L’affrontement entre l’Etat central et les insurgés du Nord se poursuit sous nos yeux parce que ses conséquences sont toujours à l’œuvre. Il y a cependant un « échec pédagogique » que le pouvoir de Bamako doit assumer dans la question sécuritaire du Nord-Mali. L’approche en était très personnelle pour Koulouba et il en découlera un défaut d’empathie des interlocuteurs et autres visiteurs du soir. Aujourd’hui, les autorités ont sans doute évolué dans les intentions qu’elles affichent.
Nous avons mal en notre Nord-Mali et les larmes versées du petit peuple sont les vraies larmes. Ces vastes terres deviennent notre crainte et notre espoir, malgré le principe vital dans cette atmosphère viciée qui, si on n’y prend garde, risque d’étouffer un jour toute relation entre les populations du Nord et du Sud. Disons-le tout net : le seul problème (et il est de taille), c’est toujours ce hiatus entre les objectifs affichés et les moyens que les autorités se donnent pour y parvenir. Aucun compromis ne réglera ce problème dans l’immédiat. Des incertitudes ? Bamako ne se montre pas pourtant ébranlé outre mesure à l’approche des mesures électorales à prendre pour ce faire dans le Nord. Et le partenaire d’Alger ? On ne le voit pas intervenir, sauf pour maintenir un lien de coopération étroit avec Bamako pour pérenniser tout ce qui a été dit jusqu’à présent. Avec les nouvelles qui nous arrivent du front, on s’est rendu bien vite compte que la rébellion existe et qu’elle n’est pas encore décapitée. On entend des formules à l’emporte- pièce, des propos imagés et autres amabilités sans qu’il soit besoin de rentrer dans les détails. L’Armée nationale roule-t- elle les mécaniques au Nord ? En tout cas, elle a montré ses muscles et les rebelles, leurs limites tactiques, mais avec un décompte macabre, hélas. La vérité des chiffres découlant de ces comptes mortifères des victimes cache un embarras. Dans l’affaire, nos militaires sont montés aux feux et s’ils ont plié un genou dans certaines circonstances, ils arriveront à refroidir les ardeurs belliqueuses des rebelles. En payant le prix fort, le Gouvernement venant de décider de la création d’une Commission d’enquête sur certaines localités. Ceux-là mêmes qui portent aujourd’hui les armes contre
L’Etat doit réagir par rapport à la violence qui lui est opposée. Aujourd’hui, on reste attentif en accordant du crédit aux annonces officielles, et les uns et les autres cherchent systématiquement ce que ces annonces cachent de connivences, de transactions dans l’ombre et de combines. Si les chefs militaires parlaient, on les croira. Il arrive même que les radios et journaux se relayent autour de propos de haute voltige laissant croire à des informations de première importance. Les révélations et les critiques de la classe politique, souvent à travers la diffusion de communiqués ,ont permis une sorte de catharsis. Cela a-t-il pu aider à traduire la réalité du terrain des affrontements ? Les cris et les pleurs des veuves de nos combattants raisonnent encore à nos oreilles. Les épineux et le climat extrême avaient tenu le monde moderne et celui du Sud de nos populations à l’écart de ces zones. C’en est fini avec les bénédictions d’un sous-sol si promoteur, ce qui en fait une « région foncièrement » unique au Mali. Et ce Nord, peut-il être obsédé par l’Azawad ? Est-ce en cela qu’il est menacé d’implosion ? Ce dimanche 29 janvier, nous écoutions sur la radio BBC une émission de débats tournant autour de la question d’une nouvelle rébellion. Deux écrivains de service, avec Fakoly N’Doumbi et Moussa Ag. Assarid, chargé de communication et de l’humanitaire du MNLA et deux autres invités. Ag Assarid fit entendre sa différence en disant que ce qui se passe actuellement n’est pas une rébellion, mais bien une révolution et qu’elle ne cessera qu’avec l’indépendance totale de l’Azawad. Pour lui et les siens, ils vivent aujourd’hui et écrivent l’histoire. Cette révolution n’est pas que touarègue, elle est plus large. Aujourd’hui, ce sont une dizaine de villes qui sont libérées et ce n’est qu’un début, affirme t-il. L’ennemi, c’est AQMI, poursuit Ag Assarid. Son contradicteur, N’Doumbi, qui « ne boit pas dans le même verre » que lui, dit que ce n’est pas une querelle de sémantique qui a lieu ici. Nous sommes bien en face d’une nouvelle rébellion et selon ses propos, le fonds qui manque le moins est que depuis 1980, dans « Jeune Afrique », un interviewé avait laissé entendre qu’ils étaient les seuls représentants de la race blanche encore dominés par les Noirs. Cette trame ne va jamais quitter toutes les rébellions passées jusqu’à ce jour. Ag Assarid ajoutera que de 1963 à nos jours, ils ont appris beaucoup de choses : jamais l’Etat n’a mis encore en place une commission de vérité et de réconciliation sur ce problème. Aujourd’hui, aucune promesse ne les fera reculer, assure- t- il. F. N’Doumbi dira que la méthode à employer avec les touaregs sous la 3è République, après que la rébellion fut matée, prolongera une période d’accalmie de 27 ans. La question qu’on se pose est de savoir si l’Azawad deviendra une réalité aux identités multiples. Pour ses promoteurs, ils ne s’en cachent pas, ils n’y toléreraient aucune différence. La réalité de cette entité étant difficilement explicable (le territoire sahélo- sahélien couvre plusieurs milliers de superficies d’au moins 4 pays limitrophes différents), on avance des hypothèses sorties des cartables et on les considère comme prouvées dès lors que quelques éléments les confortent. Sait-on que l’ex-Guide libyen s’est trompé dans ses élucubrations historiques liant l’arrivée des Arabes dans ces régions aussi loin qu’il le disait, Quand les Touaregs (les Berbères ?) et les Arabes sont venus ici, ils ont trouvé des populations noires sédentarisées depuis sur ces terres. Le MNLA est-il une aile politique ou un lanceur d’alarmes venant pour qu’une procédure soit engagée en bonne et due forme pour l’indépendance ? La solution qui se dessine pour prévenir la récidive, c’est qu’il faut des sanctions alternatives immédiates. Toute politique de sécurité nationale y est invitée car il nous faut sortir de cette culture de l’excuse.
S.Koné