Soumaila Cissé, président de l’URD : « Le président sortant doit sortir…»

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Le mardi 30 janvier 2018, le président du parti de l’Union pour la République et la Démocratie (URD), Soumaïla Cissé, a présenté ses vœux et ceux de son parti à la presse à la Maison de la presse. L’occasion a été saisie par le Chef de file de l’Opposition pour passer au crible les 4 ans de gestions du président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta et de prôner une alternance à la tête du pays en juillet 2018.

Le président de l’URD a commencé son discours par des vœux à l’adresse de la presse et des Maliens. La cérémonie s’est déroulée en présence du représentant de la Maison de la presse de Bamako, Mahamadou Talata, des responsables des organes de presse ainsi que des cadres de l’URD et certains membres de l’Opposition.

« C’est avec plaisir et fierté que je suis avec vous ce matin pour accomplir une tradition, celle de présenter mes vœux aux professionnels des médias à l’occasion du Nouvel An 2018.

Permettez-moi également de remercier les chefs de partis et toutes les autres éminentes personnalités qui ont bien voulu eux aussi sacrifier à la tradition en répondant à notre invitation. 

 Je vous présente au nom de l’URD et en mon nom propre mes vœux de Santé, de Bonheur, de Prospérité et de plein succès professionnels à vous, vos familles, vos partenaires ainsi qu’à vos auditeurs, téléspectateurs et lecteurs.

J’associe à ces vœux l’ensemble du Peuple Malien : que cette nouvelle année soit pour notre pays une année de paix, de réconciliation, d’unité et de prospérité », a formulé, le Chef de file de l’Opposition malienne.

Le président de l’URD a aussi compati à la douleur des journalistes et des Maliens durant l’année écoulée.  « L’année 2017, tout en étant riche en évènements a été particulièrement éprouvante pour vous les journalistes ».

 

Recul de la liberté d’expression

Selon l’Honorable Cissé, le classement de la liberté de la presse publié en 2017 place le Mali à la 116ème position ; le pays reste toujours dans la zone rouge. « C’est tout simplement inadmissible! Les difficultés qui caractérisent l’exercice de votre profession sont donc réelles et les obstacles nombreux. Or pour redresser notre pays, retrouver l’unité nationale et restaurer l’autorité de l’Etat, il nous faut nécessairement renouer avec la liberté et la justice. Cela passe nécessairement par une presse de qualité, indépendante et plurielle, et disposant de moyens adéquats et de personnels bien formés. La liberté d’expression chèrement acquise doit être jalousement entretenue pour le confort de la démocratie. Au Mali nous sommes loin de cet objectif. Le constat est triste et alarmant ! Il y a deux ans le journaliste Birama Touré a mystérieusement disparu. Les enquêtes ouvertes n’ont toujours rien révélé et la justice est restée au point mort. Cette disparition continue de nous inquiéter. C’est pourquoi nous interpellons encore une fois de plus les autorités compétentes pour que toute la lumière soit faite sur cette affaire. Certains d’entre vous ont passé toute l’année 2017 dans l’inquiétude des menaces qui planent sur eux. Autant nous prônons le respect par les journalistes des règles déontologiques de leur profession, autant nous condamnons fermement les actes d’intimidations et les menaces à l’encontre des journalistes. Une presse libre est la condition d’une démocratie vivante et respectueuse de ses citoyens, ne l’oublions jamais ! Malgré la faiblesse de vos moyens et l’insécurité qui perdure, et qui s’aggrave même dans certaines parties du pays, vous continuez à donner le meilleur de vous-même pour lutter contre les maux qui minent notre société. L’affairisme et la corruption, la prévarication et les scandales financiers qui jalonnent la chronique ordinaire du pouvoir en place doivent être dénoncés avec force. Votre travail est donc précieux et primordial pour exiger la bonne gouvernance au plus haut sommet de l’Etat et réclamer une gestion saine des deniers publics. Autant de conditions indispensables si nous voulons collectivement sortir le pays de la crise dans laquelle il s’enfonce et sauver le Mali. On n’a jamais vu un pays se redresser économiquement, améliorer le sort des populations et rétablir la sécurité dans la mauvaise gouvernance et la corruption ! Le Mali a donc besoin de vous ! Continuez  à dénoncer les dérives insupportables d’un régime à l’agonie ! Continuez à interpeller l’opinion publique malienne et internationale ! En un mot, continuez à jouer pleinement votre rôle de 4ème pouvoir ! Pour l’honneur de votre profession, pour la dignité des Maliens et pour notre démocratie, soyez des résistants ! Ne cédez rien !», a insisté Soumaïla Cissé.

