De nos jours, en milieu rural, l’utilisation des produits chimiques tels que l’engrais chimique, l’herbicide et la pesticide s’impose aux cultivateurs pour avoir des bons rendements à la fin des récoltes. En milieu urbain, les eaux usées provenant des ménages, établissements de santé, industries, ateliers de teinture sont déversées dans le fleuve sans traitement. Alors, quel effet ces activités anthropiques peuvent-ils avoir sur la qualité de l’eau qui est indispensable à la vie de tout être vivant ?
Pour répondre à cette question, nous nous sommes intéressés à deux enquêtes sur la qualité de l’eau dans la zone Office du Niger (ON). L’une a été réalisée par le Laboratoire National des Eaux (LNE) en mai 2017. Elle a été réalisée sur des échantillons d’eau prélevés à Kolongo ville Sougouninda (forage équipé) ; Kolongo réseau d’irrigation Fala de BokyWèrè 1erBief-amont canal (eau de surface) ; Ké-Macina drain Principal à l’embouchure-Aval canal (eau de drainage rejet) ; Ké-Macina ville Hamdallaye-marché (forage équipé) ; Niono ville quartier A- Centre Tara BOUARE (forage équipé) ; Fala de Molodo 1er Bief au point B (eau de surface) ; Molodo ville dans la cour de l’Office (forage équipé) ; Molodo Drain Collecteur du Kala Inférieur Ouest (K.I.O.) au début- jonction des 2 drains (eau de drainage rejet) ; N’Débougou Drain Collecteur du Kala Inférieur Est (K.I.E.) à N’Dilla (eau de drainage rejet) ; Diabaly (zone Kouroumari) Ecole publique (forage équipé).
Cette enquête a concerné tous les paramètres essentiels pour déterminer la qualité de l’eau.
L’autre a été effectuée par l’ONG CAEB en décembre 2017. Elle a été réalisée dans les localités de Kolongo, M’Béwani et N’Débougou et les paramètres de qualité d’eau qui sont concernés par cette enquête sont le Potentiel Hydrogène (PH), le nitrate/le nitrite, et le résidu de chlore.
Les conclusions du Laboratoire National des Eaux
A la lecture du rapport de l’enquête du LNE, il ressort, selon l’analyse physico chimique, que les eaux souterraines sont moins affectées par l’activité d’irrigation. Aussi, les eaux de surface sont de qualité acceptable, mais toutes présentent un DCO (Demande Chimique en Oxygène), DBO5 (Demande Biochimique en Oxygène en 5 jours) dépassant les normes requises excepté le KIO (kala inférieur ouest). Par contre, selon l’analyse bactériologique, une présence de contamination bactériologique est constatée dans toutes les eaux de consommation sauf au niveau de Kolongo et de Niono.
En ce qui concerne les drains principaux, celui du Kala Inférieur Ouest (KIO) ne répond pas aux normes maliennes d’eaux de rejet vu le niveau de la demande biologique en oxygène, d’oxygène dissous et le pourcentage de saturation dans ces eaux. En plus, la présence des bactéries est très accentuée au niveau de ce drain. Sinon les autres drains répondent aux normes de rejet maliennes.
Cependant, les MES (matières en suspension), et le fer total sont très élevés au niveau de tous les drains. Ce qui contribue au développement des plantes aquatiques qui, à leur tour, diminuent la capacité d’autoépuration des eaux de surface.
Les indications de l’ONG CAEB
Parallèlement, l’enquête de l’ONG CAEB révèle que la teneur du nitrite est nulle (0 mg/litre), dans l’ensemble des trois villages contre une concentration maximale de 1 mg/litre pour les systèmes d’eau publics. Quant au nitrate, sa concentration moyenne dans l’eau de boisson pour les trois localités est de 2,36 mg/litre contre une norme maximale de 10 mg/litre pour les systèmes publics d’eau. De surcroit, la proportion moyenne de chlore résiduel dans l’eau de consommation des populations enquêtées (0,02 mg/litre), reste largement inférieure aux normes constatées en 2015 en France par le SEDIF, qui varient entre 0,2 et 0,4 mg/litre.
Au regard de ces résultats, la qualité de l’eau de boisson de ces localités ne souffre pas de mauvaise qualité.
Toutefois, l’eau de productivité contient, à des niveaux différents, du nitrite même si la proportion reste très faible de nos jours. Le seul village où les traces de nitrite ont été constatées dans l’eau des canaux d’irrigation est N’Débougou avec 0,0025 mg/litre pour une concentration maximale de 1 mg/litre recommandée. La concentration moyenne de nitrate dans les canaux d’irrigation pour les trois villages est de 01,52 mg/litre pour une norme maximale de 10 mg/litre pour les systèmes publics d’eau. Le PH moyen de l’eau dans les villages concernés par cette analyse est de 6,21 (contre 6,35 au niveau ménage pour l’eau de boisson). Ces eaux acides, avec l’interaction de certains produits chimiques (engrais, herbicides, pesticides) et des métaux, peuvent être souvent plus toxiques que la normale.
Quant au chlore résiduel, sa proportion moyenne dans l’eau de production agricole des populations enquêtées est de 0,013 mg/litre. Pour le fer, la teneur moyenne dans l’eau de production agricole pour les trois villages est de 1,42 mg/litre. Alors que la limite idéale pour la teneur en fer dans l’eau potable est de 0,3 milligramme par litre (mg/l).
Par ailleurs, en milieu urbain, notamment à Bamako, les eaux usées provenant de divers horizons, les déchets plastiques, les sacrifices continuent de polluer le fleuve. Pendant que l’eau des robinets y est pompée. A cet égard, le LNE rassure à chaque fois la population sur la bonne qualité de l’eau des robinets. Or, des résidus sont fréquemment constatés dans ces eaux. Alors, les observateurs mettent la chaîne de l’eau en question. Notamment au niveau du stockage des eaux et les canaux d’acheminement des eaux dans les points de consommation finaux.
Au regard de toutes ces analyses, la préservation de la qualité de l’eau est indispensable au Mali. Surtout que l’apparition du phénomène des changements climatiques qui est d’actualité amplifie des mesures de préservation. Alors, une lutte commune rassemblant gouvernement, partenaires et société civile est nécessaire pour faire face à cette problématique.
Yacouba TRAORE