Conférence d’entente, perdiems de labeur

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Conférence d'entente nationale au Mali (photo archives à titre illustratif

Le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita, ne tarissait pas de propos dithyrambiques à l’adresse du président de la Commission d’organisation de la Conférence ce d’entente nationale, son aîné Baba Akhib Haïdara. Il faut dire que ses bonnes impressions sur  le Médiateur de la République étaient unanimement partagées, y compris dans les rangs des représentants de mouvements armés qui ont tous reconnu que le doyen a su tenir la dragée haute à l’épreuve de conduire des débats aussi houleux. Ce qui est sans doute beaucoup moins partagé, c’est ce couac qui risque d’entacher malencontreusement la crédibilité de l’événement par-delà les maladresses organisationnelles. Comme beaucoup d’événements de son envergure, la CEN ne sera probablement pas épargnée par les histoires de gestion des fonds. En attendant le déclenchement éventuel des scandales liés aux attributions de marché, des relents de mécontentement commencent à surgir de la gestion de la distribution des perdiems pour lesquels les participants défilent au portillon des financiers de la médiature. Aux plus bruyants d’entre eux, un rendez-vous précis avait été donné dans la semaine ayant suivi la clôture de la CEN. Quant aux sans-voix corvéables et tailles, nombre d’entre eux, selon toute évidence, vont prendre leur en patience. Ils pourront même être pris à l’usure par les organisateurs car les pénibles aller-er-retour inutiles risquent de les faire renoncer.  D’aucuns viennent de très loin et ont peur d’en dépenser plus dans la cherté de la capitale qu’ils n’en recevront.

Le palais le plus coûteux au Mali

Disons-le tout de suite : il ne s’agit point du Palais présidentielle de Koulouba, qui a pourtant englouti lui aussi des milliards en rénovation pour que son locataire légitime continue de loger dans sa demeure privée aux frais de l’Etat. Il s’agit plutôt du Centre Internationale de Conférences de Bamako, qui vient de fermer à nouveau pour d’autres travaux de même nature, après en avoir été l’objet dans le cadre de l’organisation d’un prestigieux événement comme l’Afrique-France. En effet, pour rendre l’ancien Palais des Congrès apte à accueillir des célébrités du monde entier dont François Hollande, plus de 4 milliards auront été consentis selon certaines confidences. Ce n’est pourtant pas la seule rénovation de cette structure budgétivore, qui n’en finit pas d’être retapée à chaque grand événement. On peut même affirmer sans risque de se tromper qu’en dix années le CICB en a dévoré  dans des proportions qui permettent d’en construire une autre beaucoup plus somptueuse. Et dire que le même ex-Palais des Congrès est encore refermé pour une réhabilitation de sa tuyauterie à hauteur de 16 milliards de nos francs. La chose est si grosse qu’elle fait jaser de sentiment de révolte. Surtout lorsqu’il se susurre que les Chinois qui s’en chargent ne le font pas au frais de leur pays mais bel et bien du Mali. Autrement dit, il ne s’agit pas d’un don mais d’un emprunt, selon nos indiscrétions. Beaucoup d’entre eux souffrent un martyre dû à la disparition de leurs noms dans les fiches de présence.

 L’Untm va-t-elle se joindre à la danse ?

L’escalade des mouvements sociaux est en passe de prendre des proportions inquiétantes par une progressive généralisation qui se dessine. Après la grève illimitée des blouses blanches et un enchaînement du côté des enseignants du supérieur, des sources persistent et signent sur des menaces qui pointent du côté des gabelous. Depuis qu’une grève des douaniers est annoncée, elle tarde certes à intervenir mais il y a difficilement fumée sans feu. C’est ainsi qu’on apprend qu’une grogne est plutôt en gestation dans les rangs de l’Untm où de plus en plus de voix s’élèveraient pour appeler à la manifestation de solidarité envers les syndicalistes de la santé. À quelques choses malheur étant bon, vivement un tel embrasement pourvu qu’il contribue à dénouer l’écheveau au profit des pauvres, la frange sociale dans les rangs de laquelle la désertion des médecins et agents de la santé est en train de provoquer plus de ravages. C’est avec un tel espoir que l’information sur l’entrée dans danse de l’Untm est accueillie en de nombreux milieux.

