nouvelle école fondamentale, plus connue sous le nom de NEF, a donné le signal au tripatouillage irresponsable des soi-disant innovations pédagogiques. Aujourd’hui, c’est peu de dire que l’école malienne est malade. Elle a été extravertie et souillée par la gestion apatride du régime démocratiste du président Alpha Oumar Konaré. Le peuple malien le retiendra toujours à son actif en sa qualité d’enseignant formé par la sueur du contribuable malien !
– Sur le plan sécuritaire, Alpha Oumar Konaré a posé les jalons de la sape de notre armée nationale comme en témoignent à suffisance la Flamme de la ‘’paix’’ dont il s’est rendu coupable. Alpha n’a pas manqué de soutenir la fallacieuse théorie selon laquelle le Mali n’a pas besoin d’armes mais du matériel agricole. Ce matériel, le monde paysan l’attend toujours !
Au compte de la sape de notre armée il faut ajouter en bonne place le recrutement dans tous les rouages de notre système de défense des rebelles qui n’ont cesse de construire leur Azawad dans leurs actes quotidiens. Ces rebelles n’avaient d’autre gage que de se faire des salaires et d’étudier de plus près notre système de sécurité nationale. La suite, on l’a connue: Amadou Toumani Touré (ATT) est élu, en 2002, en sa qualité de candidat indépendant. Tout s’est déroulé comme si Alpha Oumar Konaré est monté au trône pour le remettre à ATT au terme de ses deux (02) mandats.
Alpha Oumar Konaré passe la main au candidat indépendant ATT
- Avec Amadou Toumani Touré (ATT), les choses se sont développées dans la même direction initiée par son mentor Alpha Oumar Konaré. Avec celui-là, le Nord est tout simplement devenu un ‘’no man’s land’’ où la voie fut ouverte à la balkanisation de notre territoire national.
L’avion incendié après déchargement du contenu non loin de Gao et l’entrée avec armes et bagages de colonnes de combattants en provenance de la guerre de Libye, sont là pour attester de la responsabilité politique et sécuritaire d’ATT. Sous ce président, la misère populaire avait atteint un seuil vraiment inquiétant. Il suffit de s’adresser au panier de la ménagère pour s’en convaincre. Le temps a eu raison du régime conteur d’Amadou Toumani Touré (ATT).
Le 22 mars 2012, des soldats patriotes ont décidé de le mettre hors du jeu politique national. Malheureusement, la junte qui avait réalisé cette œuvre salutaire pour notre peuple las de la gestion calamiteuse de ses affaires par un homme dont l’avenir politique se situait désormais derrière lui, n’a pas mis en application le cri de cœur des Maliens à savoir le changement réel pour que plus jamais rien ne soit comme avant dans notre pays. C’est bien dans cette situation chaotique que Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) a pris les affaires en main.
La démocratie malienne a échoué
- Comme tout le monde le sait, l’échec du mouvement dit démocratique se passe de tout commentaire. L’arbre de la balkanisation qui avait fleuri sous ATT a donné des fruits sous la gestion d’IBK. L’accord d’Alger de 2015 est l’expression à peine voilée de la partition de notre territoire national. Les soldats français n’ont qu’un seul objectif chez nous à savoir traduire dans les faits la balkanisation programmée de longue date de notre pays.
Pour légitimer la présence française dans notre grand Mali, Ibrahim Boubacar Kéita a vite fait de signer son fameux accord de défense avec la France dont le bien fondé reste à démontrer. En tous cas, sur le plan sécuritaire, la situation nationale reste absolument grippée comme le montrent à suffisance les nombreuses tueries post rébellion notamment au Nord et au Centre du Mali. La rébellion s’est ensuite muée en terrorisme et en conflit «intercommunautaire». Cet imbroglio se résume aujourd’hui dans les tueries, les vols de bétail, les enlèvements et séquestrations de citoyens sur leur propre sol.
- Aujourd’hui, le tableau est sombre quant à la gestion de nos affaires. La santé n’est plus à la portée du citoyen ordinaire parce que végétant de plus en plus dans une misère économique humiliante.
Certes, le coronavirus n’est pas la faute du régime d’IBK, mais la flambée des prix des mesures préventives peut être immédiatement circonscrite par les autorités compétentes. L’école est en état d’hibernation depuis maintenant trente années de gestion du pays par des «démocrates».
En tout cas, l’inertie dans laquelle patauge aujourd’hui notre système éducatif national assombrit dangereusement l’avenir de notre pays. C’est bien là une triste réalité que celui qui veut tuer une nation passe par la sape de son système éducatif: pendant que les syndicats d’enseignants s’enferment dans leur cycle de grèves pour raison d’argent, le gouvernement s’habitue à sauver l’année.
De plus en plus, le droit des enfants maliens à l’éducation est foulé au pied par les enseignants qui se sont confortablement accommodés des années colmatées à tel point qu’ils ne peuvent plus assurer des cours réguliers justifiant une année scolaire requise. Il suffit de voir les heures amputées dans nos établissements publics pour aller arranger les angles dans le privé, où les heures se donnent normalement et obligatoirement. Plus cette situation dure, plus le peule malien la saisit dans ses différents contours.
