En attendant le 31 décembre prochain, fin de leurs contrats, le débat fait rage en ce moment autour de la table des négociations entre les « 2000 jeunes volontaires » de l’APEJ et le gouvernement. Pour ceux-ci, il s’agit vraisemblablement d’un paradoxe vu les objectifs des pouvoirs publics dans le domaine de la lutte contre le chômage. Loin s’en faut, rétorque le gouvernement, qui se fend de l’argument selon lequel l’objectif visé par l’initiative du volontariat était d’amener ceux jeunes à acquérir de l’expérience dans l’administration et de se préparer en conséquence pour le concours d’entrée à la fonction publique. Bref, c’est la guerre des arguments qui bat son plein. Lisez notre enquête.
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Dans les pays en voie de développement, l’emploi demeure malheureusement l’une des principales préoccupations. Et dans ces pays, on estime à un pourcentage assez faible le nombre de jeunes ayant accès à un emploi durable. Notre pays ne fait nullement exception à cette règle. Au Mali, on estime à moins de 30% les jeunes qui ont accès à un emploi digne de ce nom. Le chômage des jeunes a entraîné un véritable accroissement du taux de pauvreté dans les ménages, contraignant plusieurs jeunes à emprunter le chemin de l’aventure à la recherche d’une « vie meilleure ». Ce, au risque de se voir noyer dans la mer, abandonné en plein désert, ou encore de se faire rapatrier quelques semaines seulement après leur arrivée.
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Les plus hautes autorités de notre pays, dans le souci d’anéantir les conséquences et de déclencher un processus véritable d’emploi et d’insertion de ceux-ci, ont décidé de la mise en œuvre d’initiatives salvatrices. La création, en février 2004, de l’Agence pour la promotion de l’emploi des jeunes, APEJ, participe de cette démarche.
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Permettre aux jeunes d’exprimer leurs talents
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L’initiative ainsi née, à travers la création de cette agence, vise de manière globale à contribuer au développement économique et social du pays en offrant aux jeunes de 15 à 40 ans le maximum de possibilités d’emploi, tant dans le domaine de l’emploi salarié que de l’emploi indépendant. En effet, il s’agissait donc d’améliorer les capacités d’insertion professionnelle des jeunes demandeurs d’emploi, de
rn faciliter leur passage de l’école à la vie professionnelle, de promouvoir les investissements multisectoriels intensifs en emploi, tant en milieu rural qu’urbain, faciliter l’accès de ces jeunes au crédit pour leur permettre d’acquérir des outils de production et de commercialisation, développer l’esprit d’entreprise chez eux pour élargir le cercle national d’entrepreneurs potentiels. Au nombre également des objectifs recherchés par la création de l’APEJ, figurent l’amélioration des chances de réussite des jeunes dans l’emploi indépendant, la facilitation de leur accès (même sans qualification) au marché du travail.
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En clair, la mission fondamentale de l’initiative ainsi entreprise par l’Etat est de concourir à la création d’emplois pour les jeunes (hommes et femmes) en milieux rural et urbain, notamment en facilitant leur accès au marché du travail et au crédit.
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Pour mener à bien cette mission, l’Agence est chargée de concevoir et de mettre en œuvre des programmes de travaux à haute intensité de main-d’œuvre en vue de créer des emplois pour les jeunes sans qualification en milieux urbain et rural, faciliter l’accès des jeunes aux outils de production et promouvoir les activités de commercialisation des produits, rechercher des synergies avec des programmes de développement ayant des incidences sur l’emploi, mobiliser et gérer des ressources pour la promotion et la création d’emploi des jeunes, élaborer des protocoles de convention avec les institutions financières, appuyer les collectivités territoriales à concevoir et mettre en œuvre des programmes locaux de création d’emplois pour les jeunes, coordonner les activités des différents intervenants dans le domaine de l’emploi des jeunes, mettre en place un réseau de partenaires nationaux et internationaux pour promouvoir l’emploi des jeunes. L’autre mission, non moins importante assignée à l’APEJ, c’est aussi celle d’œuvrer à faciliter l’insertion des jeunes à travers les stages de qualification.
