A la faveur des travaux de la première session ordinaire de la Cour d’Assises de l’année 2011, nous avons jugé utile d’en savoir davantage sur les paramètres de certaines peines applicables en matière de Justice au Mali. Les dites peines se divisent en peines criminelles, peines appliquées aux délits et peines de simple police. Pour de plus amples informations sur ces peines, nous avons approché un professionnel en Droit : Mr Alfisseni Diop, Avocat général par intérim près la Cour d’Appel de Bamako.
Le Coq cocorico : Peut-on connaître avec vous, Avocat général par intérim près la Cour d’Appel de Bamako, les différentes peines applicables en matière de Justice au Mali ?
Alfisseni Diop : Merci à vous d’être venu à moi pour parler des différentes peines applicables en matière de Justice dans notre cher pays, le Mali. Vous savez, le Droit est sans ambiguïté dans toutes ses formes. Pourvu que les uns et les autres parviennent à connaître le vrai sens de ce que dit le Droit.
Pour répondre à votre question, d’entrée de jeu, je tiens tout d’abord à vous faire comprendre qu’en la matière, l’Article 1er du Code Pénal, dans ses dispositions préliminaires, dit que les peines applicables au Mali se divisent principalement en peines criminelles, peines appliquées aux délits et peines de simple police. Quant à l’article 2, il indique que l’infraction que le Code Pénal punit d’une peine criminelle est un crime, que l’infraction punie par le Code Pénal portant sur la peine de simple police est une contravention. Et toutes les autres infractions sont des délits, sauf si la Loi en dispose autrement.
Aussi, c’est le lieu de rappeler que le Code Pénal, en son Article 3, dit que toute tentative de crime manifestée par un commencement d’exécution et suspendue ou n’ayant manqué son effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de son auteur est considérée comme le crime lui-même. Par contre, les tentatives de délit ne sont considérées comme délits que dans les cas déterminés par une disposition spéciale de la Loi.
Le Coq cocorico : Qu’appelle-t-on peines criminelles, et combien de peines criminelles existent-il ou sont prévues dans notre Code Pénal ?
Alfisseni Diop : Merci pour cette question. Les peines criminelles qui sont appliquées au Mali sont la peine de mort, la réclusion à perpétuité et la réclusion de cinq à vingt ans. Il faut comprendre que toute condamnation à une peine criminelle entraînera de plein droit la dégradation civique et l’interdiction légale.
Le Coq cocorico : Qu’appelle-t-on dégradation civique et interdiction légale ?
Alfisseni Diop : Le Code Pénal, en son Article 5, dit qu’en vertu de l’interdiction légale, les biens du condamné sont gérés et administrés par un tuteur ou un subrogé tuteur pendant la durée de la peine infligée à un individu fautif d’actes criminels. Lesdits biens lui seront remis, et le tuteur lui rendra compte de son administration, ce, conformément aux dispositions prévues en la matière.
Dans la même logique, l’Article 6 du Code Pénal dit que la dégradation civique consiste 1°) : dans la destitution et l’exclusion des condamnés de toutes fonctions, emplois ou offices publics ; 2°) : dans la privation du droit de vote, d’élection, d’éligibilité et en général de tous les droits civiques et politiques,et du droit de porter aucune décoration ; 3°) : dans l’incapacité d’être assesseur, expert, témoin et de déposer en Justice autrement que pour y donner ou fournir de simples renseignements ; 4°) : dans l’incapacité de faire partie d’aucun conseil de famille et d’être tuteur ; curateur, subrogé tuteur ou conseil judiciaire, si ce n’est de ses propres enfants et sur l’avis conforme de la famille ; enfin, 5°) : dans la privation du droit de port d’armes, du droit de servir dans les armées maliennes, de tenir une école, d’enseigner et d’être employé dans aucun établissement d’instruction à titre de professeur, maître ou surveillant.
Le Coq cocorico : Monsieur Diop, quelles sont les peines applicables aux délits ?
Alfisseni Diop : Là aussi, le Droit est très explicite. Il est indiqué, dans l’Article 7 du Code Pénal, que les peines applicables aux délits sont entre autres l’emprisonnement de onze (11) jours à cinq (5) ans ; la peine de travail d’intérêt général et l’amende. Je précise que la peine d’un jour d’emprisonnement est de vingt-quatre (24) heures. Celle d’un mois est de trente jours. Celle d’un (1) an est de douze (12) mois.
Tout en faisant économie de l’Article 8 du Code Pénal, je dirais plutôt que notre Code Pénal, en son Article 9, souligne que les peines communes aux matières criminelles et correctionnelles sont entre autres l’amende, l’interdiction de séjour qui, en aucun cas, ne pourra excéder vingt (20) années ; la confiscation spéciale, soit du corps du crime ou du délit quand la propriété appartient au condamné, soit des choses produites par le crime ou le délit, soit celles qui ont servi ou qui ont été destinées à le commettre.
Permettez-moi de soutenir que l’Article 10 du Code Pénal dit que les peines de simples polices sont l’emprisonnement d’un (1) à dix (10) jours inclusivement ; l’amende de 300 à 18 000 FCFA inclusivement, et la confiscation pourra être appliquée comme peine complémentaire. Il est aussi nécessaire de préciser que le caractère de peine de simple police touche en général les peines sanctionnant des faits dont la connaissance est attribuée au Tribunal de simple police par la Loi.
Le Coq cocorico : Comment sont exécutées les différentes peines ?
Alfisseni Diop : La réponse à cette question est toute simple. Toute personne condamnée à mort (ou peine capitale) sera fusillée. Une femme condamnée à mort et que l’on trouve qu’au moment de sa condamnation, elle est enceinte ; elle ne subira sa peine qu’après accouchement (délivrance) et une femme qui allaite ne sera exécutée qu’après le sevrage de l’enfant.
Par contre, il est précisé, dans l’Article 12 du Code Pénal, que les personnes condamnées à la réclusion pourront être employées à des travaux d’utilité publique à l’exception de celles âgées de 60 ans accomplis au moment du jugement ; les femmes seront employées à des travaux en rapport avec leur sexe. Et l’Article 13 indique que la durée de toute peine privative de liberté compte du jour où le condamné est détenu en vertu de la condamnation devenue irrévocable qui prononce la peine. En la matière, s’il est signifié qu’il y a eu détention provisoire, la durée de cette détention sera déduite de la durée totale de la peine qu’aura prononcée le jugement de condamnation.
Sur un tout autre plan, l’Article 14 du Code Pénal indique que la peine de travail d’intérêt général est une peine alternative à l’emprisonnement. Elle a pour but de promouvoir les meilleures conditions de réhabilitation, à la réinsertion sociale et à l’amendement du condamné. Vraiment, le Droit est complet en la matière.
Dans notre prochaine parution, nous évoquerons l’Article portant sur les pourtours des circonstances atténuantes.
Par Zhao Ahmed A. Bamako