Le chef de la rébellion touarègue, Ibrahim Ag Bahanga, est mort le 26 août dans un accident de voiture au nord-est du Mali. Quelques heures plus tôt, il avait accordé une interview à El-Watan. Bahanga accuse l’Occident et le Mali de financer le terrorisme.
Secousse médiatique
L’étrange coïncidence entre la sortie médiatique du chef de guerre et sa mort accidentelle a suscité beaucoup de réactions. La presse malienne a abondamment commenté sa disparition. "C’était donc un mortel", s’exclame l’éditorialiste du journal Le Républicain. "Il s’en va dans la fleur de l’âge et dans la surprise générale. Ceux qui l’ont approché retiennent de lui son côté ange. Mais, pour la nation dans son écrasante majorité, c’était un monstre. «poursuit Adam Thiam. Tandis que son collègue de L’Indépendant se lâche : "La République ne peut que mieux s’en porter dans sa partie septentrionale. Et surtout elle doit veiller à ce que plus jamais il n’y ait un autre Bahanga."
Quel impact peut avoir la disparition de Kadhafi sur le mouvement touareg malien ?
C’est une bonne nouvelle pour l’ensemble des Touaregs de la région. Les objectifs du colonel ont toujours été à l’opposé de nos aspirations. Il a de tout temps essayé d’utiliser les Touaregs à ses fins et au détriment de la communauté. Son départ de la Libye ouvre la voie à un avenir meilleur et permet de progresser dans nos revendications politiques. Nous pouvons mieux nous faire comprendre sur le continent et auprès des pays occidentaux. Kadhafi faisait barrage à toutes les solutions de la question touarègue. Il a alimenté des divisions internes pour faire en sorte que les animateurs ne puissent pas s’entendre sur un minimum. Maintenant qu’il est parti, nous pouvons aller de l’avant dans notre lutte. Même durant sa chute, il continue à salir notre communauté en faisant croire qu’il a son soutien, mais la réalité est tout autre sur le terrain.
Le nord du Mali, une région touarègue, est devenu une base d’Aqmi (Al-Qaida Maghreb islamique). Comment cela a-t-il été possible ?
C’est vrai que cette région est un territoire touareg. Mais la politique de certains Etats a fait en sorte que les Touaregs n’aient plus d’emprise sur leur territoire. Lors des affrontements de janvier 2010, entre l’armée malienne, sa milice et le mouvement touareg, tout a été fait pour que les groupes Aqmi viennent s’installer dans la région avec le feu vert de Bamako. Cela fait plus de cinquante ans que les Touaregs sont opprimés dans leur région. L’Etat malien s’arrange toujours pour qu’aucune stabilité politique ou économique ne soit instaurée. Ce qui nuit terriblement à l’image de notre communauté.
Les Touaregs savent qu’ils sont sur leur territoire et qu’ils doivent le nettoyer pour y vivre. Mais, reconnaissons-le, avec quels moyens allons-nous mener cette guerre ? Aqmi s’est équipée grâce au Mali et à certains pays occidentaux. C’est avec l’autorisation de Bamako que les otages sont enlevés et c’est toujours avec sa bénédiction qu’ils sont dirigés vers le nord du Mali pour y être cachés et protégés. Ils seront par la suite achetés par les Etats occidentaux qui acceptent de payer de fortes rançons, tout en sachant que cet argent va financer Aqmi et ses prestataires de services, ces intermédiaires privilégiés de Bamako. Le repli des terroristes en territoire malien n’a pu se faire que grâce à la complicité de l’armée malienne.
Les Touaregs sont devenus la cible privilégiée des terroristes d’Aqmi, qui campent près des casernes et qui détiennent les otages occidentaux. Nos imams militent et sensibilisent nos jeunes et les familles contre cette religion d’intolérance prônée par les salafistes, et qui est en totale contradiction avec notre pratique religieuse. En réalité, sur le plan idéologique, les salafistes n’ont aucune influence sur les Touaregs. Nous nous défendons avec nos maigres moyens et nous envisageons de demander des comptes au pouvoir de Bamako un jour prochain.
Courrier International
Mali : le difficile retour des migrants de Libye
La situation des Subsahariens est particulièrement préoccupante en Libye où Amnesty Internationale rappelle qu’ils courent un grand risque car ils sont pris pour des mercenaires. On compterait encore près de 15 000 Maliens en Libye tandis que 40 000 de leurs compatriotes sont déjà rentrés au Mali. Un retour forcé et donc un déchirement pour eux car en arrivant dans leur pays d’origine ils n’ont plus rien et redoutent l’avenir. AFP
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