 

700 personnes en 2017

S’agissant de la question sécuritaire, le Chef de file de l’opposition indique que 2017 n’a apporté aucune amélioration à cause des graves défaillances imputables au pouvoir et à son incapacité à rétablir la paix et la sécurité sur l’ensemble du territoire. « Au contraire, faute d’un leadership incontesté et incontestable au plus haut sommet de l’Etat, la situation ne fait qu’empirer aux dépens de la population. En une année, plus de 700 personnes ont perdu la vie.  Depuis septembre 2013, ce sont plus de 2 000 personnes qui ont trouvé la mort dans des attaques ou des attentats. Ce fut encore le cas récemment avec l’attentat de Boni et l’attaque sur les camps militaires de Youwarou, Soumpi et de Ménaka. Force est de constater que le pouvoir ne parvient pas à assurer la sécurité alors que la violence s’étend dans le centre du pays. Je m’incline devant la mémoire des nombreuses victimes civiles et militaires, maliennes, africaines et étrangères qui ont perdu la vie en défendant notre souveraineté et l’intégrité de notre territoire. Je réitère mes condoléances les plus attristées à toutes les familles endeuillées et mes souhaits de prompt rétablissement aux nombreux blessés. J’ai également une pensée émue à l’endroit de nos réfugiés et de nos compatriotes, civils et militaires, pris en otage. A eux tous, j’exprime mon soutien, ma solidarité et surtout mon souhait le plus ardent de les voir revenir au plus vite au sein de leur famille. Les FAMA (forces armées maliennes) ont encore une fois toutes nos félicitations et nos encouragements pour leur engagement continu pour la défense de la patrie. L’URD, comme d’habitude, suit également avec beaucoup d’attention la situation de nos compatriotes de l’extérieur qui se battent au quotidien pour assurer une vie meilleure à leurs communautés.

Je profite de cette tribune pour rappeler à nos autorités que les Maliens de l’extérieur doivent avoir un accès plus facile et efficace à nos  consulats de proximité. Ils doivent aussi  être traités avec respect et reconnaissance dans leur pays d’accueil », a rappelé Soumaïla Cissé.

 

Alternance en 2018 comme passage obligé

Au cours de cette rencontre avec la presse, le président de l’URD a noté que les Maliens ont été dupés en 2013 et présente l’alternance du pouvoir en juillet 2018 comme la seule voie du salut. « Ici, je veux aussi lancer un appel solennel. Le mal qui ronge notre pays devient de plus en plus inquiétant. La déliquescence du pouvoir nous conduit dans l’impasse. Il nous faut nous ressaisir. L’incompétence et l’incapacité avérée des différents et nombreux Gouvernements qui se sont succédé depuis 2013 ne sont pas une fatalité. Les Maliens méritent mieux que cela. La mystification du Président sortant qui parle beaucoup mais qui ne fait rien pour son peuple n’est pas à la hauteur des enjeux. Les Maliens ont été dupés. Pour sauver le Mali, il faut organiser des élections libres et transparentes. Pour en finir avec la crise, le Président sortant doit sortir. C’est de la responsabilité de tous ceux qui portent et incarnent une alternative crédible et démocratique. En tant que chef de file de l’opposition, je ne me déroberai pas à mes responsabilités. Il faut mettre un terme à l’incurie des uns et au désespoir des autres. L’avenir de notre pays est en jeu. Nos voisins se désespèrent et sont inquiets. Tous les acteurs qui interviennent dans la résolution de la crise du Mali sont unanimes à constater  que l’application de l’accord dit d’Alger piétine dangereusement, faute d’impulsion et de volonté du pouvoir qui n’a jamais voulu engager un dialogue sérieux entre les différentes composantes de la nation malienne. Dialoguer, ce n’est pas être faible. Dialoguer, c’est au contraire être fort. C’est par le dialogue que nous parviendrons à retrouver l’unité nationale et à isoler et neutraliser les groupes armés. Actuellement, il n’y a ni dialogue ni lutte efficace contre les groupes armés. En 2017, le projet de révision constitutionnelle a été présenté comme la panacée, la clé de la réconciliation nationale, de l’intégrité et de la souveraineté sur tout le territoire, ce projet a vécu ….L’organisation de la conférence d’entente nationale et la charte pour la réconciliation qui en est issue ont été pompeusement présentées comme pouvant ramener la paix, hélas sans succès. 

Aujourd’hui en 2018, c’est la loi d’entente nationale qui nous est proposée ; Mais dites-moi de quelle entente s’agit-il ?  Une entente entre qui et qui ? Entente sur quoi ? Que de tergiversations ! Que de tergiversations ! Nous sommes dubitatifs !

