Comment peut-on vaincre définitivement AQMI ?

0

Contre le discours prêchant un islam radical et jihadiste des idéologues d’AQMI, il faut proposer un prêche faisant la promotion d’un islam ouvert et tolérant.

Tel est, à notre avis, le système de guerre adapté au phénomène d’Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI) tel qu’il se présente aujourd’hui au Mali. Vu la proximité des militants d’AQMI aux populations locales et l’activisme de ses idéologues – recruteurs qui ont réussi à enrôler de nombreux jeunes maliens, la lutte armée semble ne plus adapter. Si l’on veut, en tout cas, remporter une victoire totale et définitive.
Pour une victoire durable contre AQMI, nous pensons qu’il serait nécessaire de mettre en œuvre concomitamment un système de lutte idéologico-économico-militaire.

La guerre idéologique

Le célèbre islamologue suisse d’origine égyptienne, le professeur Tariq RAMADAN disait lors d’une de ses conférences : « il ne s’agit pas d’aller tuer le jeune qui détient l’arme dans les montagnes pour mettre fin au fondamentalisme, à l’extrémisme religieux ; il faut plutôt chercher à identifier l’idéologue-recruteur qui est parmi nous en train de prêcher le radicalisme religieux. C’est lui le plus dangereux qu’il faut mettre hors d’état de nuire pour lutter efficacement contre le réseau Al-Qaïda. .. » Un peu plus loin, le professeur RAMADAN ajoute « Vous tuez aujourd’hui un jeune militant d’Al-Qaïda, demain le recruteur enrôle deux nouveaux jeunes ». C’est pourquoi l’islamologue suisse proposait l’idéologie comme moyen efficace et durable de lutte contre le réseau Al-Qaïda.
Les recruteurs d’AQMI sont aujourd’hui à pied d’œuvre au Mali. Ils manipulent les jeunes en les promettant paradis (à l’au-delà) et emplois (dans le monde ici-bas). Les jeunes maliens qui sont généralement analphabètes, donc naïfs se laissent facilement convaincre par ce discours manipulateur. Surtout que face à ce discours, on ne leur propose rien. Ni emplois, ni autres discours (prêches) défendant le contraire. Le choix est donc vite fait. C’est pourquoi dans les plans de lutte contre AQMI au Mali, l’Etat doit non seulement intégrer le volet prêches sur un islam ouvert et tolérant, mais aussi accorder une place de premier rôle à ce volet. A cet effet, des prêcheurs professionnels doivent être mis sur le terrain pour opposer au discours jihadiste d’AQMI, un discours beaucoup plus perspicace et séducteur sur l’islam ouvert et tolérant. Des prêcheurs maîtrisant la « haqiqat » de l’islam comme par exemple Assane Issouf DIALLO, soufi Bilal et d’autres prêcheurs de la même envergure seraient les mieux indiqués. Dans le même ordre d’idées, pourquoi ne pas inviter des professeurs célèbres comme Tariq RAMADAN occasionnellement pour faire des prêches à travers le pays. Les jeunes qui suivent les extrémistes le font généralement faute de bonnes informations sur l’islam. Une preuve, certains jeunes adhérant à la secte des pieds nus qui exclu le port de tout objet fabriqué par les occidentaux détiennent des téléphones cellulaires. Quelle contradiction ! Ils refusent de porter des chaussures sous prétexte qu’elles viendraient de chez les occidentaux (ce qui n’est pas toujours vrai) et font sien un téléphone cellulaire qui est une Nouvelle Technologie de l’Information et de la Communication. C’est la preuve que ces jeunes là son manipulés. Ils sont dans la caverne, ils sont emprisonnés. Il faut donc les libérer par des prêches capables de battre en brèche les fondements même de leur adhésion à ces réseaux jihadistes. Pour une plus grande vulgarisation des messages que véhiculeront ces prêches, les radios de proximité peuvent servir de bons relais. Car ayant l’avantage de parler les langues du milieu.  

Le Programme Spécial pour la Paix, la Sécurité et le Développement dans le Nord doit revoir sa copie. Ce programme sur lequel nous fondons assez d’espoirs pour le recul de l’insécurité dans le nord du Mali doit intégrer dans son plan de communication des prêches sur l’islam tolérant. Car lors du lancement de ce programme à Tombouctou, nous avons constaté qu’un volet prêche n’était pas prévu. L’Etat malien doit comprendre qu’AQMI évolue et qu’il faut constamment adapter les moyens de lutte. A un passé récent, le Président même déclarait que ces gens ne sont pas des maliens. Maintenant qu’il y a des maliens, et même beaucoup de maliens parmi eux. Cela nécessite alors de revoir la méthode de lutte.    

La guerre du développement
Les populations locales ne voient plus en mauvais œil la présence d’AQMI chez elle parce que AQMI les a rendu certains services que l’Etat ne leur a jamais rendu. Imaginez un village où il n’y a pas d’infirmerie et qu’AQMI apporte des médicaments.

Des populations qui mangent à peine deux fois par jour et qu’AQMI les apporte des vivres. Des enfants qui se voient distribuer des dattes, biscuits, bonbons et autres. Des gens, plutôt que de voir l’Etat, voient des militants AQMI généreux, paisible et religieux. 

En même temps que la lutte idéologique donc, les actions de développement doivent être entreprises pour permettre à la population de ne pas être trop nécessiteuse au point de se sacrifier en adhérant au réseau AQMI. L’enseignant à qui on a proposé de tripler le salaire ne les a pas suivi parce que au moins il gagne quelque chose à la fin du mois.

La lutte armée
Elle doit venir pour parachever le travail. Après que les prêches et le développement aient endigué les discours d’endoctrinement des idéologues d’AQMI, la lutte armée vient pour nettoyer les derniers récalcitrants qui n’ont plus de soutien au sein des populations, car décrédibilisés. Oui, seules des prêches sur le vrai islam (l’islam, tolérant, modéré, intelligent) et le développement peuvent décrédibiliser, aux yeux de nos populations, ces barbus.   C’est une lutte de longue haleine et multidimensionnelle. Mais c’est le prix de la victoire durable. Ne commettons pas l’erreur des américains qui ont opté pour le tout sécuritaire et le résultat est là aujourd’hui. Malgré leur superpuissance, après bientôt dix années de guerre, les talibans sévissent encore en Afghanistan et au Pakistan. Malgré la mort de Ben, le réseau est actif. Ça veut dire que l’option militaire uniquement n’est pas la solution.
Pendant que nos services de renseignement qui sont très peu renseignés, il faut le dire, dormaient, AQMI a infiltré tranquillement nos populations et devient plus que jamais dangereux. C’est un véritable challenge devant lequel il ne sert à rien d’être exciter. Il faut plutôt faire travailler les cervelles !
                                                                                                              M’pè

Commentaires via Facebook :