Après plus deux années d’absence (ou peut-être même plus) aux prières hebdomadaire de la Grande Mosquée de Bamako, IBK y a pointé le nez, vendredi dernier, à l’occasion du deuil national décrété après le drame d’Ogossago (Bankaass). L’occasion de communier avec le peuple aura tourné court par impréparation, par défaut de symbiose avec les masses ou peut-être par désaffection tout court.
Pour le grand fidèle aux abonnés absents qu’il est, le chef de l’Etat a visiblement opté pour l’effacement. Mais sa présence pouvait difficilement passer inaperçue avec le bruyant remue-ménage des caméramans et cliquetis qui balayaient son rayon. S’y ajoute qu’après la prêche rituelle, l’attention de nombreux fidèles a été attirée par la ruée de garde-de-corps qui se sont précipités vers l’illustre visiteur pour l’aider à se tenir debout et prier en même temps que la masse. Le poids de l’âge et la faiblesse physique sont sans doute passés par là, même si IBK n’a pas encore atteint l’inaptitude à la dimension d’un Bouteflika. Pour ce qui est de la désaffection populaire, les traits de ressemblance avec le président algérien sont plus évidents. Et il n’est point besoin de battre le pavé dans les rues de Bamako pour le prouver quand sa présence d’IBK ne créé pas la ferveur et l’engouement qu’occasionne d’habitude les évènements auxquels le nom des premiers responsables de la Nation est associé. L’imam ayant officié la prière aura tenté de voler au secours de sa notoriété banalisée par le public, mais les appels et supplications incessants de l’autorité religieuse pour observer la prière collective en compagnie du président de la République n’ont brassé que du vent auprès des milliers de fidèles. Ils ont vidé le lieu de culte si bien que le président s’est retrouvé seul avec l’imam, son loyal ministre des Cultes et une poignée d’autres fidèles pour faire le reste. L’enjeu n’était pourtant pas de moindre de taille. Il était question en effet de porter et de partager le deuil de dizaine de concitoyens meurtris par le massacre sauvage des leurs sans les retenues dues à l’âge, au statut social et physique, etc. La réticence n’était pas moindre en dehors des mosquées. En dépit de l’annonce de trois jours de deuil à la mémoire des victimes d’Ogassagou, les Bamakois ont vaqué à leurs occupations aurythme ordinaire des concerts et pompeuses fêtes de jouissance à coups de klaxonnes et de démonstrations de motocyclistes.
L’appel à la compassion et à la communion autour d’Ogossagou aurait peut-être été mieux entendu s’il n’était associé au nom d’IBK. On est visiblement loin de la lune de miel entre IBK et les Maliens, lorsque seule sa personne était épargnée par les manifestations d’antipathie populaire contre les politiques.
A KEÏTA