Nous n’avons jamais cessé et ne cesserons jamais de réclamer un véritable dialogue national inclusif entre tous les fils de ce pays à travers leurs représentants dûment mandatés et non choisis par l’administration, sur les sujets préoccupant  les différentes communautés dont entre autres la justice, le foncier, l’agriculture, la sécurité, l’eau, l’école,  la santé, les routes, la religion etc…..

Ce dialogue véritable doit précéder toute action législative ou réglementaire tendant à la paix et à la concorde nationale. Nous avons l’expérience dans notre pays, revisitons-la !

Depuis pratiquement quatre ans, notre peuple attend toujours que l’Etat affirme son autorité et qu’il prenne ses responsabilités régaliennes. Notre peuple réclame à juste titre la sécurité, le respect des lois et une justice égale pour tous. Il souhaite également que le pays connaisse enfin la stabilité sur l’ensemble du territoire et que l’action des autorités publiques soit transparente et contrôlable. Enfin, il demande à ce que l’économie soit inclusive et que la croissance ne soit pas captée et détournée par un clan. Notre peuple réclame tout simplement un Etat qui protège et qui construit l’avenir. C’est en cela que nous avons inscrit notre combat, pour un Mali uni paisible et prospère. Au service de tous les Maliens », a dit le Chef de file l’Opposition.

 

L’Opposition continuera à dénoncer !

Lors de cette présentation des vœux, le Chef de file de l’Opposition a aussi rassuré les journalistes de faire correctement son travail jusqu’au bout. « Je ne me lasserai jamais de rappeler notre attachement indéfectible à la République, à la Démocratie, à l’état de droit, à la justice et à l’égalité citoyenne. C’est pourquoi, l’opposition républicaine ne cessera jamais de dénoncer les dérives qui menacent dangereusement les fondements et les valeurs de notre République. En appeler à ces principes et critiquer l’action publique, ce n’est pas être en campagne. C’est être digne de la confiance des Maliens et leur proposer une autre voie.

En revanche, distribuer aux élèves des cahiers à son effigie, c’est être en campagne !

 Fermer les écoles et les administrations lors de ses déplacements, c’est faire campagne ! Avec cynisme qui plus est quand on sait que plus de 500 écoles sont fermées dans le centre et le nord du pays. 

Acquérir et distribuer aux étudiants 13000 tablettes surfacturées, c’est faire campagne !

Instrumentaliser et transporter des populations par cars entiers jusqu’à Koulouba, c’est faire campagne ! Monopoliser l’ORTM pour chanter les louanges d’un Président discrédité, c’est faire campagne ! Une campagne grotesque avec l’argent public ! Vous vous souvenez certainement que 2014 avait été déclarée par le Président de la République année de lutte contre la corruption. Quel aveu d’échec trois ans après ! La corruption est partout, surtout au sommet ! Faute d’avoir su ou voulu mettre un terme à ce fléau qui gangrène notre pays, le Président sortant ose prétendre que les fonds publics alloués à l’opposition dans le cadre d’une loi doivent la rendre silencieuse, conciliante et muselée. Quelle est cette conception de la vie démocratique ! Au lieu de verser dans l’invective et les menaces, au lieu de perdre son sang-froid face aux critiques de l’opposition, le Président sortant doit admettre que l’opposition joue son rôle, c’est-à-dire alerter sans hypocrisie, critiquer sans complaisance et proposer des pistes de solutions, sérieuses, et raisonnables. Oui, nous critiquons et continuerons à critiquer la gestion chaotique et catastrophique du pays.

Oui nous épinglerons toujours la mal gouvernance, la gabegie, le manque de vision et l’incurie. Cela n’est pas négociable ni monnayable. Le peuple malien attend depuis le 4 septembre 2013 les promesses du Président de la république de punir les maires responsables des graves inondations de l’hivernage 2013.

Ces attitudes irresponsables et inacceptables du régime,  que l’URD condamne avec la dernière rigueur, menacent notre démocratie et notre pays. 2018 peut être l’année du sursaut.

Le régime sortant est dans l’obligation d’organiser des élections, libres et indépendantes, sous peine de prendre la responsabilité historique de laisser le pays plonger dans le chaos. Après 5 ans d’échec, les Maliens doivent pouvoir choisir et se prononcer. Nous demandons donc solennellement le respect du calendrier électoral. Nous réclamons avec force un audit du fichier électoral. Nous en appelons également à une surveillance internationale du scrutin et à un contrôle indépendant des opérations de dépouillement des urnes et de compilation des résultats », a souhaité le chef de file de l’Opposition.

Youssouf Z KEITA

 

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