Kuru kan fuga ou kuru kan fukan :

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    Kuru kan fuga  kuru = enroulé.   Kanfuga = sur la plaine : une convention qui a lieu dans une plaine. Kuru kan fukan  kurukan = convention ; se plier à quelque chose. Kafukan = enlever les ficelles (fu) : les ambiguïtés = établir une convention claire qui s’impose à tous = Nul n’est censé ignorer la loi.

    De toute façon nos historiens ne doivent pas nous donner des informations historiques issues d’une tradition orale transmise de bouche à oreille avec comme seule garantie l’honorabilité et l’infaillibilité de la mémoire de celui qui transmet le message. Toutes ces données historiques doivent être interrogées à la lumière de la langue : la linguistique doit être privilégiée pour l’étude sérieuse des données historiques de notre tradition. Si nous acceptons de soumettre les données historiques à la lumière de la langue nous acceptons du coup donner une dimension scientifique certaine à notre histoire.

    Dans cette perspective, kurukan fuga ou kulukan fugan est une charte certes. Elle a été signée où ? Sur une plaine où dans la cour de Soundjata après sa victoire sur le Sosso ? Est-ce une charte des vainqueurs comme celle de l’O.N.U ? Ou une consécration des us et coutumes ayant fait leur preuve depuis des années qu’il faut codifier avec l’accord des alliés ?

    Que l’on nous pardonne si nous nous posons des questions qui ne mettent pas du tout en cause cette trouvaille historique de l’existence d’une constitution dans un continent  qui se trouve à la traîne de l’histoire moderne. Les raisons de ce retard ne se trouvent-elles pas justement dans cette attitude d’acceptation quasi-religieuse d’une vérité uniquement pour sa vérité sans voir par-delà l’usage bon ou mauvais de celle-ci ?

    Dès que l’on prend la plume pour parler de kurukan fuga, il faut en dire uniquement du bien par qu’il est inscrit au patrimoine mondial, il est découvert par des hommes en quête d’exhibition de la preuve de leur richesse historique et après ? Ceux qui ont fait cette découverte quelle conduite ont-ils, eux-mêmes ? Quel comportement social ont-ils par rapport à l’application des clauses de la charte de Kurukan fuga ?

    Les réponses à ces questions nous amène à répondre que Kurukan fuga est uniquement exhibé pour faire intellectuel. La population n’a nullement besoin de cette exhibition car elle n’est pas déchirée entre deux cultures. Ceux qui n’ont pas été à l’école vivent leur vie tranquillement. Ils constatent simplement que le fait d’aller à l’école procure postes administratifs, droit à la parole, droit de décision, droit de bien vivre, etc.… Tout pour celui qu’y est parti et rien pour elle. Les plus intellectuels viennent naturellement à table des convives avec leur carte de commerce, avec leur projet à financer, alors ce sont eux les voleurs ! Voilà un exemple des slogans des intellectuels : « trois sortes de voleurs sont recherchées par la police : les bandits qui attaquent la nuit, les commerçants qui font le trafic et les clients des trafiquants. Et toi quelle sorte de voleur es-tu » ?

    Nous ne sommes pas éloignés du sujet. Kurukan fuga c’est l’histoire et un repère pour le présent. Pour notre part l’histoire n’est véritablement l’histoire d’une société que si elle donne un repère pour la société. Cela nous amène à interpréter le sens des différentes appellations de cette charte.

        Nous avions parlé de «  convention pour éclaircir », un code de conduite, une loi. Cette loi établit une hiérarchie sociale à sa tête un roi et son clan ensuite les nobles, les griots et les esclaves : masalen, tootadyon, dyeli et dyon. Pourquoi masalen = intronisé ? Nous ne voulons heurter la susceptibilité de personne, mais chacun sait que les Etats-Unis et ses alliés font tout ce qu’ils veulent dans cette organisation sans pour autant que la charte de cette organisation soit mauvaise en elle-même. Ainsi kurukan fuga est une des preuves parmi tant d’autres de la vitalité et de la richesse de l’histoire africaine, mais ne peut être un forum qui peut faire l’unanimité en raison même du contexte historique de son élaboration et de la division sociale qui en résulte. Il ne faut pas oublier que le colonisateur a vu cette structure complexe du Mandé, il y a mis des ingrédients explosifs qu’il faut s’atteler à désamorcer. Nous n’allons pas reprendre ici la répartition du Mandé à travers l’histoire moderne de notre pays.

    Kurukan fuga est une grande référence, mais ne saurait être l’histoire de la grande République du Mali sans un travail d’appropriation de notre histoire par toute la nation malienne. C’est ce travail qui n’a pas été fait. Ce travail est indispensable car on commet l’erreur de penser que la communauté de vie que nous voyons en apparence soit une acceptation par tous de l’histoire souvent régionale. Toutes les grandes nations ont à un moment donné réalisé leur unité politique et c’est cette unité qu’il faut réaliser avant de se précipiter sur les trouvailles historiques qui jalonnent tout le Mali. Pour ce faire, ce n’est plus la seule voix des intellectuels qui serait prépondérante mais bien tous les fils du Mali avec la seule vision d’unité culturelle consensuelle retrouvée dans une très riche diversité. Cela passe par la relativisation de sa citadelle culturelle comme l’a découvert Paul Valéry : « nous autres civilisations nous savons que nous sommes mortelles ». la mort d’une civilisation ne signifie pas une extinction totale mais bien sa supplantation par une autre. Si l’on veut c’est ce qu’on appelle la « Roue de l’histoire ».

        Œuvrons donc à l’unité politique culturelle de notre pays en mettant la célébration de la nation malienne à l’intérieur de toutes nos épopées. Il ne pas occulter les débats en se basant sur des affirmations péremptoires.

    Par exemple, pour être plus concret, il faut laisser à la musique, aux artistes nous ne disons  pas les griots (que nous interpellons ici car ils ne prennent plus le temps de bien étudier l’histoire qu’ils racontent), de mettre en relief l’unité culturelle du Mali dans sa diversité de pas de danse. Habib Koïté a eu l’initiative de mettre à l’honneur un air musical suivi d’un pas de danse particulier TAKAMBA. Au fil des interprétations, chaque air culturel a montré la possibilité d’adaptation du rythme à son folklore. Cela nous semble possible d’acceptation des voies par lesquelles la population déjà préposée par le cousinage à plaisanterie. Cet effort peut mieux intégrer l’unité historico-politico-culturelle de notre pays. Disons donc à la tache ! Ne mettons pas la charrue avant les bœufs !    

      Adama Ali Koné

     

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