La Coordination des associations des travailleurs victimes du Programme d’ajustement structurel (CAV/PAS) a animé une conférence de presse le mardi 14 juin à la Bourse du travail. Thème : Manifeste des partants volontaires à la retraite anticipée de la fonction publique.
Historique des faits
Pendant la période 1980-1990, la République du Mali a vécu une récession économique la plus grave de son histoire. Cette situation troublante a entraîné une lenteur très aigue dans le paiement des salaires (3 à 6 mois) des agents de l’Etat. Pour juguler cette crise, le gouvernement du Mali, en absence de débat national, a initié et mis en œuvre, un vaste Programme de reforme économique (PRE). C’est ainsi qu’en 1982, le gouvernement du Mali a lancé une série de Programmes d’ajustement structurel (PAS) en collaboration avec les partenaires techniques et financiers.
Dans le cadre de la reforme de la fonction Publique, ces PAS visaient les objectifs suivants :
– décongestionner la fonction publique ;
– diminuer la masse salariale du personnel de l’Etat ;
– créer une nouvelle race d’opérateurs économiques en vue de l’éclosion du secteur privé par la réinsertion des partants volontaires dans la vie productive. Au regard de ces objectifs, les PAS ont engendré deux programmes de départ volontaire à la retraite anticipée de da fonction publique.
Le premier programme a concerné 643 fonctionnaires, a été exécuté pendant la période 1987-1989 avec l’appui financier de l’USAID. Le second programme élargi par la loi dérogatoire N°91-002/AN-RM du 24 janvier 1991.
Ce programme a été exécuté dans la période 1991-1993, a concerné 5023 agents dont 1638 fonctionnaires, 785 agents des forces armées et de sécurité (militaires, gendarmes, policiers) et 2600 conventionnaires, financé avec l’appui de la Banque mondiale et d’autres partenaires financiers.
Parlant avec réserve, les partants volontaires sont au nombre de 5666 des deux programmes. Les Programmes de départ volontaires (PVD) comportaient deux phases :
1ère phase : versement des primes d’incitation au départ
Le gouvernement du Mali a exécuté cette phase comme suit :
a) les fonctionnaires : vague 1991
– catégorie A : 4 millions de FCFA
-catégorie B : 2,5millions de FCFA
– catégorie C : 1,7 million de FCFA
A) Les fonctionnaires vague spéciale gérée par la lettre circulaire N°92-003/MFPT-CAB du 29 avril 1992 suivant le tableau ci-dessous. Et même après la dévaluation du franc CFA, d’autres pays de la sous région qui ont eu à exécuter les mêmes programmes d’ajustement avaient reçu des fonds de soutien suite aux effets de la dévaluation, chose qui n’a pas été faite au Mali.
B) Les conventionnaires :
– catégorie 10 et 11 ou assimilés : 2,4 millions de FCFA
– catégorie 8 et 9 : 1,5 million de FCFA
– catégorie 5 et 6 : 1 million de FCFA.
Au regard de cette différence notoire, de ce que les autres programmes de la sous région ont payé à leurs fonctionnaires et agents partants volontaires à la retraite, nous doutons de la sincérité de toute la gestion des programmes de départ pour n’avoir pas accès et connaissance du contenu de «l’accord cadre» signé entre le Mali et les bailleurs de fonds extérieurs notamment : l’USAID, la Banque mondiale, le FMI, etc.
2ème phase : réinsertion des partants volontaires dans le secteur privé
A ce sujet, le gouvernement du Mali a désigné un cabinet d’expert comptable comme «Agence d’exécution» et dix cabinets d’études selon des critères de l’Etat seul, mais dont on peut aisément deviner le caractère mercantile du contenu. Ces cabinets étaient chargés de l’étude des projets et de la formation pour la somme de 500 000 F CFA par dossier (250000 pour l’étude du projet et 250000 F CFA pour la formation ?
Au bout de six (6) semaines, la formation et l’étude des projets étaient bâclées et les cabinets riches de 2 511 500 000 F CFA sans compter que l’agence d’exécution était payée à 5 500 000 F CFA par mois.
