Si jusque-là pour sa sympathie jugée protubérante pour le Mnla, la France n’était plus la tasse de thé des Maliens, l’action rapide et décisive de François Hollande à leurs côtés les réconcilie désormais. Pour des raisons d’orgueil fort compréhensibles car tout le monde aurait voulu que la raclée aux agresseurs fût le seul fait des forces maliennes et pour des raisons de cohérence avec des incohérences premières, il n’y aura pas d’unanimité ici autour du geste historique de la France depuis jeudi. Mais l’important, c’est le soulagement des populations de Mopti qui s’apprêtaient à abandonner leurs foyers la mort dans l’âme, l’espoir que la leçon de Konna soulève dans les autres zones occupées, le coup d’arrêt porté à la progression d’un récusable projet de réislamisation. Depuis jeudi donc, dans nos chaumières comme dans nos palais, le sauveur du Mali s’appelle François Hollande. Son engagement devient plus méritoire avec les risques plus accrus qu’encourent désormais ses compatriotes détenus dans l’intrigant entrepôt d’otages que nous avons laissé le Mali devenir. Ceci dit, Hollande n’a pas agi que par simple tropisme malien. S’il a été si prompt dans la décision, c’est que le verrou de Konna ne sautait que pour le malheur de la sous région ouest africaine, de l’Afrique du Nord et de l’Europe.
Bamako
Des drapeaux français flottant partout !
Des drapeaux français flottent sur des véhicules dans la circulation Bamakoise ou affichée devant des boutiques. On n’avait pas vu ça de mémoire de Maliens. L’intervention fulgurante de l’armée française à Konna en est l’explication. Elle a été bien accueillie par tous les Maliens soucieux de l’intérêt de leur pays.
Le phénomène traduit indiscutablement une nette remontée de la cote de la France auprès de nos concitoyens. Celle-ci avait déjà connu une progression remarquable lorsque François Hollande, fraîchement installé à l’Elysée, avait clairement indiqué que son pays soutiendrait une intervention militaire pour libérer le nord du Mali si elle était avalisée par l’Onu. Depuis, grâce à l’appui diplomatique de la France, deux résolutions ont été adoptées par le Conseil de Sécurité, la première pour ouvrir la voie à cette intervention militaire, la deuxième pour l’autoriser.
Pour rappel, sous Nicolas Sarkozy, le prédécesseur de François Hollande, que les Maliens soupçonnaient d’apporter une aide médiatique, diplomatique voire militaire (fourniture d’armes et de munitions) aux rebelles touareg en échange de leur concours pour la libération des otages détenus par leur allié Aqmi, la cote de la France au Mali était au plus bas.
L’Algérie ferme sa frontière avec le Mali
« Elle a fait contre mauvaise fortune bon cœur »
Suite à la visite du Premier ministre malien, Diango Sissoko, à Alger. L’Algérie a fermé sa frontière avec le Mali, où une intervention militaire française est en cours. L’Algérie a exprimé son soutien « sans équivoque » aux autorités de transition malienne où l’armée, appuyée par les troupes françaises, a lancé une contre-offensive pour repousser l’avancée vers le sud des groupes islamistes.
Alger, initialement réticente à une intervention militaire dans le conflit malien, soutient maintenant l’opération française contre les islamistes au Mali en autorisant le survol de son territoire par l’aviation française. Il n’est cependant pas question officiellement pour Alger d’envoyer des troupes au Mali frontalier. Les Algériens ont toujours eu pour principe de ne pas intervenir militairement dans un pays étranger.
Tout semble à croire que, l’Algérie a sans doute été un peu surprise que l’opération ait été lancée aussi rapidement. « Elle a fait contre mauvaise fortune bon cœur », même si l’option militaire pour combattre le terrorisme n’avait jamais été écartée par Alger.
Pour l’effort de guerre
L’engagement de tous les Maliens sera déterminant !
L’heure est grave. L’affrontement militaire pour libérer le Nord de notre pays a commencé, une crise financière sans précédent se profile à l’horizon. Quelque soit la nature et la forme de l’appui que l’extérieur peut apporter, ou apportera au Mali, c’est l’engagement de tous les Maliens qui sera déterminant. La guerre coûte cher, elle coûtera toujours cher en moyens humains, matériels et financiers. Le sacrifice suprême revient à ceux qui ont fait le serment qu’ils sont prêts à mourir pour le pays, c’est-à-dire les militaires et autres hommes en uniforme. Nous autres citoyens qui ne sont pas sous le drapeau quelle doit être notre contribution à l’effort de guerre? L’histoire du Mali indépendant, nous enseigne qu’à certains moments de notre république, devant certaines crises financières, l’état a eu à demander à chaque malien de cotiser une somme symbolique (souvent 25 Francs Maliens par personne) pour faire face à ses difficultés. Aujourd’hui, tous les Maliens doivent accepter de faire un geste financier pour aider l’armée malienne. La somme servira à l’effort de guerre. En tout cas, l’Etat d’urgence a été décrété et tous les maliens sont à cet effet considérés comme des soldats de la nation. Alors donnons-nous la main, comme stipule notre hymne national, pour dégager de notre territoire les forces du mal.
L’accord-cadre est mort
Désormais seule la constitution prévaut !
En visite dans notre capitale, Bamako, la semaine dernière, le ministre Burkinabé, des Affaires étrangères (envoyé spécial du médiateur de la Cedeao dans la crise malienne, Blaise Compaoré), Djibril Bassolé, dans une déclaration, a exprimé la primauté de la Constitution, mais surtout le fait qu’elle est désormais la seule référence. Un enterrement de première classe pour l’accord-cadre ? Avec la crise malienne, un accord-cadre a été signé entre le médiateur de la Cédéao et le Comité national de redressement de la démocratie et de la restauration de l’Etat (Cnrdre). Cet accord-cadre, en gros, stipulait que «le retour à la normalité constitutionnelle passe par le respect des dispositions de la Constitution du 25 février 1992 dont l’article 36 organise l’intérim du président de la République en cas de vacance ou d’empêchement”. Le médiateur de la Cedeao et le Comité national de redressement de la démocratie et de la restauration de l’Etat (Cnrdre) ont convenu d’adopter l’accord-cadre de mise en œuvre de l’engagement solennel du 1er avril 2012 pour la mise en œuvre des dispositions de l’article 36 de la Constitution ; et entre autres, le président de l’Assemblée nationale est investi par la Cour constitutionnelle comme président de la République par intérim, avec comme mission d’organiser l’élection présidentielle dans le délai constitutionnel de 40 jours. L’accord-cadre a prévu la nomination d’un Premier ministre de transition, non par le président intérimaire, mais par le Cnrdre et la Cedeao. Ce Premier ministre de consensus sera doté des «pleins pouvoirs ». On sait ce que cela a donné. Toujours est-il que nous avons assisté à un pouvoir à têtes multiples, chacun, selon ses intérêts, s’en référant à l’une ou à l’autre. En tout cas, avec l’intervention, de Djibril Bassolé, c’est la messe de requiem de l’accord-cadre. Désormais seule la Constitution dans toute sa plénitude prévaut.
Rassemblées par Aliou Touré