Lettre à mon oncle Bass

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Cher oncle,

 

Nangadef ?

Eh oui, Tonton, tout le plaisir est pour moi, de reprendre ma plume pour t’adresser cette lettre, après une brève rupture de deux petites semaines.

Toutes mes excuses pour le silence sans « sommation » mais, toi-même tu sais, (tu me l’as dit plusieurs fois), il faut souvent, savoir mourir… un peu.

Pour être concret, Tonton, je me suis fait accompagner sur un chantier à quelques kilomètres de Fantambougou-Bamako par  quelques bouches la troupe familiale.

L’amarda, composée de 24 bras a travaillé, (comme manœuvres) 20 jours durant, sur le chantier pour rapporter à la maison à Fantambougou-Bamako, l’équivalent de 200 kg de riz.

C’est vrai que tout cela  n’est pas grand-chose pour 58 ventres, mais, c’est  bien mieux que rien.

Voici là, cher Bass, les raisons de mon silence, ces derniers temps.

De toutes les manières, tu n’auras pas perdu grand chose,  en termes de nouvelles du pays car, ici, rien ne change. Surtout, dans le camp des Maliens d’en bas qui constituent l’écrasante majorité.

C’est te dire que, en bas, nous continuons, de subir les coûts assassins des céréales et des denrhées de première nécessité.

La santé ? C’est toujours un luxe pour les petits et les faibles que nous les « en dessous » sommes, malgré la gratuité de la Césarienne (combien sommes-nous à la subir ?), les constructions et équipements de CSCOM et autres…. Pire, nous les ‘’en bas’’ demeurons toujours la proie facile de cette terrible maladie : la misère.

La grave situation de  fatigue  générale dans le Mali d’en bas, demeure, sinon s’empire de jour en jour.

Mais, toi-même tu sais cher oncle, nous les piétinés, les Maliens d’en dessous n’avons jamais connu autre chose que les lendemains incertains, le désespoir, la faim, la soif, la maladie et l’injustice.

Contrairement à cette minorité insolemment nantie, et qui, après avoir emprunté l’ascenseur pour se retrouver “en haut”, nous bloque même les escaliers. C’est te dire que, tout ce qui nous arrive, est le fait de ces hommes démoniaques, ces vampires bipèdes, ces vautours, crocodiles et moutons de la République qui s’abreuvent de notre sang et, se baignent dans notre sueur. Walahi, Bilahi, je jure, si par chance, ces gens-là, arrivaient à échapper au tribunal historique de la honte,  ici bas ils trouveront là-bas, à la « Cour d’Assises de Lahara », les implacables pilons et mortiers qui serviront à les moudre comme du petit mil.

 En attendant, cher oncle, je te demande de m’autoriser à vendre ton petit champ de Dèssèbougou. Cela, afin que je puisse aller quelque part, m’embarquer à bord de ces pirogues qui regagnent clandestinement l’Europe.  Je sais tonton, que l’entreprise est extrêmement difficile et surtout suicidaire, mais, toi-même tu sais, ce sont les vivants qui redoutent la mort.

Or, dans mon cas, avec les poches trouées, le ventre vide, sans emploi, marié de force avec la misère, je suis, depuis fort longtemps mort.

Walahi, bilahi, je jure !

Des nouvelles du Mali d’en haut, et du marigot politique, je t’en servirai la semaine prochaine

A lundi prochain Inchallah !                    

Par ton petit Ablo.

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