26 mars 1991- 26 mars 2016 : Que d’espoirs déçus !

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 Rappelons que le Mali a accédé à la souveraineté nationale et internationale le 22 septembre 1960, après sa proclamation le 20 août  de la même année. La première République s’est engagée sur la voie «Socialiste» de développement.  Par cette option politique, le Président  Modibo Kéita avait tourné une page sombre de notre histoire. En huit (08) ans de gestion nationaliste, il a fait de la République du Mali un pays de paix et de concorde nationale.

A son actif, on peut dénombrer plus de vingt (20) usines, des succursales aux quatre (04) coins du pays. Partout dans les villages et hameaux de culture, les populations se sont organisées en tons villageois avec comme gage premier l’autosuffisance alimentaire pour tous. Cet élan nationaliste de développement de notre pays expliquait, si besoin en était, que le Mali échappait ainsi progressivement à la domination néocolonialiste française. C’est face à cette volonté de souveraineté nationale du Mali que la France a orchestré un coup Etat militaire contre Modibo Kéita. Pour accomplir cette sale besogne, la France s’est appuyée sur le lieutenant Moussa Traoré portant ainsi atteinte à notre dignité d’homme.

Pendant vingt trois (23) longues années de règne sans partage d’un homme et de son clan, la deuxième République a consacré la liquidation des principales sociétés et entreprises d’Etat. En lieu et place de cette volonté manifeste d’indépendance réelle de notre pays, notre peuple a enregistré ruine et désolation, et cela dans tous secteurs de la vie nationale.

Le régime autocratique de Moussa Traoré a cultivé en notre peuple tous les vices du monde, entre autres : le clientélisme, l’affairisme, la concussion, la délinquance financière. En décidant de mettre notre pays sous la coupe réglée de nos ennemis de toujours (les régimes oppresseurs capitalistes, le Fonds monétaire international, la Banque mondiale),  l’avenir de notre pays est dangereusement compromis avec comme fondements la désagrégation du tissu social, la désertification intellectuelle, la guerre à outrance contre l’intelligentsia malienne et ceux des Maliens qui entendent toujours agir avec probité morale.

Bref, le désastre ayant atteint un seuil critique, Moussa ne pouvait plus continuer à gérer nos affaires et notre peuple ne pouvait plus continuer à se soumettre à l’autorité d’un président qui n’avait plus rien de bon à proposer à ses populations. Il fallait que le Général bazin tombe !

Le 26 mars 1991 a été l’aboutissement de la lutte héroïque de nos masses laborieuses  pour un Mali démocratique et pluriel, pour un Mali de paix, de justice sociale et d’équité véritable entre les citoyens. On a dénombré au moins 220 morts parmi les femmes et les enfants de ce pays. Un vent nouveau a soufflé sur le Mali, le vent du renouveau, de l’espoir de tout un peuple, de toutes nos masses laborieuses. Avec la chute de Moussa Traoré, l’espoir d’un Mali radicalement nouveau était né en notre peuple.

Mais cet espoir fut de courte durée et pour causes:

– Le procès «crime de sang» organisé avec farce a été le premier geste de trahison de la nation malienne par bien de ceux-là qui ont poussé les enfants dans les rues pour assouvir (doit-on dire aujourd’hui) leurs ambitions machiavéliques inavouables : nourrir sans vergogne leurs familles de la sueur de notre peuple. Sous Alpha Oumar Kanaré, plus de vingt un (21) milliardaires  sont nés du sang versé par ce peuple.

– Sans scrupule et sans le moindre sens de l’honneur et de dignité, les mairies de la 3ème République se sont livrées à cœur-joie à la vente illicite du bien commun de la nation malienne, en l’occurrence la terre que nous ont laissée nos ancêtres. Certes, Moussa n’était pas bon, mais, il faut dire sans détour qu’il avait un respect profond pour cette terre malienne. Ces gens sans scrupule, qui se sont fait abusivement appeler «démocrates», n’avaient qu’un seul et unique souci : se partager les biens de toute une nation. L’on comprend donc que leur combat n’avait d’autre enjeu que l’enrichissement illicite aux dépens des intérêts fondamentaux de notre peuple travailleur.

