Infos ou intox : Intérim et transition

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Depuis que la Cédéao et le Cnrdre sont devenus les principaux législateurs du pays, prenant parfois des lois qui jurent avec la Constitution, le citoyen lambda ne cesse de s’interroger sur la raison d’être et l’utilité de la Cour constitutionnelle. Laquelle pourtant ne chôme pas trop.

Pour la deuxième fois en l’espace de quelques semaines, l’institution républicaine va devoir constater une autre vacance à la tête d’une autre institution de la République, le parlement. A près celui de chef de l’Etat, c’est le poste de président de l’Assemblée nationale qu’il va falloir pourvoir pour remplacer Dioncounda Traoré. Mais déjà, avant même la publication officielle de l’avis de vacance de poste, beaucoup de candidats ont lancé leur avis de manifestation d’intérêt pour le perchoir.
Lundi, la presse rapporte que le député élu à Tombouctou, El Hadj Baba Haïdara, cinquième vice-président de l’Assemblée nationale, va se lancer dans la course. A ses côtés sur la ligne de départ, Younoussi Touré, président de l’Urd et premier vice-président de l’Assemblée nationale, Moussa Oumar Diawara du Cnid et Kassoum Tapo de l’Adéma. Ce dernier est loin d’éprouver la même sérénité que ses concurrents car il n’est pas sûr de pouvoir compter sur les voix de tous les députés de son parti. En effet, dans la Ruche habituée aux envols désordonnés à chaque bourrasque, les vieux démons du tir au flanc se sont réveillés. En l’occurrence, au moins une autre Abeille, Yaya Sangaré, voudrait également butiner aux fleurs du perchoir. Le Comité exécutif (C.E) du Pasj, réuni samedi 2 juin, ne veut pas entendre parler de la candidature de l’ancien «radioteur», susceptible d’aller contre l’unité et la cohésion du parti. Mais dans la Ruche où chacun n’en fait qu’à sa tête et selon ses intérêts, qui va écouter le C.E et lui obéir ? Pas grand monde. A part pour prier Dieu d’améliorer la santé de leur président.
Mardi, le désormais ex-président de l’Assemblée nationale nourrit l’espoir de voir justice faite. Suite à son agression, le 21 mai, le parquet près le tribunal de première instance de la commune III décide de l’ouverture d’une information judiciaire pour tentative d’assassinat sur le président de la République. La requalification des faits a été saluée par le Pasj et le Fdr (Front de sauvegarde pour la démocratie et la République, Front du refus auquel appartient l’Adéma). La précédente qualification, troubles graves à l’ordre public, n’était pas du goût de tout le monde comme chef d’inculpation. D’autant plus que beaucoup ont l’impression que seuls les seconds voire troisièmes couteaux ont été interpellés.
Mercredi, à propos de premier couteau présumé (commanditaire, conspirateur, auteur, etc.), des voix se sont élevées pour demander la levée de l’immunité parlementaire d’Oumar Mariko afin qu’il comparaisse pour éclairer les enquêteurs sur le rôle qu’il pourrait avoir joué dans le drame du 21 mai. Mais le président du parti Sadi, également promoteur du réseau de radio FM Kayira, serait en mission, au Maroc selon les uns, au Ghana selon les autres. Si la levée de son immunité était acquise par les enquêteurs, et s’il était inculpé d’une manière ou d’une autre, Oumar Mariko pourrait ne pas bénéficier du cadeau que les députés vont s’offrir bientôt.
Jeudi, en effet, sur proposition du ministre de la Fonction publique, de la gouvernance et des réformes administratives et politiques (ouf !) mais en réalité sur injonction de la loi fondamentale Accord-cadre du 06 avril, le Conseil des ministres a adopté un projet de loi autorisant les députés à jouer les prolongations à l’issue du temps règlementaire de leur mandat qui expire en août prochain. La durée de ce mandat non électif est calculée sur celle de la transition qui est, théoriquement de douze mois. Mais vu que la transition n’a pas encore commencé effectivement et que l’on débat encore de choses futiles ou utiles, vu que les impératifs de sécurité au nord et de stabilité au sud ne sont pour l’heure que vues d’esprit, les députés ont encore de beaux jours devant eux à porter fièrement leur écharpe tricolore et à deviser paisiblement dans l’hémicycle. Sans participer aux prises de décisions car dans le même temps, les honorables sont priés de donner au gouvernement les fameux  pleins pouvoirs de prendre les lois en leurs lieu et place. Sur la planète Mars, et sans doute ailleurs, on appelle cela légiférer par ordonnances. Jusqu’en octobre, avec une rentrée qui risque d’être houleuse.
Vendredi déjà, au sein du Fdr, on redoute le clash. En cause, le perchoir que l’Adéma et l’Urd, les principaux partis du regroupement, se disputent à travers Kassoum Tapo et Younoussi Touré. Ce dernier est le président par intérim que beaucoup voient en président de transition. Eh oui ! au parlement aussi certains veulent sauter le pas en commuant l’intérimaire en transitoire. Mais ils oublient une chose : par les temps qui courent au Mali, vouloir quitter l’un des postes pour l’autre sans concertation ni dialogue est hautement risqué et dangereux. Dioncounda Traoré en sait quelque chose, contraint qu’il est de prolonger des vacances forcées
Cheick Tandina

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