A défaut d’une rencontre au sommet des chefs d’Etat de la bande sahélo-saharienne, le président malien, Amadou Toumani Touré, a obtenu de certains partenaires techniques et financiers de mettre la main à la poche pour financer le Programme Spécial pour la Paix, la Sécurité et le Développement dans le Nord du Mali (PSPSDN).
Ce programme a été lancé en grandes pompes, et son lancement a fait l’objet de tout un tapage. A contrario, son contenu reste encore caché au citoyen lambda, lequel l’a déjà surnommé : la panacée d’ATT. Pourtant, dans la première phrase qui fixe l’objectif global de ce programme, il est dit qu’il vise à «réduire de manière significative, voire supprimer complètement, les causes de l’insécurité et du terrorisme dans le Nord du Mali par la mise en œuvre d’actions en matière de sécurité, de gouvernance, de développement local, de communication et de gestion»
Communication, c’est le maître-mot. Jusque-là, les gouvernements successifs d’ATT, singulièrement l’actuel, n’ont pas brillé par leur communicabilité. Au contraire, ils se sont tus souvent sur des questions de la plus grande importance, des questions dont l’issue malheureuse aurait pu être évitée grâce à un minimum de communication.
«La panacée d’ATT», s’il n’y avait que ce surnom. Non, le PSPSDN est taxé par certains, avant même sa mise en œuvre effective, comme étant une nouvelle vache laitière attribuée aux communautés touarègues et arabes pour s’enrichir sans forcément développer les trois régions du Nord. Donnant raison aux autres, selon lesquels, ce programme est voué à l’échec, comme le PAREM, le CARE nord, le PACAD, l’ADIN, etc.
Aux uns et aux autres, le gouvernement doit faire en sorte que le PSPSDN soit permis effectivement pour ce qu’il est : une véritable panacée pour l’envol des trois régions du Nord, pour que le trinôme de «survie, sécurité, paix et développement» soit enfin une réalité pour une zone qui souffre depuis des décennies des aléas climatiques, mais aussi et surtout des instincts destabilisateurs et criminels de quelques groupes d’individus.
La sécurité requiert un préalable incontournable et indiscutable : la présence physique et matérielle de l’administration d’Etat déconcentrée et le respect de l’autorité de l’Etat. Or, sur le papier, le PSPSDN prévoit la construction d’infrastructures pour accueillir l’administration et les forces de défense et de sécurité (gendarmerie, armée, garde nationale, police, préfets et sous-préfets, etc.). A coup sûr, cela aura pour effet de permettre à l’Etat d’exercer sa souveraineté sur l’ensemble du territoire national, et en même temps, de donner une réponse aux risques sécuritaires par une mobilité accrue des services de sécurité et de défense, une réduction de l’influence des groupes criminels, une occupation plus judicieuse du terrain par l’administration d’Etat.
La sécurité, perceptible et visible, engendre l’absence de menace, donc la paix. Toutefois, cela nécessite un changement des comportements, une mobilisation sociale et un dialogue intercommunautaire permanent et nourri afin d’amener les différentes communautés à vivre comme auparavant : sans animosité, sans haine, sans méfiance, sans défiance, avec le sens élevé de la complémentarité, de la solidarité et de l’entraide.
Dans un Septentrion miné par une précarité économique, une fragilité écologique, des rébellions armées, un banditisme résiduel, une criminalité transfrontalière, des conflits intercommunautaires et une démocratie en lambeaux, le développement socio-économique ne peut être impulsé que si la paix et la sécurité sont des réalités.
Cependant, il convient effectivement d’éviter les erreurs qui ont en effet fait échouer de grandes initiatives comme le PAREM, le CARE nord, le PACAD, l’ADIN, etc. Parmi ces erreurs, il y a essentiellement le choix porté sur certains des hommes et des femmes chargés de piloter ces programmes. Pour l’heure, nous n’avons aucune réserve à formuler contre l’équipe d’Ag ERLAF. Mais, malgré sa vocation à ne pas «se substituer aux projets et programmes en cours», la synergie recherchée pourrait vite se révéler un chevauchement avec des actions en doublon et des efforts éparpillés. Concernant la facilitation de la coordination des activités de terrain, les autres programmes ont révélé depuis longtemps leur incompétence et leur préférence pour des intérêts personnels et/ou communautaristes.
Si toutes les conditions sont réunies pour mettre en œuvre correctement ce programme, le président Amadou Toumani Touré et son gouvernement n’ont aucune raison de garder le silence.
Il faut communiquer.
Cheick TANDINA