De quatre sièges à l’Assemblée nationale, en 2002, le Mouvement Patriotique pour le Renouveau (MPR) est passé à huit au sortir des dernières législatives. Une avancée que son président, Choguel Maïga, juge «appréciable». Toutefois, ce résultat est en déçà des attentes du parti qui tablait dans ses projections sur 15 à 20 députés. Dans l’entretien qui suit, Choguel Maïga évoque les cheminements de son parti au cours des dernières années – y compris les soubresauts dont on l’accable épisodiquement – les ambitions qui l’animent, ses relations personnelles avec l’ancien président de la deuxième République, le Général Moussa Traoré et son propre devenir au gouvernement.
L’Indépendant. Dr Choguel Kokalla Maïga, en plus votre fonction de ministre de l”Industrie et du commerce, vous êtes également le président du Mouvement Patriotique pour le Renouveau (MPR). Votre Parti vient de réaliser un score fort appréciable avec huit députés aux dernières législatives. Quels commentaires, faites-vous, sur cette performance ?
Choguel K.MAÏGA : C”est un résultat, il est vrai, fort appréciable, par rapport au nombre de nos députés en 2002, qui était de quatre. Mais en vérité, c”est en deçà de nos projections : nous comptions entre 15 et 20 députés ! Les stratégies d”alliance que la direction du parti a préparées, au sortir des élections communales de 2004, ont donné à 40-50% les résultats escomptés. En effet, dès la mise en place des bureaux des mairies, suite aux municipales de 2004, et surtout après la mise en place du bureau de l”Assemblée nationale en 2004 et de la bataille autour de la questure, nous avons compris que le regroupement Espoir 2002, à cause des contradictions internes et des conflits d”intérêts, cessait d”être de facto un espace pour une meilleure défense des intérêts de notre parti. Ainsi, entre décembre 2004 et janvier 2005, nous avions opté, au MPR, pour une meilleure réorientation stratégique avec en ligne de mire, les élections générales de 2007. C”est pourquoi, depuis les premières rencontres informelles fin 2004, jusqu”aux rencontres officielles de fin 2006, le MPR a participé à toutes les réunions et réflexions, ayant abouti finalement à la mise en place de l”ADP, dont les objectifs sont aujourd”hui connus de tous : réélection du Président Touré, formation d”une majorité parlementaire pour soutenir son action pendant le quinquennat 2007-2012.
Notre score aux élections législatives de 2007 est donc le fruit de nos choix stratégiques en terme d”alliance, de l”engagement, de la détermination des militants et responsables du MPR et du pragmatisme de la direction du parti.
Avec ce score, le MPR peut avoir désormais son propre groupe parlementaire et une place de choix dans le futur bureau de l”Assemblée nationale. N”est-ce pas là un signe que le parti est en train de se tailler une véritable légitimité sur l”échiquier politique national ?
Vous savez, ça peut vous étonnez, mais mon intime conviction est que la véritable légitimité, le MPR et ses premiers responsables l”ont acquise dans la décennie 1992-2002, les années de braise. A cette période, nous n”avions aucun élu, mais les analyses et prises de position de notre Parti et le rôle qu”il jouait dans l”opposition par le travail de mobilisation, lui avaient déjà taillé une véritable légitimité sur l”échiquier politique national. Pour le reste, je constate seulement que notre parti est l”un des rares qui progressent d”année en année, en terme d”élus. De zéro élu, le 8 juin 2002, nous avons aujourd”hui près de 500 conseillers municipaux et plus de 8 députés. C”est réjouissant !
Au regard de ces résultats, peut-on espérer sur la fin de la bataille de chiffonniers autour des postes de responsabilité au sein de votre parti ?
En réalité, il n”y a jamais eu ce que vous appelez "bataille de chiffonniers autour des postes de responsabilité" au sein du MPR. Comme l”a dit récemment un haut responsable de notre parti, le MPR est la seule formation politique qui a eu le double problème et de naissance et de croissance. A toutes les phases les plus difficiles, pour ne pas dire les plus périlleuses de la vie de notre parti, c”est la conviction, la détermination et la capacité des dirigeants du MPR à faire une analyse juste de la situation politique, qui nous ont permis, avec méthode et persévérance, de surmonter les obstacles dressés sur notre chemin.
