Conférence sur la sécurité et le développement au Sahel / Mohamed Bazoum plaide pour un leadership algérien

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Au Palais des Nations du Club des Pins d’Alger s’est ouverte, ce mercredi 7 septembre 2011, la Conférence de haut niveau sur le Partenariat dans les domaines de la sécurité et du développement entre l’Algérie, le Mali, la Mauritanie, le Niger (pays du champ) et les partenaires extrarégionaux. Constat : la situation dans le Sahel s’est totalement dégradée. La région s’est transformée en une véritable poudrière. Les pays du champ et les partenaires se concertent à Alger. 

Cette rencontre est le cadre de discussions sur la lutte contre le terrorisme et le crime transnational organisé ainsi que sur le développement et l’amélioration des conditions de vie dans la région. « Cela témoigne de notre adhésion collective à la mobilisation impulsée par les Nations-Unies contre le terrorisme en tant que menace globale nécessitant une réponse globale grâce à une coopération internationale renforcée », a déclaré Abdelkader Messahel, ministre délégué chargé des affaires maghrébines.

Selon lui, cette conférence est la première du genre dans son format parce qu’elle s’ouvre aux différents partenaires bilatéraux, organisations régionales, système des Nations-Unies et bailleurs de fonds qui sont pleinement associés à l’examen sous toutes ses facettes, et d’une manière orientée vers l’action, des problématiques indissociables de la sécurité et du développement. « Les pays du champ [Algérie, Mali, Mauritanie, Niger] sur la base d’échanges permanent de leurs évaluations respectives sont parvenus à une perception commune de la menace que fait peser sur notre région le terrorisme et ses interconnexions avec le crime transnational organisé. Ils ont aussi convenu d’intégrer de manière opérationnelle la dimension développement et lutte contre la pauvreté en tant que paramètre fondamental pour assurer des conditions de sécurité et de paix durables dans la région», a expliqué Abdelkader Messahel.

Des échanges intensifs ont débouché sur l’articulation d’une stratégie régionale, intégrée et cohérente pour relever collectivement ces défis. Selon lui, les conférences régionales d’Alger de mars 2010 et de Bamako de mai 2011 ont constitué des jalons importants dans ce processus en définissant des principes et objectifs partagés et un mode opératoire fondé sur la mise en commun de nos capacités en matière de renseignement et de capital expérience et l’intensification de la coopération opérationnelle dans la région.

Les pays du champ ont développé un cadre juridique et de coopération à travers des conventions bilatérales, judiciaires et autres, qui se voit conforté er renforcé par les mécanismes mis en place dans le cadre de la stratégie régionale et qui englobe les quatre dimensions politiques (consultations régulières), militaire (avec le Cemoc), sécuritaire (à travers une unité fusion et liaison) et du développement (qui comprend des microprojets au bénéfice directs des populations les plus démunies et de grands projets structurants, à l’image de la transsaharienne). Cette stratégie a permis aux pays du champ d’engager le partenariat et la coopération régionale sur des bases organisée et dans un esprit solidaire, a indiqué le ministre algérien.

Le partenariat devrait également couvrir, selon lui, le volet normatif et l’impératif de tarir toutes les sources de financement du terrorisme, y compris en prohibant le paiement de rançons. Ces revenus permettent en effet aux groupes terroristes d’acquérir des armes, d’attirer de nouvelles recrues, de se procurer de moyens logistiques et d’intendance.

A la recherche d’une criminalisation du versement des rançons

 Au demeurant, le versement des rançons contrevient aux dispositions de la résolution 1904 adoptée par le Conseil de sécurité en décembre 2009. « Il est important que tous les Etats, et particulièrement nos partenaires, nous appuient dans notre effort visant à enrichir l’arsenal juridique international d’un texte criminalisant le versement des rançons qui constituent la source principale de financement des groupes terroristes du Sahel », a déclaré Abdelkader Messahel, ministre délégué chargé des affaires maghrébines.

Les risques liés aux répercussions de la situation en Libye, notamment le flux incontrôlé d’armes de tous calibres vers le Sahel, donnent à cette conférence une dimension particulière. L’afflux des travailleurs migrants qui ont du quitté la Libye font également peser des charges supplémentaires sur les ressources limitées du Mali et du Niger. Ces éléments sont donc à prendre en compte dans l’approche de la sécurité et du développement de la région.

