Cour d’Assises : Reconnu coupable d’un meurtre commis il y a 15 ans, un chasseur traditionnel écope de 5 ans d’emprisonnement ferme

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L’accusé avait d’abord été remis en liberté après plus de trois années de détention pour le meurtre du fils du chef de village. Et, douze ans après, il vient d’être renvoyé de nouveau dans sa cellule où il doit passer plus d’une année encore qui sera ajoutée à son temps de détention de trois ans pour compléter sa peine. Ainsi il a été condamné à cinq années d’emprisonnement ferme, hier par la Cour d’Assises à la Cour d’Appel de Bamako pour le même crime.

Les présents faits qui opposaient le ministère public à l’accusé Modibo Diarra se sont déroulés, en réalité, il y a quinze ans. Le 19 avril 2000 pour être précis. Ce jour-là, la victime, Mamadou Kinta, s’est rendue comme il en a l’habitude à son champ. Mais inhabituellement, il n’est pas  rentré à 17 heures comme il en avait aussi la coutume. Il est 20 heures passé, sa femme commença à s’inquiéter et a mobilisé les jeunes du village pour aller chercher son mari.

Les recherches qui ont été menées jusqu’en brousse furent longues, mais en valaient la peine car Mamadou Kinta a été retrouvé allongé dans un champ de riz, le corps inerte et une balle dans la tête. Les parents, voulant se précipiter à la gendarmerie de Macina, ont trouvé devant eux l’auteur du crime qui était déjà à la gendarmerie où il s’est dénoncé lui-même.

A l’enquête préliminaire, il est ressorti qu’en réalité il y avait un litige lié à un périmètre de champ entre Modibo Diarra (l’accusé) et la famille du chef de village de Fiah. Un conseil a même été tenu pour demander à Modibo de s’éloigner dudit champ, mais ce dernier l’a entendu d’une oreille  sourde. Et, comme à son accoutumée au Mali, le litige foncier finit toujours par faire des victimes surtout dans nos villages et fractions.

Selon les aveux de l’accusé lui-même, Mamadou Kinta était parti le retrouver dans le champ et lui a indiqué d’arrêter toute exploitation, mais il a refusé. Les disputes ont alors commencé et la victime ” m’a frappé avec son bâton dans le dos “. ” J‘ai fuis et il m’a poursuivi…Je suis parvenu à prendre mon fusil de chasse qui était sous l’arbre, une lutte s’engagea et accidentellement un coup est parti et a atteint Mamadou “, a expliqué l’accusé durant toute la procédure. ” Pourquoi n’avez-vous pas continué votre fuite au lieu d’aller saisir votre propre fusil déjà chargé surtout que la victime n’avait qu’un bâton…Cela ne suppose-t-il que vous avez expressément tiré sur Mamadou ” ?, a demandé le juge pour en savoir plus sur les vraies intentions de l’accusé. ” Non, je ne l’ai pas fait exprès “, a répondu l’accusé à son tour.

Cependant selon une des robes rouges qui affirme avoir commencé à tirer une arme dès l’âge de quinze ans, chez les ”dossos” (chasseur traditionnel), on ne charge pas son fusil avant de voir sa proie parce que toutes les balles ne servent pas à tuer tous les animaux.

Même si, moi, je pars en brousse, je charge mon fusil car les situations sont imprévisibles “, a répliqué Me Malick I. Maïga, le conseil de l’accusé. Ce qui est aussi constant, selon la défense, c’est que si son client était un vrai meurtrier, il n’allait jamais se rendre à la gendarmerie lui-même. Il a déploré ensuite le manque de certificat médical pour permettre d’en savoir plus avant d’attirer l’attention de la Cour sur le fait que pendant dix ans durant que son client était en liberté il est resté pour faire face à ses responsabilités.

La Cour, en accordant des circonstances atténuantes à l’accusé, l’a condamné à cinq ans d’emprisonnement. Ayant déjà passé plus de trois ans en geôle, il ne lui reste plus qu’une année et quelques mois.

Aboubacar DICKO

 

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