La population de Bankass vit un dilemme très délicat depuis un certain moment. Il s’agit de la nécessite de sécurité par la présence des Forces armées malienne (FAMa) et l’urgence d’avoir accès à leur Centre de Santé de Référence. Ils ont les deux (camp et centre de santé), mais dans une cohabitation très difficile depuis un moment.
La cohabitation est tendue entre le personnel du centre de santé et le camp militaire qui fait face au cre. Selon des informations, c’est la route bitumée dénommée la ‘’route des poissons’’ qui sépare les deux structures. Toutes les deux indispensables à la vie de la population de la ville de Bankass. A en croire certaines personnes, depuis un certain moment, l’accès à l’hôpital n’est plus aisé à partir de 18h ni pour les usagers, ni pour le personnel. Pour sécuriser le camp, qui est cible potentielle d’attaques djihadistes la plupart des cas, les militaires sont obligés de lever des barricades et être vigilants à tout moment. Cette mesure sécuritaire à son tour, fait peiner les usagers du Centre de Santé et le personnel, a confié une habitante de Bankass jointe par téléphone.
Il n’y a pas longtemps, raconte une enseignante, un homme a aidé une femme à transporter son enfant malade au centre pour des soins. Arrivé au check-point, l’homme n’ayant pas entendu les haltes du militaire, a continué à se diriger vers ce dernier. Le militaire a fini par ouvrir le feu sur le véhicule pour l’obliger à stopper. Le monsieur a été frôlé par une balle qui l’a blessé à la tête. Heureusement, dit-il, ni l’enfant ni la mère n’ont été touchés et l’homme est sorti la vie sauve. Cette altercation a été une grande tension entre l’administration hospitalière et les responsables du camp.
Beaucoup de personnes déplorent la proximité entre le camp et l’hôpital aujourd’hui qui pour eux expose le Centre de Santé à une forte insécurité. Pour confirmer ses propos, un jeune leader a rappelé une triste histoire de fausse alerte qui a fait trembler la ville de Bankass de 18h à 22h. A l’en croire, lors d’une festivité de lutte traditionnelle dans la ville, la bougie d’une moto aurait pété et le bruit de l’explosion a fait courir la foule qui s’est dirigée vers le camp. Ce jour-là, il y a bientôt 2 ans de cela, le contingent de gendarmes en place aurait ouvert le feu de 18h à 22h. Deux personnes ont perdu la vie. Elles étaient toutes les deux dans l’enceinte de l’hôpital, a fait savoir la source.
En ce qui concerne, la proximité du camp au Centre de Santé que dénonce la population de Bankass, ce n’est pas du tout normal, selon un haut responsable des collectivités territoriales. « Les civils et les militaires n’ont pas les mêmes objectifs ni les mêmes obligations ou comportements. Les civils et les militaires ne peuvent pas côtoyer ensemble », a prôné l’agent des collectivités qui a dit avoir vécu un cas pareil et que par nécessité, la poudrière aurait été redéployée ailleurs. « L’implantation d’un camp militaire doit obéir à certains critères de distance réglementaire ainsi que des champs de tirs militaires », dit-il et il est soutenu par un jeune bankassois, qui raconte qu’ « au début ce n’était pas prévu que le camp reste. Là où est le camp aujourd’hui, c’est un enclos dédié aux femmes de Bankass. Le premier contingent devrait séjourner quelques jours avant de trouver où s’installer ».
« Nous aimons nos militaires et nous voulons avoir accès à notre Centre de Santé » ! C’est la situation confuse que vivent les populations de Bankass qui suivent des mesures très restrictives pour accéder leur Centre de Santé bloqué à partir de 18h pour raison de sécurité du camp. « Quand même l’accès libre et à tout moment est un droit fondamental », confie un médecin. A ses dires, la loi hospitalière en son article 7 préconise : « Le service public hospitalier garantit l’accès de toutes personnes présentes sur le territoire national à des soins d’urgence ». Le même article termine en précisant : « A ce titre, chaque établissement hospitalier est tenu d’accueillir en urgence et à tout moment, toute personne dont l’état de santé le justifie ». L’article 8 de la même loi cite les malades, les femmes enceintes ou les victimes d’accident comme des cas d’urgence à accéder en toute liberté à un établissement hospitalier.
Pour plus de précision sur l’inviolabilité d’un centre hospitalier par qui que ce soit, un professeur chef de CSRef apostrophe ce principe sacrosaint de la vie hospitalière : « On ne tire pas sur une ambulance », ajoute qu’ « un hôpital c’est aussi une ambulance. L’ambulance et l’hôpital sont dans le même contexte ».
«A vrai dire, tout est question d’individu. Moi personnellement j’ai connu des militaires hyper gentils dans certains contingents. Ils nous rassuraient même. On mangeait ensemble et ils étaient tous les temps avec nous dans notre centre. On se sentait très en sécurité. Certains d’entre eux m’aidaient à porter mon enfant quand il pleurait. Des gens très cool. Mais il y a d’autres aussi dont le comportement est amer. Donc, c’est une question d’individu », a clarifié une infirmière qui travaillait au Centre de Santé de Bankass. Un autre jeune affirme, « si nous sommes ici à Bankass et que rien ne nous arrive, c’est aussi grâce à la présence de ce camp. Même si ça nous plairait qu’ils essayent de revoir leur cas de l’hôpital. Nous soutenons nos militaires, nous soutenons nos FAMa. Vive l’Armée » ! clame-t-il pour remercier les militaires qui donnent leur vie pour les Maliens et le Mali.
La question aurait été abordée plusieurs fois dans la ville de Bankass mais aucune solution n’a été trouvée pour gérer ce dilemme entre deux structures aussi dispensables que nécessaires, le camp et le centre de Santé.
Koureichy Cissé
Encadré : cette alerte a été faite sur la plateforme Kenekanko. Une plateforme où on avise sur des cas de violation de Droit, d’abus et de corruption en toute sécurité. Chaque alerte est traitée par un journaliste après recoupement
K. C.