Indubitablement, les masses populaires décideront de mettre un terme à cette situation, où l’avenir risque de se compromettre dangereusement. Cet éveil certes sera douloureux, mais aura bien lieu car les hommes passent et les peuples survivront.
Lisons à cet effet ces propos prémonitoires de l’illustre intellectuel d’Afrique Majhemout Diop: «De quoi demain sera-t-il fait sinon du réveil douloureux des masses pauvres des villes et de la brousse ? L’histoire des années à venir sera sans conteste, l’histoire des luttes de ces masses pour un devenir meilleur. Elle peut être l’histoire des luttes entre ces masses et tout groupe qui, en accaparant le pouvoir sans le mettre à leur service, se serait érigé en classe ou couche exploiteuse. Et dans cette hypothèse, l’impérialisme voudrait-il et pourrait-il promouvoir un développement capitaliste réel ? Ne préférait-il pas transformer le groupe dirigeant en pseudo caste bureaucratique qui gérerait, moyennant de substantielles rétributions morales et matérielles les intérêts néocoloniaux ?».
En résumé donc, on peut dire sans risque de se tromper que la gestion des affaires du Mali au nom de la démocratie a plongé notre pays dans l’impasse. N’en déplaise aux gesticulations malhonnêtes de nos pseudo-démocrates qui ne jurent que pour les biens obtenus aux dépens du peuple travailleur du Mali. Tout compte fait, la démocratie à la malienne ne garantit pas le mieux-être à ce peuple. En tout cas, sa marche ne laisse entrevoir aucun signe de développement véritable. Cette année 2020, l’on voit les élections législatives mettre entre parenthèses, le 26 Mars.
L’état d’urgence, le couvre-feu et le coronavirus obligent ! Mais l’arbre ne saurait cacher la forêt, tout comme aucun politicien si félin ne saurait cacher le soleil avec ses mains. La démocratie malienne est un échec cuisant quand ont sait que l’essence véritable d’une démocratie réside dans le mieux-être socio-économique, sécuritaire et culturel de tout le peuple.
La démocratie à la malienne se résume dans la création de radio, de journaux, de syndicats et dans les élections, tout en faisant abstraction du bien- être des masses laborieuses. C’est dire que cette démocratie est une bombe à retardement. Cela, il faut le dire au regard de l’extraversion des mentalités dans notre pays. De plus en plus au Mali, le politicien s’assimile au menteur, à l’escroc, au voleur tout qualificatif qui déshonore et vilipende l’homme malien vrai.
La démocratie malienne fait en sorte que ce sont les combines qui sont à l’honneur depuis le régime de Alpha Oumar Konaré. Mais comme le dirait Abraham Lincoln «On peut tromper tout le peuple une partie du temps, une partie du peuple tout le temps, mais pas tout le peuple tout le temps.» Aujourd’hui, tout le monde a compris que les ‘’démocrates maliens’’, soutenus par leurs consciences d’occident capitaliste, ont trahi le Mali et la cause des victimes du 26 mars 1991. C’est pourquoi, ils n’osent pas dire la vérité et exiger que les travailleurs soient corrects. Recherche d’électeurs oblige !
L’achat des consciences devient donc monnaie courante pour avoir accès à l’hémicycle ou aux fauteuils des mairies. Mais comme le dirait l’autre, à beau retirer la parole au peuple, il finira par la prendre.
Emile Fottorino disait: «La démocratie ouvre la porte à la liberté qui débouche sur la revendication. Une fois recouvré leur dignité, les hommes ne supportent plus l’insupportable. Démocratiser sans développer, c’est allumer une poudrière.»
Que faut-il donc faire pour redonner confiance à notre peuple ?
– Sur le plan politique, la recomposition du paysage politique national est désormais un impératif catégorique. Pour ainsi dire, l’opportunisme politique doit être combattu par ceux qui veulent sauver le Mali. Pour ce faire, il faut que les Maliens sachent tout le passé de tous ceux qui veulent agir à leur nom, car c’est avec les hommes propres qu’on peut bâtir une grande nation, fière, respectable parce que prospère.
– Sur le terrain sécuritaire, seuls les Maliens peuvent réellement se battre pour la dignité du Mali. Certes, l’on peut demander le concours des amis du peuple malien que sont la Russie, la Chine, Cuba, la Corée du Nord, le Mozambique, l’Angola, pour ne citer que ceux-ci. Même le citoyen ordinaire sait aujourd’hui, sans aller dans les grandes écoles, que la France compte parmi les ennemis du Mali. C’est bien l’histoire qui le prouve. Une fois encore, la France fait partie du problème sécuritaire dans notre pays. La solliciter pour sa solution est tout simplement diabolique. Le développement véritable du Mali à l’avantage des masses laborieuses est un impératif catégorique si l’on veut ramener la paix dans ce pays.
– Quant à la crise endémique de l’école, il faut mettre fin aux grèves interminables car les contribuables maliens ont assez donné pour cette école devenue le créneau de l’enrichissement aux dépens de ces scolaires qui ont droit à l’éducation.
– Sur le plan politique, une réduction substantielle du train de vie des députés, des ministres et du président de la République s’avère nécessaire, puisqu’il s’agit de sauver le Mali !
Pour tout dire, le travail fut et reste la première religion de l’homme. Il est temps de mettre les Maliens au travail. Il y va de l’avenir du Mali !
Fodé KEITA