L’AES met en œuvre son projet d’armée conjointe et de passeports : La Défense et la diplomatie en marche, Quid du Développement ?

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Les autorités des trois pays qui composent la Confédération  de l’Alliance des Etats du Sahel semblent articuler leur programme commun autour de trois « D », à savoir la Défense, la Diplomatie et le Développement. Si les deux premiers concepts, à savoir la diplomatie et la défense ont connu, dans une certaine mesure, des progrès significatifs, le troisième concept qui est le développement, semble être le parent pauvre, du moins il est celui qui n’a pas connu des progrès probants, alors même qu’il devrait être la priorité des autorités, car les peuples du sahel sont les plus pauvres de la sous-région tout comme leurs Etats sont  largement en retard en termes de développement. En portant sur les fonts baptismaux une armée conjointe des trois Etats de l’AES, en mettant en circulation un passeport commun et en reléguant le développement au second plan  le Général Assimi Goita du Mali, le Capitaine Ibrahim Traoré du Burkina Faso et le Général Aboudramane Tiani du Niger semblent lourdement se tromper de vision voire de combat. L’économie et les finances socles de tout développement sont au début et à la fin de toute gouvernance. Au-delà de l’annonce comment les autorités de l’AES vont-elles concrétiser leurs décisions, l’argent étant le nerf de la guerre, l’armée conjointe ne va-t-elle pas subir le même sort que celle du G5 Sahel ? Après la mise en circulation de son passeport, à quoi les Etats de l’AES pourraient-ils s’attendre de la part de la CEDEAO ?

Le Mali, le Burkina Faso et le Niger, en décidant de prendre leur destin en main, sont passés à la vitesse supérieure en annonçant la création d’une armée conjointe qui aura pour principale mission de lutter contre les forces obscurantistes. Ils mettront également  en circulation à partir du 29 janvier 2025 le passeport estampillé AES. Ces deux décisions majeures sonnent véritablement la fin de la collaboration entre ces trois Etats et les 13 autres composant la CEDEAO. Le divorce qui semble consommé sera lourd de conséquences tant pour les Etats confédérés, AES que ceux de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, CEDEAO. Les autorités des pays de l’AES conscientes des retombées de leur décision, celle de se dissocier de la CEDEAO ont anticipé en créant le passeport de l’AES et en portant sur les fonts baptismaux une armée conjointe forte de 5000 hommes,  à l’image de son ancêtre le G5 Sahel. Après ces deux actes la CEDEAO va à coup sûr réagir en prenant certaines décisions au nom de la réciprocité, car à la guerre comme à la guerre. Ces décisions pourraient être des restrictions tant dans la libre circulation des personnes et de leurs biens que dans les domaines économiques et financiers.

Au-delà des annonces comment les autorités de l’AES vont-elles concrétiser leurs décisions, l’argent étant le nerf de la guerre, l’armée conjointe ne va-t-elle pas subir le même sort que celle du G5 Sahel ?

Pour le passeport les autorités des trois pays de l’AES n’ont pas assez des soucis à se faire car leurs administrations  sont en mesure de réaliser ce projet qui ne nécessite pas autant des ressources financières comme l’on pourrait imaginer. La question qui taraude l’esprit est celle de savoir si la décision de confectionner le passeport ne jure-t-elle pas avec celle précédemment prise par les autorités des Etats de l’AES de ne pas entraver la libre circulation des personnes et de leurs biens des ressortissants des pays de la CEDEAO dans l’espace AES. Avec la mise en circulation des passeports des Etats de l’AES, il faut s’attendre à une réponse du berger à la bergère de la part de la CEDEAO. Que l’on ne soit pas surpris de l’institution d’un visa des ressortissants de l’AES dans l’espace CEDEAO. Que dire des tarifs douaniers communs aux Etats de la CEDEAO, que ceux de l’AES vont perdre ? Quant à l’initiative de la création d’une armée conjointe pour lutter efficacement contre le terrorisme, elle est à saluer, même si des légitimes interrogations taraudent les esprits.  Celle de la concrétisation de ce projet qui nécessite des moyens financiers et logistiques colossaux pour ne pas subir le même sort que son ancêtre force conjointe du G5 Sahel. Les caisses des Etats de l’AES sont déficitaires, tandis que les bailleurs de fonds traditionnels, ceux qui d’ordinaires aidaient les pays du sahel dans leur combat contre le terrorisme ont tourné le dos aux Etats du Sahel, alors qu’une telle armée est très budgétivore, car elle aura besoin des moyens matériels et financiers pour son fonctionnement.

Après la mise en circulation de son passeport, à quoi les Etats de l’AES pourraient-ils s’attendre de la part de la CEDEAO ?

Les citoyens des Etats de l’AES redoutent des réponses assez sévères de la part de la CEDEAO. L’organisation sous régionale, après le divorce, est capable de restreindre les droits et libertés dont jouissent les Etats de l’AES. Les chefs d’Etats de la CEDEAO, à défaut de dégager un consensus autour d’éventuelles sanctions contre les Etats de l’AES, peuvent les soumettre à un embargo économique qui ne dit pas son nom. Ils peuvent imposer aux Etats de l’AES des droits de douanes et de transit sur les marchandises. Donc pour éviter toute situation conflictuelle entre les deux organisations, il ne faut jamais rompre le fil du dialogue. Les Etats sont liés par l’histoire, la géographie, la culture et l’économie, donc au-delà des vicissitudes qui ne sont que temporaires, les Etats de l’espace communautaire CEDEAO sont indissociables.

En somme, la diplomatie des Etats de l’AES doit se mettre en branle pour atténuer les effets d’éventuelles mesures coercitives de la part de la CEDEAO, en multipliant les sources d’approvisionnement et en tissant des relations de coopération avec d’autres Etats hors zone CEDEAO.

Youssouf Sissoko     

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