« Je suis fier de mon amitié avec Laurent Gbagbo. Il est un homme de mérites dont le combat est le nôtre… Laurent Gbagbo ne sera pas au banc des accusés… ». Ces déclarations d’Ibrahim Boubacar Keïta, contrastent tristement avec l’actualité. Autant que son silence assourdissant face à la situation qui prévaut en Côte d’Ivoire. Toute chose qui risque de lui être, politiquement, préjudiciable en 2012.
Les titres de la presse nationale et étrangère sont édifiants : « Gbagbo doit partir », «Laurent Gbagbo, président non grata”, « l’UE sanctionne Gbagbo”, « Plus de 50 morts en Côte d’Ivoire, selon l’ONU », « des milices aux ordres de Laurent Gbagbo”, « Après la presse étrangère, Gbagbo s’attaque aux journaux ivoiriens », « Les Etats-Unis "prêts" à des sanctions contre Gbagbo, « Premier ministre kényan Odinga suggère la force pour déloger Gbagbo”, « les mercenaires de Gbagbo », « Vision génocidaire de Gbagbo : Deux charniers découverts”, « Un mort : Des miliciens de Gbagbo jettent une grenade sur les populations » …” Laurent Gbagbo continue d’assassiner » …
Même le camp socialiste, pourtant traditionnel allié de M Gbagbo a fini par le lâcher. "Si Gbagbo continue, il fera partie des dictateurs alors qu’il a passé une partie de sa vie à la combattre (NDLR : la dictature)" a récemment déclaré M Laurent Fabius, l’ancien Premier Ministre socialiste Français.
Son ami et inconditionnel malien, Ibrahim Boubacar Keïta garde pour l’instant, un silence mystérieux, lui qui déclarait que «Laurent Gbagbo n’est pas monstrueux, il n’a aucun sang malien sur la main ». Des propos par ailleurs très mal pris par la communauté de ses compatriotes vivant en Côte-d’Ivoire dont les réactions le contraignirent à revenir sur ses déclarations.
IBK – GBAGBO : une si longue amitié !
C’est IBK lui-même qui le dit : il entretient d’excellentes relations avec l’homme d’Etat, aujourd’hui le plus contesté. Voici quelques morceaux choisis des déclarations faites lors de la conférence de presse qu’il a animée le 15 septembre 2010 au Grand hôtel de Bamako à l’occasion de la présidentielle en Côte-d’Ivoire et dans le cadre de la projection du film « Un homme, une vision » réalisé sur le parcours de Laurent Gbagbo.
«La tâche est toute à fait aisée quand il s’agit de parler d’un homme de cœur, d’un homme de bien comme Laurent Gbagbo… Alors que nous étions encore étudiants en France, Laurent était déjà un modèle d’équilibre. Très tôt, il a compris que le combat n’était pas de défendre les valeurs venues d’ailleurs… Laurent s’est formé et de la meilleure façon. Il a la capacité de parler de façon académique et d’être en même temps capable de se faire comprendre à Yopougon ou à Attiécoubé… Laurent, un militant de la cause africaine, ne peut pas être violent… C’est un homme de raison, un homme d’équilibre, pour qui, le respect de son pays et de son peuple n’est pas négociable…Quand un tel homme arrive au pouvoir, il va bousculer des intérêts….Avec l’arrivée de Laurent Gbagbo au pouvoir, plus le temps passait, le peuple africain et le peuple de Côte-d’Ivoire allait comprendre que ce que Gbagbo faisait était la bonne voix. Il y a eu des jours où j’ai eu peur pour la vie de Laurent Gbagbo. Mais très malin, il a su déjouer, un à un, tous les pièges qu’ont lui avait tendus…Il y a eu un agressé et des agresseurs … Je suis fier de mon amitié avec Laurent Gbagbo. Il est un homme de mérite dont le combat est le nôtre…Laurent Gbagbo ne sera pas au banc des accusés, il sera le procureur de la Côte-d’Ivoire… Laurent Gbagbo n’est pas monstrueux, il n’a aucun sang malien sur la main».
Connu pour sa légendaire loyauté, l’auteur de ces propos saura-t-il lâcher un ami et se dédire ?
Le lâcher ou « mourir » avec lui
Survie politique exige : Ibrahim Boubacar Keïta se doit de réagir face à la situation qui prévaut en Côte d’Ivoire, voire se désolidariser de Gbagbo au risque de passer lui-même à la trappe, politique s’entend. L’ivoirien est désormais infréquentable, voire politiquement encombrant.
Tenez : la délégation qu’il a envoyée à Conakry prendre part à la cérémonie d’investiture du président Alpha Condé a été gentiment mais fermement reconduite.
Au Mali, Koulouba, pourtant prompt à féliciter les présidents africains nouvellement élus à l’image de Blaise Sangaré du Burkina Faso et d’Alpha Condé de la Guinée, ne s’est pas empressé d’adresser un quelconque message à Monsieur Gbagbo. Les condamnations de la Communauté internationale, de la CEDEAO, de l’UA, entre autres, sont passées par là.
En définitive, Ibrahim Boubacar Keïta reste encore le seul à n’avoir pas officiellement revu sa position.
Ayant présenté l’homme au peuple malien comme un véritable Saint-bernard et après l’avoir officiellement soutenu dans le cadre de la campagne présidentielle ivoirienne, il lui échoit aujourd’hui le devoir de le faire raisonner et de le lâcher si besoin en était. Au cas contraire, il tombera (politiquement) avec lui ; aussi vrai que, « qui s’assemblent se ressemblent ».
B. Diarrassouba