Invité du festival de la fiction TV, Sidibé a créé une série très populaire sur l’âge d’or des Bambaras.
«La télévision n’a commencé qu’en 1983 au Mali », dit Boubacar Sidibé. En 1983, le jeune Boubacar, qui était caméraman pour le cinéma, choisit d’accompagner la naissance de ce nouveau média. Comment ? En couvrant l’actualité, et en suivant le chef de l’État malien, Moussa Traoré, au cours de ses déplacements en France et à l’étranger. Jusqu’en 1991, Boubacar Sidibé s’est donc contenté de filmer… ce qu’on lui demandait de filmer.
Après deux ans d’études en Angleterre, le citoyen de Ségou est rentré au Mali avec des projets plein la tête et l’intention de diriger à son tour les mouvements de la caméra. Il est entré au Cirtef, le Conseil international des radios-télévisions d’expression française, siégeant à Bruxelles. Et il est devenu réalisateur.
Un téléréalisateur connu et aimé en Afrique et que l’Europe va prochainement découvrir grâce à la chaîne TV5 Monde. Invité à La Rochelle le week-end dernier, Boubacar Sidibé a présenté deux épisodes de sa série « Les Rois de Ségou » au Festival de la fiction TV. Une série épatante.
« Mais c’est "Plus belle la vie" au Mali ! », s’exclamaient des spectateurs, sous le charme, après la projection. Il y a en effet un petit air de complicité avec les aventures des héros de la série de France 3. Des personnages qu’on suit au fil des épisodes (chacun de 26 minutes) en conflit les uns avec les autres, des bons, des fripouilles, des sages et des imbéciles, bref, un échantillon d’humanité. Sauf qu’à Ségou, au royaume bambara, dans le Mali du XVIIIe siècle, la plupart des personnages sont de noble extraction. Avec « Les Rois de Ségou », Boubacar Sidibé retrace l’âge d’or de l’ethnie bambara. « Une des civilisations les plus brillantes de ce siècle, qui régnait de Bamako à Tombouctou », explique le réalisateur de « Dou » (« La Famille ») et du « Pacte social ».
Deux ans de recherches
« Ils avaient des valeurs dont on aurait bien besoin aujourd’hui pour vivre en meilleure harmonie. » Boubacar est peul. Mais, enfant, il a été éduqué par des Bambaras. Pour écrire « Les Rois de Ségou », il a effectué deux ans de recherches, et consulté des historiens et des traditionnistes (chargés de transmettre la mémoire orale).
« J’ai pris une période de cent cinq ans au cours de laquelle quatre rois se sont succédé », précise Boubacar. Biton Coulibaly, Ngolo Diarra, et ses fils, Monzon et Dah : les voilà, les rois légendaires de Ségou.
Autour de ces rois, craints et respectés mais qui suscitent des luttes de pouvoir, gravitent les membres d’une société fondée sur la faille, l’honneur, le respect des anciens, et dans laquelle les femmes, ces futées, jouent un rôle pas toujours secondaire.
Élection d’un chef (qui deviendra le premier roi), scènes de chasse, intervention du griot, danses rituelles, protection des récoltes, guerre contre les trafiquants d’esclaves… Telle est la vie autour de la cour royale de Ségou, ressuscitée grâce à des acteurs formidables, vêtus des somptueux bogolans du Mali.
« Les Rois de Ségou » ont eu tant de succès au Mali et au Burkina Faso que le tournage de la deuxième saison va bientôt débuter.
Par Christiane Poulin (Sudouest.fr – 11 sept. 2011)