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C’est justement de là qu’est partie l’initiative du programme 2000 volontaires de l’APEJ. Ce programme vise le déploiement de 2000 stagiaires dans les structures publiques, selon la volonté du chef de l’Etat de traduire en actes ses orientations en terme d’emploi des jeunes défendues au cours de la campagne électorale 2002. Ainsi, une première vague de 1042 jeunes stagiaires a été déployée, sur la base de la signature d’un contrat d’un an, dans les 27 départements ministériels et structures rattachées, ainsi qu’à l’Assemblée nationale et au Commissariat à la sécurité alimentaire. Ces jeunes sont ainsi déployés dans les services à travers les huit régions du pays. Au terme d’une année travail, l’Etat, voulant atteindre la barre des 2000 jeunes et ayant constaté, semble-t-il, le besoin de ressources humaines dans ses services et croyant fortement en la capacité de travail de beaucoup de ces jeunes, a décidé du renouvellement dudit contrat pour une autre année. Cela s’est accompagné d’un autre réajustement. D’où l’arrivée d’une deuxième vague de 316 autres jeunes stagiaires dans les départements. Une année plus tard, après un autre renouvellement de contrat cette fois-ci d’une durée de 7 mois, une troisième vague arrive avec 230 bénéficiaires dudit stage de qualification. Le réajustement a continué jusqu’à la quatrième vague pour un nombre estimé à 264 nouveaux éléments. A ce jour, selon les derniers chiffres en date, il existe 1.851 jeunes stagiaires de l’APEJ dans les différents départements. Le ministère de l’administration territoriale et des collectivités locales vient en tête avec 395, suivi du département des finances qui inscrit à son compte 246 stagiaires. L’agriculture vient au troisième rang avec 118, suivie du département de la justice avec 112 volontaires. L’Assemblée nationale demeure l’institution la moins représentative de cette initiative avec seulement 1 stagiaire, suivie du ministère de la défense et des anciens combattants, et du Commissariat à la sécurité alimentaire qui abritent respectivement 9 et 10 jeunes stagiaires dans leurs locaux.
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L’on comprend ainsi aisément que sur les 2000 stagiaires à déployer, selon l’objectif du chef l’Etat, il en reste à ce jour 1.851, soit 149 de moins. Où sont-ils partis ? Pour le chef du Département Promotion, Prospection et Evaluation de l’APEJ, M. Youssouf Sissoko, cela s’explique par le fait que beaucoup sont allés vers d’autres cieux. Si certains ont décidé d’entreprendre d’autres activités ou d’aller vers d’autres emplois, ils sont aussi nombreux ceux qui ont eu la chance d’avoir le concours d’entrée à la fonction publique.
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La peur au ventre
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Si le déploiement de ces jeunes dans les différentes structures de l’Etat, dans le but de leur offrir des stages de qualification et d’ouvrir la voie vers d’autres horizons, d’autre part, il est à la base d’une pomme de discorde entre eux et le gouvernement. Car, à partir du 31 octobre prochain, leur contrat doit arriver à terme, du moins pour les trois premières vagues. Et la quatrième vague, jusqu’au 31 janvier 2008. Dores et déjà, c’est l’inquiétude dans les rangs des jeunes, qui, s’interrogeant sur leur sort, ne savent plus à quel saint se vouer. A ce jour, les négociations entreprises pour une solution durable n’ont abouti à aucun accord. En attendant, le débat fait rage entre les deux parties. « Nous nous conformons aux textes de
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Pour le chef du Département Promotion, Prospection et Evaluation de l’APEJ, M. Youssouf Sissoko, il s’agit d’un sujet assez complexe. Et, ajoute notre interlocuteur, au niveau du département, la réflexion est en cours sur les solutions de sortie de crise. « Ces stages de qualification étaient l’occasion voulue par les autorités de permettre aux jeunes de connaître le fonctionnement de l’administration et d’enrichir leur connaissance en vue de la vie professionnelle active. Et je crois qu’au bout de ces quelques années, ceci est atteint. A la fin du contrat, il ne fait l’ombre d’aucun doute qu’ils n’ont nullement la même chance, au cours d’un recrutement, que celui qui n’a pas subi ces stages de qualification », explique un haut responsable du département de l’emploi et de la formation professionnelle. Notre interlocuteur, qui a requis l’anonymat, rappelle qu’en matière d’intégration à la fonction publique, les textes sont clairs, et qu’en ce moment la problématique est d’abord de savoir si l’Etat a réellement les ressources financières suffisantes pour prendre 2000 nouveaux agents. Les jeunes ne l’entendent pas de cette oreille, se référant aux propos du chef de l’Etat sur l’emploi de 8.000 jeunes dans la fonction publique à l’horizon 2012.
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Pour le chef de la section du personnel de
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Bref, il s’agit d’un couteau à double tranchant pour le gouvernement. Faut-il prolonger le contrat des 2000 jeunes volontaires, en sachant bien que d’autres jeunes attendent ? Faut-il les intégrer dans la fonction en violation des dispositions règlementaires ? Quelles voies de recours faut-il entreprendre ? La tâche semble très complexe pour l’Etat. En attendant le 31 décembre prochain, c’est véritablement le dialogue de sourds entre les deux parties.
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Issa Fakaba SISSOKO
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