C”est pourquoi, au MPR, chacun se trouve à la juste place qui lui revient pour jouer pleinement le juste rôle. Ce sont donc ceux qui ignorent les mécanismes de fonctionnement et le rapport des forces à l”intérieur de notre parti qui prédisent, à la veille de chaque événement majeur, comme les congrès ou les élections, qu”il y a des dissensions, des dissidences, des clans, des courants qui bataillent, soit pour définir les orientations du parti, soit pour positionner tel ou tel dans tel ou tel poste de responsabilité. Et, à chaque fois, ces pronostics se sont avérés erronés. Tout simplement parce que ceux qui les propagent ignorent qu”au MPR, toutes les légitimités historique, politique et populaire ont un même et unique centre de gravité. Il ne saurait donc y avoir, au MPR, une quelconque bataille de leadership ou de place. Dans notre équipe dirigeante, tous et chacun savent à quoi s”en tenir, chacun joue le rôle qui lui revient et c”est collégialement que nous réussirons ou nous échouerons. Je rappelle, pour votre compréhension, que dans la direction du MPR, nous avons essentiellement trois groupes : ceux qui occupaient de hautes responsabilités avant 1991 au Bureau Exécutif Central (BEC) de l”Union démocratique du peuple malien (UDPM), au gouvernement ou à l”Assemblée nationale, ceux qui étaient à des niveaux de responsabilité intermédiaires à l”Union nationale des jeunes du Mali (UNJM) ou à l”Union nationale des femmes du Mali (UNFM) et ceux qui sont venus à la politique après 1991 et qui sont les plus nombreux. A l”intérieur de chaque groupe, vous avez aussi ceux qui ont conçu, fondé et guidé les premiers pas du MPR, et ceux qui sont venus au parti au cours du processus de son implantation et qui sont de très loin les plus nombreux. Mon rôle, en tant que premier responsable du MPR, c”est de veiller à ce que tous les groupes, dont je viens de parler, travaillent en harmonie, que chacun des responsables se sente pleinement investi de la mission et de la responsabilité de faire avancer notre parti sur tous les fronts, que chacun se sente acteur, dépositaire et défenseur de tous les choix et décisions importantes que notre parti prend. C”est pourquoi, au MPR, il ne saurait y avoir de bataille de leadership, ni conflit de génération.
Continuez-vous à être toujours le gardien du temple du MPR, considéré comme le parti des anciens dignitaires de la deuxième République ?
Le MPR est un parti politique, dont la ligne politique a été clairement définie dès sa naissance. Je suis, à ce titre, le premier responsable, grâce et par la confiance que les fondateurs et, plus tard, les militants et élus ont placés en ma modeste personne. Je me dois de continuer à mériter cette confiance chaque jour par une bonne gestion politique du parti et particulièrement par des bons choix sur les questions et orientations stratégiques.
Pour le reste, si vous entendez par "anciens dignitaires de la 2ème République", ceux qui étaient au Conseil national, au BEC de l”UDPM, au Gouvernement, à l”Assemblée nationale ou étaient secrétaires généraux ou Directeurs généraux avant Mars 91, je serais honoré et heureux s”ils étaient tous ou majoritairement au MPR. Vous serez certainement surpris par la nouvelle ! Mais ce n”est pas au MPR qu”ils sont les plus nombreux. Vous pourriez, pour vous en convaincre, passer en revue les listes des conseillers municipaux et députés de tous les partis de la place, vous serez édifié. Même si je pense que c”est un sujet qui, aujourd”hui, n”est ni d”actualité, ni pertinent.
Quid de vos rapports avec l”ancien président de la République, le Général Moussa Traoré et ses proches ?
Ils sont bons ! De temps à autre, et pendant les fêtes, je lui rends visite. Parfois, toujours à ma demande, il me donne, avec beaucoup de tact et d”humilité, son point de vue sur certaines questions d”intérêt national et même d”intérêt international. Je sais qu”il a un grand souci de la paix et de la stabilité de notre pays. Je vais certainement vous surprendre en vous disant que de 2002 à aujourd”hui, les hauts responsables de la plupart des partis politiques de la place lui rendent visite de temps en temps.
Je crois que la politique de réconciliation nationale, prônée et conduite dans les faits par le Président de la République depuis 2002, la présence du MPR en tant que force politique qui compte et qui n”a aucun complexe vis-à-vis de qui que ce soit, ont aidé, de manière insoupçonnée, beaucoup de responsables politiques à se décomplexer, à dépasser certains stéréotypes. C”est heureux pour notre pays.
Souhaiteriez-vous continuer à occuper votre poste au gouvernement ou changer de portefeuille ou même quitter tout simplement le gouvernement et laisser la place à autres ?
Comme le dirait l”autre, ””la Cour est suffisamment informée, la question ne sera pas posée”” ! Ici, comme elle est déjà posée, je ne souhaiterais pas y répondre. Je suis sûr que vous comprenez pourquoi ; en tant que responsable politique, je ne peux répondre à une telle question au détour d”une interview…
Réalisé par Alassane DIARRA
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