Toutes ces sommes étaient tirées des fonds réservés aux partants volontaires.
Et comme résultat de cette mascarade, sur 5000 projets déposés dans les banques de la place, 374 seulement ont été financés à hauteur d’un tiers de leur montant. Ces financements modiques ne répondaient à aucune norme ont fondu comme neige au soleil.
Les mesures d’accompagnement utilisées par le gouvernement
«Le fonctionnaire admis au départ volontaire s’il a moins de quinze ans de service effectifs dans la fonction publique, se voit rembourser en espèces ses cotisations versées à la Caisse nationale de retraite ainsi que ses cotisations patronales de l’Etat. Cette disposition n’a pas été respectée car il n’a été versé que les cotisations de la part ouvrière (4% à 1073 agents fonctionnaires (civils et militaires) partants volontaires ce qui leur a retiré le bénéfice de la pension de la retraite et les 8% sont impayés.»
Le fonctionnaire admis ayant cumulé 15 ans de service effectifs dans la fonction publique se voit garantir le paiement, «à partir de l’âge normal de retraite de la pension à laquelle il aurait eu droit s’il était resté au service de l’Etat. L’Etat continuera à verser les cotisations patronales à la Caisse des retraites du Mali en tenant compte des avancements dont il aurait pu bénéficier s’il était resté dans la fonction publique jusqu’à l’âge de la retraite.»
A ce sujet, une loi dérogatoire N°98.043 du 03 août 1998 a fait éclater ce groupe en deux en accordant une pension normale de retraite à certains et une pension proportionnelle aux autres alors qu’ils répondaient tous aux critères cités plus haut.
Les actes de solidarité du gouvernement en l’endroit des partants volontaires à la retraite
– Octroi de subventions d’un fond de garantie de 500 000 000 de F CFA soit disant pour favoriser le financement des projets des partants volontaires. Ces fonds ont été déposés dans des caisses d’épargne de la place. Là où les financements bancaires ont échoué, ceux au niveau de ces caisses ont subi le même sort. Ces différents n’ont servi qu’à enrichir des cadres véreux.
– Octroi de 2 500 000 000 F CFA dont la distribution faite par un cabinet de notaire assisté par deux grands cabinets d’avocats a subi une escroquerie à grande échelle. Ainsi, le notaire et ces cabinets se sont taillés les 12% dudit montant c’est-à-dire 300 000 000 F CFA
Les causes véritables de l’échec du PAS
L’échec du Programme d’ajustement structurel est dû aux éléments suivants :
– le non respect des accords dûment signés entre l’Etat du Mali et ses partenaires au développement ;
– les cadres qui avaient en charge la gestion des PAS, en ont fait des marchés personnels pour se faire fortune au détriment des couches cibles.
– l’inefficacité du comité de suivi du volet réinsertion du programme de départ volontaire ;
– la Banque mondiale a été complice en acceptant le rapport mensonger fourni par le gouvernement du Mali ;
– le non aboutissement de toutes les procédures judiciaires.
Les revendications des partants volontaires
Vu la suppression des emplois et salaires des partants volontaires. «Vu l’absence de la réinsertion des partants volontaires dans la vie productive comme initialement prévu. Vu le refus du gouvernement du Mali de l’accès des partants volontaires à l’accord-cadre» signé entre l’Etat du Mali, l’USAID, la Banque mondiale, le FMI. Vu la reconnaissance officielle de l’échec des programmes de départ volontaire par le gouvernement en conseil de ministre du 10 janvier 2007 ; les partants volontaires revendiquent leur rétablissement dans leurs droits par les mêmes dispositions exceptionnelles («dérogatoire») comme suit :
– accorder une pension de retraite pleine et entière à l’ensemble des partants volontaires ;
– octroyer la prime de réinsertion dans la vie productive à l’ensemble des partants volontaires ;
– réparer le préjudice causé à l’endroit de l’ensemble des partants volontaires.
A défaut, faire réintégrer les P.V dans la fonction publique avec paiement des rappels de salaires des années de chômage technique. «Quand l’essentiel est perdu, s’opposer est un devoir.»
Le président de la CAV/PAS Mohamed El Béchir Abdallahi