Occupation illicite d’espace public à Kabala ; Un ex-candidat à la présidentielle en flagrant délit de spoliation foncière

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Il s’agit de Mamadou Y. Traoré, le candidat ‘’An Ka Bolo Di gnogoma’’ à la dernière élection présidentielle. A Kabala-Est, dans la Commune rurale de Kalaban Coro, une imposante villa en couleur beige se tient au beau milieu d’une grande rue derrière le marché. Il y est bâtit un garage VIP, sur un espace public, contigu à cette villa. Depuis, les voisins seraient confrontés à des inondations et manque de passage. L’occupant illicite ne veut rien entendre malgré l’annulation de la décision d’attribution par la mairie de Kalaban Coro. Le tribunal de la Commune V saisit se déclare incompétent. La situation a été dénoncée sur le site Kenekanko, ce qui a motivé notre investigation en collaboration avec la Fondation Tuwindi.

A  Kabala-Est, derrière le marché, l’ancien candidat à l’élection présidentielle de 2018, Mamadou Y. Traoré a construit une grande cour. Selon le plan dont nous possédons une copie, l’espace occupé est une place publique réservée à la population. Après investigation, il s’avère que c’est le 1er adjoint au maire, Hamala Sidibé qui a délivré à Mamadou Y. Traoré l’autorisation d’aménager l’espace au profit de la jeunesse mais avec des recommandations précises.  Il s’agirait entre autres de l’aménager avec des grillages et plusieurs entrées et le mettre à la disposition des jeunes.

Mamadou Y. Traoré, l’ex-candidat à la présidentielle de 2018, , au cœur de la polémique

Mamadou Y. Traoré viole ces recommandations et en même temps la vocation de la parcelle à lui attribuée. Au lieu d’une construction sommaire avec des grillages et plusieurs portes d’entrées, M. Traoré construit des murs clos avec un portail. Il fait de l’espace, son garage VIP. L’endroit en question est clôturé par un mur d’une hauteur de 1.20 mètres à 2.00 mètres environ. La ruelle qui faisait objet de passage entre sa maison d’habitation et l’espace vert aussi est construite et annexée à la clôture. Ladite construction est devenue un problème pour le voisinage. Ils sont étouffés et victimes d’inondations dès la tombée des premières pluies. Tous les voisins se plaignent.

Le maire principal de Kalaban Coro, Tiécoura Diarra, qui était empêché au moment des faits pour des raisons judiciaires, a annulé ladite autorisation dès son retour aux affaires.

Il a ordonné la démolition de la clôture signifiée par la lettre n°087/M-CRK adressée le 17/7/2020 à M. Traoré. Dans la lettre, il est écrit ce qui suit. « Il nous est revenu de constater que vous n’avez pas respecté les termes de l’autorisation de l’aménagement de l’espace vert qui vous a été délivrée suivant acte n°2020 019/M-CRK du 21/5/2020. En raison d’utilités publiques, ladite autorisation d’aménagement a été annulée ». Conformément aux articles 55 et 56 du code domanial et foncier, précise la correspondance. Malgré cette lettre, Mamadou Y. Traoré fait la sourde oreille. La construction anarchique demeure à sa place, au grand détriment de la population.

Le Ras-le-bol de la population

Soumana Coulibaly, chef de quartier à Kabala, demande la démolition pure et simple de la clôture et du garage. « Ce que je cherche, c’est qu’il nous remette notre terrain. C’est un domaine public. Il n’a pas été honnête ni avec nous ni avec la mairie de Kalaban Coro. C’est lui-même qui a proposé de clôturer l’endroit. On lui a dit que c’est un domaine public. Il a affirmé qu’il n’allait pas s’en approprier. Qu’il allait clôturer l’endroit pour tout le monde, lui et la jeunesse du quartier. On lui a demandé d’aller consulter les jeunes. Il n’a pas tenu sa promesse. Au lieu d’un grillage, il a érigé une clôture en mur de ciment et a même barré la voie qui se trouve entre sa maison et l’espace vert. Il a donc ajouté la route aussi à la construction. Sa propre mère est venue jusqu’ici pour me manquer de respect. Elle a menti disant que le terrain appartiendrait à son fils depuis plus de 25 ans. Or si on enlève 25 ans de l’âge de M. Traoré, il lui restera peu », raconte le chef de quartier, très remonté.

 Il propose : « je veux qu’il démolisse la clôture. Ça ne lui appartient pas. Nous voudrions juste qu’il partage l’endroit avec les jeunes. Tant qu’il ne partagera pas, le conflit demeurera. Les jeunes ne vont pas renoncer. Or avant qu’il ne construise sur l’espace vert, il n’avait aucun problème dans le quartier. C’est quand il a construit l’endroit que les jeunes ont commencé à le menacer. Qu’il remette l’espace public aux jeunes. C’est tout ».