– Sur le plan politique, nous enregistrons aujourd’hui plus de cent (100) partis politiques, comme s’il y avait cent (100) projets de société et pour quelle société ! En lieu et place de la politique, ces «démocrates», malveillants dans leur quasi-totalité, ont préféré ériger la muraille des affaires illicites qui pèchent contre toutes les règles du savoir-vivre, de la bienséance. Comme pour dire que de bienséance, il ne pouvait être question avec ces démocrates aux ambitions apatrides, réactionnaires et insociables.

La conséquence flagrante de leur turpitude est que les populations maliennes, mêmes les plus naïves, ne croient plus en ces sorciers de politiciens qui n’ont cessé de fouler au pied les intérêts fondamentaux  nationaux et le sens de la dignité nationale.

– Sur le plan sécuritaire, la Flamme de paix du 27 mars 1996, orchestrée par Alpha Oumar Konaré et ses consciences étrangères a ouvert la voie à la construction dans le Nord du Mali d’une terre sans propriétaire où tout est possible. C’est bien ce que les Anglais appellent majestueusement «The no man’s land». Ce n’est un secret pour personne que ceux qui ont pris les armes contre notre pays, ont été intégrés dans l’armée malienne sans d’autres formes de procès et avec grades supérieurs au détriment de bien de soldats loyaux qui ont fait toutes leurs preuves de loyauté vis-à-vis du Mali.

Comme on le sait aussi, ces mêmes intégrés ont quitté en masse les rangs de l’armée nationale pour rejoindre la rébellion sous Amadou Toumani Touré, le complice idoine de Alpha Oumar Konaré dans la gestion obscurantiste de notre sécurité nationale. La suite n’échappe à personne : notre armée a été victime de massacres orchestrés par les bourreaux de la paix et de la concorde nationale.

Un coup d’Etat pour le moins salutaire est intervenu le 22 mars 2012 (quand on sait que les politiciens maliens foulent au pied sans vergogne les intérêts fondamentaux de notre peuple). Si on était en démocratie, le coup d’Etat pouvait être condamné. Mais dans un pays où les vampires de la politique osent tout faire au nom de la démocratie aux dépens de ceux qui travaillent, le coup d’Etat de Amadou Haya Sanogo était le bienvenu. Si la démocratie doit donner la latitude à des délinquants de s’accaparer des biens de la nation, une telle démocratie mérite les poubelles.

– Ibrahim Boubacar Kéita a été élu en août 2013 avec 77,66% des suffrages exprimés. Ce score est l’expression d’un ras-le-bol généralisé pour toutes celles et pour toux ceux qui voulaient une gestion autre du Mali, à l’avantage des masses laborieuses.

Hélas ! Si la montagne n’a pas encore accouché d’une grosse souris au museau transpirant, bien d’espoirs sont déjà déçus et les concitoyens n’attendent plus rien de bon de celui qui avait incarné en 2013 la volonté de tout un peuple qui avait perdu toute confiance en ces politiciens véreux qui ont fait de la démocratie un laisser passer pour assouvir les sales besognes.

Tout compte fait, la roue de l’histoire tourne, n’en déplaise aux «chantres maliens» de la démocratie. Cela est d’autant évident que Martin Luther  King n’a pas manqué d’avertir les bourreaux des peuples en ces termes : «On peut tromper tout le peuple une partie du temps, une partie du peuple tout le temps,  mais pas tout le peuple tout le temps».

Comme le dirait l’autre : «les faits sont  têtus». Si l’histoire n’est pas une répétition mécanique des événements, le Mali reste victime de la gestion calamiteuse de ses affaires et cette fois-ci par une gérontocratie à la couleur du caméléon. Une fois encore, rappelons le sage Amadou Hampaté Bâ selon lequel : «Le sage désirera plutôt apprendre que d’enseigner. Il ne croira jamais qu’il détient le savoir total. Il se considérera toujours comme ignorant, il restera de tout temps élève. Il sera assez conséquent pour respecter la vérité des autres, et assez conscient pour reconnaître ses erreurs».

Frantz Fanon de dire : «Chaque génération, dans une relative opacité, doit accomplir sa mission ou la trahir».

Concluons avec le Président de la République, mort pour la Patrie, Modibo Kéita : «Lorsque les vrais propriétaires deviennent des spectateurs, c’est le festival de brigands». Il est temps d’honorer la mémoire des martyrs de mars 1991.

Fodé KEITA

 

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