La justice, quand elle est le lit de négation du droit, devient un monstre, et c”est bien ce qui se passe au Mali.
Mon ami le philosophe, quand il m”a vu écrire cet article m”a averti : « Attention Dr., ici, les magistrats ne souffrent pas la critique et tu passeras à la barre ». Je lui ai répondu que la justice n”est pas au-dessus de
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Comme Césaire je serai la bouche de ceux qui n”ont pas de bouche, la voix des sans voix. Bref, j”ai décidé de m”attaquer à une institution qui cause plus de trouble à l”ordre public qu”elle n”en résout. Et les juges maliens auraient mieux à gagner à changer de comportement qu”à se complaire dans la résistance béate, en refusant toute critique. La justice, quand elle est le lit de négation du droit, devient un monstre, et c”est bien ce qui se passe au Mali. La justice ne rassure plus, elle fait peur. Les décisions des juges sont si contestables qu”elles ne reposent la plupart du temps sur rien de juridique.
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Dans un rapport fourni il y a quelques années par un consultant de
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Montesquieu, car il s”agit de lui, énonce une très belle formule : « Il n”y a pas de liberté lorsque dans la même personne ou corps de la magistrature, la puissance législative est réunie à la puissance exécutive, parce que l”on peut craindre que le même monarque ou Sénat fasse des lois tyranniques et les exécute tyranniquement. Il n”y a pas de liberté si la puissance de juger n”est pas séparée de la puissance législative ou de la puissance exécutive ».
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La dernière phrase est d”une remarquable beauté, car elle symbolise à elle seule l”importance de la liberté dans la formation de la dignité humaine. « Je suis un homme libre », criait Peter Abrahams. Que de sang a coulé au nom de cette liberté. C”est donc d”une chose merveilleuse, pour laquelle nul sacrifice n”est vain, dont nos magistrats doivent s”occuper. Hélas, ils n”ont jamais compris cela ! Peut-être en sont-ils incapables ? Pour l”heure, c”est même de la lapalissade de dire que le Malien moyen, que dis-je, le Malien tout court a perdu confiance en sa justice.
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Vénalité
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De cet état de fait, les magistrats sont les seuls coupables. Entre insolence et incompétence, se promènent allègrement plusieurs magistrats. La corruption est devenue la chose la mieux partagée au sein de ce corps, si bien que perdre ou gagner son procès se discute comme un article. Un avocat de mes amis me disait il y a quelques jours : « Entre le juge et le policier qui règle la circulation, il n”y a plus de différence. Si, il en existe une : avec 1000 francs entre les pages du cahier, le policier te laisse partir, il faut une enveloppe dans ton dossier et là gare à toi si l”offre de ton adversaire est supérieure à la tienne ».
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Quand un pays en arrive à ce point, où la justice étale sa vénalité, il y a fort à parier que les ingrédients d”une explosion populaire soient prêts. Les juges maliens n”entendent-ils pas ces mots dans nos rues « la prochaine révolution sera contre la justice ! » J”en frémis, car je pense à tous ces magistrats honnêtes, compétents, qui sont au bord de la déprime à cause des leurs qui déshonorent la robe.
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L”histoire du veau dont la patte a brisé le pot de miel est d”une vivante réalité au Mali. Qui n”a pas en mémoire cette boutade du président Alpha Oumar Konaré, demandant aux avocats d”arrêter d”alimenter les juges en prenant auprès de leurs clients la part des juges. Ces mots, sorte d”aveu d”impuissance, ne doivent jamais sortir de la bouche d”un homme d”Etat. Ils ont hélas, été accueillis avec acclamation par la foule des juges. ATT a repris ces mots, il y a quelques semaines lors de la rentrée judiciaire 2006.
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Je me rappelle ces propos de Platon écrivant à Criton dans sa Prosopopée des lois : « Crois-tu vraiment qu”un Etat puisse subsister, qu”il ne soit pas renversé, lorsque les jugements rendus y sont sans force, lorsque les particuliers peuvent en supprimer l”effet et les détruire ? » Je pose ainsi donc la question majeure sur l”avenir de la démocratie malienne, avec la déliquescence des trois pouvoirs. Un exécutif frileux, un législatif qui est incapable d”assumer sa responsabilité de représentation du peuple, un pouvoir judiciaire corrompu et contesté.
