Il y a légitime défense lorsqu’une personne commet une infraction pour sa défense ou pour défendre autrui contre l’agression d’une autre personne. Il y a forcément deux personnes au moins : une personne qui commet une agression et une personne qui, voulant empêcher l’agression, commet une infraction contre l’agresseur. La question est de savoir si cette infraction est justifiée. La légitime défense est un fait justificatif de plus en plus fréquent. Celui qui se défend ne se fait pas justice à soi même, mais il se fait police à soi même.
En droit pénal
En principe, toute atteinte commise en défense est susceptible d’être justifiée, qu’il s’agisse d’un crime, d’un délit ou d’une contravention, qu’il s’agisse d’une agression contre la personne de l’agresseur ou contre ses biens (vol de l’arme).
Les individus
Pour agir dans le cadre de la légitime défense des personnes[1], l’agression contre soi-même ou autrui doit être actuelle (le danger est imminent) ; – illégale (l’agression est interdite) : par exemple le fait de riposter aux forces de polices pendant une manifestation ne peut être considéré comme de la légitime défense ; – réelle (l’agression ne doit pas être putative).
Parallèlement, la défense doit être nécessaire : il n’y a aucun autre moyen de se soustraire au danger ; concomitante : la réaction doit être immédiate, par exemple : on ne doit pas agir par vengeance ou dans le but de stopper l’agresseur en fuite ; proportionnée à l’agression : il ne doit pas y avoir d’excès dans la riposte. Il existe en droit certains cas où il y a présomption de légitime défense : le défendeur n’aura pas à prouver qu’il était en état de légitime défense. La charge de la preuve est supportée par la partie adverse[2]. Le pouvoir d’utiliser la force ne peut se faire que de manière proportionnelle, pour repousser une agression injuste, actuelle ou imminente, contre une ou plusieurs personnes. Agit en légitime défense quiconque, de manière contraire au droit, est attaqué ou menacé d’une attaque imminente. Le droit de repousser l’attaque doit se faire par des moyens proportionnés aux circonstances. En cas d’excès, le juge peut atténuer la peine[4].
Les biens
La légitime défense s’applique également aux atteintes aux biens[1]. Les conditions d’application sont les mêmes, à l’exception de l’homicide volontaire qui n’est en aucun cas légitimé dans la défense d’un bien. Si concernant la défense des individus, la loi dispose d’une présomption de proportionnalité en faveur de la victime de l’agression, il appartient à la personne demandant le bénéfice de la légitime défense des biens de prouver que sa riposte était bien mesurée par rapport à l’agression. La légitime défense ne peut être admise en matière d’atteinte aux biens que lorsque l’acte commis a pour objet d’interrompre l’exécution d’un crime ou d’un délit[5].
En droit international public
Le concept de légitime défense a été introduit en droit international parallèlement à l’interdiction du recours à la force armée, dont il est la contrepartie. Il a eu lieu en plusieurs étapes. L’article premier de la deuxième Convention de La Haye (1907), dite Drago-Porter, dispose que les parties contractantes sont “convenues de ne pas avoir recours à la force armée pour le recouvrement de dettes contractuelles réclamées au gouvernement d’un pays par le gouvernement d’un autre pays comme dues à ses nationaux”.
Cependant, le premier pacte réel est le pacte de la Société des Nations (28 juin 1919) par lequel les États acceptent des restrictions au recours à la guerre. Il distingue guerres illicites et guerres licites, dont la légitime défense fait implicitement partie. Dans le pacte Briand-Kellogg (26 août 1928), le recours à la force pour légitime défense est implicitement admis en ce sens qu’il n’est pas interdit. Cependant, l’un des critiques à l’égard de ce pacte est justement l’absence manifeste d’exception, ce qui fragilise cette interdiction.
Enfin, l’art. 51 de la Charte des Nations unies (26 juin 1945), tout en explicitant le droit de légitime défense, l’étend à la légitime défense collective : “Aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un Membre des Nations unies est l’objet d’une agression armée, jusqu’à ce que le Conseil de sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales”. Comme en droit civil, le droit de légitime défense est défini comme une exception au principe de non-retours à la force ; son exercice doit être proportionné à l’agression subie et la riposte doit être immédiate. Dans l’art. 1 de la résolution 3314 du 14 décembre 1974, les Nations unies précisent les circonstances nécessaires : “L’agression est l’emploi de la force armée par un Etat contre la souveraineté, l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un autre Etat, ou de toute autre manière incompatible avec la Charte des Nations unies, ainsi qu’il ressort de la présente définition”.
La légitime défense collective consiste en la faculté pour un État non directement agressé d’intervenir au nom d’accords de défense le liant au pays agressé. Il a été invoqué par les États-Unis au Liban en 1958, au Viêt Nam et à Saint-Domingue, contre le Nicaragua en 1985, et par l’URSS pour justifier ses interventions à Prague (1968) et en Afghanistan (1979)[6]. Pour justifier leur intervention au Viêt Nam, les États-Unis ont invoqué une notion de légitime défense permanente, justifiée selon eux, par les incursions continues de bandes armées venues du Nord. Cette notion n’a cependant jamais été consacrée en droit international public.
Rassemblés par Ben Dao