Sur le plan juridique, le chef de quartier est confiant. Selon lui, malgré les bonnes relations dont se vante M. Traoré, la mairie soutient les jeunes du quartier. La plainte contre lui déposée par celle-ci en témoigne. « C’est le maire adjoint qui lui a donné l’autorisation d’aménager l’espace litigieux au profit de tous. Il est venu avec cette autorisation et il a clôturé avec des murs. A son retour, le maire central a opposé son refus avant d’annuler l’autorisation. Il a ordonné la démolition de la clôture. La maison de sa voisine est inondée quand il pleut. Cette dernière aussi a porté plainte », explique M. Coulibaly.

A cet effet à chaque audience à la justice, la population se mobilise pour aller soutenir la cause. « Nous répondons à toutes les convocations avec les plaignants. A la fin, la justice s’est déclarée incompétente au niveau du tribunal de grande instance de la Commune V. Si on conduit l’affaire au tribunal administratif, ce qui est sûr, il est plus lourd que nous. Si nous partons là-bas, ça va prendre beaucoup de temps. Résoudre le problème à l’amiable, c’est ce que nous souhaitons. Un collectif des retraités est ici. Ce collectif s’est déplacé pour aller lui parler, il a refusé », regrette le chef de quartier.

Mariam Kébe, la voisine de M. Traoré est victime d’inondation à cause de la construction « improvisée ».

Avec l’occupation anarchique de la clôture de l’espace public, la vieille Mariam Kébé est victime d’inondations à chaque hivernage. Malgré son combat pour sa sécurité et la sauvegarde de sa maison, rien n’a changé.

 « C’est moi qui entretenais l’espace avec mon argent en payant des gens pour le faire. Traoré est venu me voir pour me dire qu’il allait planter quelques arbres sur l’espace, mais je ne savais pas qu’il avait d’autres intentions. Un jour, lors des préparatifs d’un mariage dans sa famille, Traoré est venu piquer un truc au beau milieu de la route, pour commencer la clôture de l’espace. Je lui ai fait le reproche. Il m’a dit qu’il va bel et bien construire l’espace et que personne n’y pourra rien. J’ai été me plaindre chez le chef du quartier. J’ai amené le plan de l’endroit avec moi. Je l’ai montré au chef du quartier. Et lui ai expliqué les conséquences de la clôture de l’espace sur le plan environnemental et autres. Le chef du quartier a vu que j’ai raison. C’est une place publique. Il a été convoqué par le chef du quartier et un des conseillers. Ils ont parlé », raconte Mme Kébé.

Malgré tout, il a continué son projet. Sans crainte, car, aime-t-il se vanter, « personne ne peut rien contre ». Depuis la clôture de l’espace, Mme Kébé ne dort plus pendant la période hivernale.

« J’ai alerté la mairie et des agents sont venus faire le constat. Ils ont promis de faire tout pour démolir la clôture. Aujourd’hui, je crains l’inondation avec cette construction anarchique devant ma maison », affirme-t-elle.

 La détermination de la jeunesse de Kabala-Est

En plus de la Mairie, les sages du quartier et les voisins, l’Union des jeunes pour le développement de Kabala-Est et environnant (Ujdeke) a demandé aux autorités municipales de Kalaban Coro de démolir la construction de Mamadou Y. Traoré sur l’espace vert situé devant la parcelle d’habitation LZ/18 du lotissement de Kabala-Est conformément à la notification n°087/M-CRK de la mairie de Kalaban Coro. Aussi, l’Union a adressé une lettre le 14 août 2020 au sous-préfet de l’arrondissement de Kalaban Coro pour effectuer la même demande.

Depuis près de sept mois, les jeunes ont entamé des démarches pour trouver des solutions pacifiques à cette discorde. Ils ont demandé aux habitants de se patienter. Vue la lenteur des autorités communales à exécuter la démolition, Mamadou Y. Traoré a poursuivi ses travaux de construction malgré la notification du maire. Il aurait également proliféré des menaces et intimidations à l’endroit de la population du quartier. Selon plusieurs sources, il se promenait dans le quartier avec des ‘’gros bras’’ pour intimider ses voisins. Toute la population de cette zone est déterminée pour libérer cet espace vert et elles soutiennent les jeunes. Seules les autorités n’accélèrent pas les choses.

Les jeunes pensent que cet homme politique a soudoyé toutes les autorités impliquées. Ils affirment : « depuis que nous avons déclaré l’affaire au tribunal, on attend une suite. Les choses ne bougent plus », regrette Sidibé Y., un jeune du quartier.

Les jeunes demandent aux autorités d’intervenir dans un bref délai pour libérer l’espace vert avant que la situation ne dégénère.

Nos efforts pour rentrer en contact avec Mamadou Y. Traoré sont restés sans suite. en témoignent les nombreux appels téléphoniques qu’il n’a jamais décrochés.

Fatoumata Kané

Koureichy Cissé

Encadré Kenekanko est un site web de lutte contre la corruption et l’impunité. www.kenekan.com/. Les témoins de pratique de corruption et de violations de droits humains peuvent y faire des alertes. A partir de ces alertes, notre journal en collaboration avec Tuwindi effectue des investigations pour comprendre davantage ces pratiques.

KC.

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