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Il se pose de nos jours la question fondamentale de quoi demain sera fait, tant sévissent la lâcheté, les impertinences de toutes sortes, des opportunistes, sans foi ni loi, pour qui la fin justifie les turpitudes. Comment ne pas entendre en écho Aimé Césaire dans « Discours sur le colonialisme » où il a eu des mots d”une justesse inégalée pour damer cette vérité, qui correspond parfaitement à la situation du Mali : « une civilisation qui s”avère incapable de résoudre les problèmes que suscite son fonctionnement est une civilisation décadente. Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte. Une civilisation qui ruse avec ses principes est une civilisation moribonde ».
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Comment peut-on accepter que le sang et les larmes versés durant les chaudes journées de décembre 1990, janvier et mars 1991 soient vains, que les sacrifices des martyrs tombent dans les oubliettes et que les vivants assurent dans la lâcheté et le déshonneur, un avenir pour ce pays ? J”interpelle ceux qui dans les folles journées de décembre 1990, de janvier et mars 1991 ont défait le dictateur pour qu”émerge une société plus juste, plus démocratique. Le peuple malien a souverainement inscrit l”indépendance de la justice dans sa Constitution, non pour le confort du juge, mais pour la sécurité et la sérénité du citoyen malien. Ce qu”en font les juges maintenant n”est pas l”indépendance. C”est tout sauf l”indépendance.
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J”ai lu avec beaucoup d”intérêt le discours du 1er président de
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Mafia
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S”il était demandé maintenant au peuple malien de créer un tribunal pour juger ses magistrats, je parie que plus des trois quarts seraient reconnus objectivement coupables et condamnés. Aujourd”hui, comment expliquer que des détenus de
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C”est le lieu d”interpeller M. le président du Conseil supérieur de la magistrature : qu”avez-vous fait pour assainir ce corps ? Rien ! Et vous Mme le ministre de
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Ne vous y trompez pas messieurs et mesdames les juges. Le peuple malien est patient, il n”est pas lâche. Il n”est peut-être pas au fait de la chose juridique, mais il n”est ni ignorant ni analphabète comme vous le pensez. Ce peuple sait lire vos décisions, car il est doté du bon sens. Ce peuple sait, que vos jugements sont si anachroniques, si mauvais qu”ils sont simplement scandaleux. Vous le savez bien. Les anciens disaient : l”erreur est humaine, persévérer est diabolique. On vous a concédé l”erreur durant des décennies, et vous persistez dans cette voie, croyant que vous êtes au-dessus de tout. Attention !!!
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– Sur l”ORTM en 2001, Iba Ndiaye fait une déclaration. Avec Sidiki Nfa Konaté, ils sont traînés dans la boue comme de vulgaires bandits, au mépris de la liberté de pensée, de conscience, d”opinion, d”expression… qui sont des droits constitutionnels et dont la justice est gardienne.
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– En 2004, le ministre Abdoulaye Garba Tapo demande aux magistrats plus de respect de la déontologie, plus de rigueur dans le traitement des dossiers, et voilà le Syndicat autonome de la magistrature, qui se met à ruer dans les brancards, qui crie à l”atteinte de sa dignité pour exiger la démission du garde des Sceaux. Le ministre est limogé, remplacé par le bâtonnier bavard qui devient instantanément muet.
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– Juin 2005, le député Gassama interpelle Mme le ministre de
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La magistrature a atteint le fond. La vertu est totalement absente des palais de justice. Mon ami, le philosophe aime à dire qu”au fronton des juridictions maliennes on devrait écrire : « Ici on rendait justice ». Je lui rétorque qu”il s”agit dans ce cas d”une épitaphe. C”est dire que
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Le peuple souverain du Mali devra assumer sa responsabilité historique de demeurer fidèle aux idéaux de vertu, de dignité et d”honneur de mars 1991.
rnDocteur Panghalê“