Le ministre malien des Affaires étrangères et de Coopération internationale, Soumeylou Boubèye Maiga, a évoqué les défis qui se posent aux quatre pays du champ frappés par une vulnérabilité structurelle et qui impose une démarche unitaire. Il s’agit de revendication identitaire, de trafic de drogue, Al Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) qui tire ses ressources des rançons. Pour lui, pas moins de 50 tonnes de drogue (cocaïne) transitent par le sahel par an, sur lesquelles les terroristes ont des revenus substantiels. A cet effet, il y a un accroissement de la menace terroriste engendrant des atteintes à la souveraineté de nos Etats. Enfin, il y a le défi du développement et de la bonne gouvernance, ajoute SBM. Il a mis en garde contre une transformation du Sahel en champ de guerre ou d’expérimentation des théories. Mais plutôt de résoudre des problèmes de sécurité et de développement.

Mohamed Bazoum, ministre nigérien des Affaires étrangères, a mis l’accent sur le caractère dialectique des relations entre la sécurité et le développement qui s’est imposé aux quatre pays à la recherche de solutions aux questions de sécurité.

« Le Sahel, une véritable poudrière »

Il a appelé à dépasser la mise en place simple du Comité d’état major opérationnel conjoint (Cemoc) car, selon lui, jusque là ce dispositif n’est pas opérationnel. A l’en croire, l’espoir né de la réunion de Bamako n’a pas fait long feu. « Le moins que l’on puisse dire est que la situation s’est totalement dégradée. La région s’est transformée en une véritable poudrière ». Selon Mohamed Bazoum, le 12 juin dernier, l’armée nigérienne a saisi un véhicule bourré d’explosifs, dont du Semtex qui est une matière servant à fabriquer des bombes extrêmement dangereuses. Des armes de toutes sortes circulent dans la zone, la quantité de véhicules 4×4 mis sur le terrain, le crime organisé et le terrorisme sont des réalités d’aujourd’hui. Mohamed Bazoum s’est dit heureux de la participation à cette conférence de partenaires multilatéraux et bilatéraux, ainsi que des organisations financières de développement. Il a évoqué le lourd tribut payé par le Niger face aux groupes armés et Aqmi, avant de saluer les efforts des gouvernements malien et mauritanien. Selon lui, l’Algérie doit assumer le leadership de cette lutte pour la sécurité et le développement et être à la hauteur. « Les Etats concernés doivent jouer un rôle primordial. Nul ne doit se substituer à eux et agir à leur place », a déclaré André Parant, conseiller diplomatique adjoint du Président de la République française. Il a mis l’accent sur le besoin de ces régions de se développer pour avoir la sécurité.

L’UE met 800 millions d’euros

L’Union européenne est représentée à cette rencontre par son Coordonnateur pour la lutte contre le terrorisme, Gilles de Kerchove et Manuel Lopez Blanco. Parlant au nom de l’Union européenne (UE) et de la Haute représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Manuel Lopez Blanco a salué l’important rôle de l’Algérie dans cette concertation régionale qui doit se consolider et même s’élargir. « La sécurité et le développement au Sahel est une priorité et un enjeu d’intérêt commun pour les pays de votre sous-région et pour l’Union européenne », a-t-il déclaré. A cet effet, la stratégie de l’UE vise principalement à soutenir l’effort des quatre pays du champ.

 Mais elle est aussi ancrée dans un contexte régional plus large, comprenant le Maghreb et l’Afrique de l’Ouest. L’Union européenne considère important le dialogue avec les organisations africaines, tout particulièrement l’Union africaine et la Cedeao, ainsi qu’avec les autres partenaires internationaux. L’UE déploie déjà des ressources significatives pour financer des programmes qui répondent aux objectifs de la Stratégie. Selon Manuel Lopez Blanco, le montant total des projets en cours ou programmés au sahel et au Maghreb concernant la stratégie s’élève à 650 millions d’euros. Par ailleurs l’UE dispose d’une enveloppe supplémentaire de 150 millions d’euros pour identifier de nouveaux programmes dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie, selon Manuel Lopez Blanco.                                                  

Boukary Daou                                                     

Envoyé spécial à Alger

 

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