Le salut présidentiel qui angoisse les ministres

Le président IBK a visiblement le don d’angoisser ses ministres. En plus d’être assez inaccessible pour n’assurer aucun d’entre eux par un gage de ses bonnes grâces, il arrive aussi que le locataire de Koulouba joue sur leurs nerfs et les effraie par des sautes d’humeur. Tenez, Ibk  a par exemple l’habitude de serrer la main de chaque membre du gouvernement à chaque conseil des Ministres. La seule fois où il a rompu avec cette tradition c’était à la veille d’un remaniement ministériel. Et voilà que le chef de l’Etat a brusquement répété cette bouderie dans la foulée de rumeurs très persistances sur un changement de gouvernement. Selon notre source, le détail n’a pas échappé à un membre du gouvernement, lequel a ouvertement demandé à savoir si son attitude inhabituelle s’expliquait par une intention de déposer l’équipe. A la question du ministre indiscret, le président de la République, nous a –t-on confié de même source, a choisi de réagir par le silence. De quoi replonger ses ministres dans une angoisse collective lisible sur chaque visage, surtout que plusieurs autres retrouvailles ont suivi sans qu’aucun d’entre eux n’ait droit à la poignée de main rassurante. Les inquiétudes n’ont été levées qu’à la Conférence d’entente nationale. C’est là que le signataire du décret de nomination des membres du gouvernement s’est résout à décanter l’atmosphère en renouant avec sa familiarité habituelle.

Soumi, IBK et le train imaginaire

On a de tout temps parlé de bateau Mali, mais IBK, lui, a choisi de l’échanger contre un train. C’était à la Conférence d’entente nationale où il évoqué son parabole de locomotive rattrapable à toutes les gares. Et comme par enchantement, les passagers à la traine auxquels il faisait allusion ont tour à tour rejoint les wagons : qu’il s’agisse des représentants de la CMA ou de l’opposition conduite par son chef-de-file Soumaïla Cissé. Mais le président de l’URD n’est pas homme à pardonner aussi facilement les coups qu’on lui porte. C’est ainsi qu’il a mis à profit sa récente rencontre avec le président de la République pour tirer au clair les choses avec lui. En effet, le sujet portait essentiellement sur la gestion de la grève illimitée de la santé, mais Soumi a fait un détour «à 180°» pour rebondir sur l’histoire du train imaginaire d’IBK. A son interlocuteur il a d’abord fait remarquer que pour emprunter un terrain il faut d’abord en détenir le ticket de voyage, au risque de passer pour un fraudeur. En outre, a ajouté Soumaïla Cissé avec son habituel ton narquois, on embarque non plus dans un train dont la destination est opposé à la sienne. C’est ainsi que du Palais de la Culture les prolongations des petits malentendus de la Conférence se sont jouées au Palais présidentiel.

30% de femmes, la seule certitude

Dans l’air du changement de gouvernement longtemps annoncé, tous croisent le doigt et attendent un événement qui n’arrive toujours pas à voir le jouir. L’expectative est beaucoup plus pénible pour les membres du gouvernement ainsi que pour ceux à qui des vendeurs d’illusion ont pu donner quelques espoirs. Et plus la boite de Pandore tarde à s’ouvrir, plus elle élargit les marges de manœuvres tant des prétendants à l’entrée que de ceux qui se battent pour résister au coup de balai. Leur incertitude tragique se traduit par une fréquentation en très nette hausse des charlatans et vendeurs de bétail, au point que certains facétieux pourrait évoquer une crainte pour la survie du cheptel. Une seule certitude tout de même : le gouvernement sera composé à 30% de femmes, assurance donnée par le chef de l’Etat en personne lors de la journée commémorative de la gent. De quoi justifier une quiétude relative dans les rangs de ses représentantes dans l’équipe sortante.

La Rédaction

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