Attaques contre IBK : Ce que veut la France

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Le président  Ibrahim Boubacar Keïta
IBK Hollande

Responsable du génocide rwandais, selon Kagamé, acteur de la rébellion en Côte d’Ivoire, aux dires du clan Gbagbo, témoin indifférent de l’épuration ethno-religieuse en RCA, selon plusieurs réfugiés, fossoyeur de la Libye, la France est de plus en plus indexée pour tous les malheurs qui s’abattent sur le continent. Les Maliens ont d’autant plus peur pour leur intégrité territoriale que les troupes françaises sont présentes depuis plus d’un an dans le nord, s’acoquinant avec des terroristes rebelles dont les velléités sécessionnistes sont connues de tous. Pour mieux déstabiliser le pays, on s’attaque aujourd’hui à son président.

Aux dires du président rwandais, la France aurait activement participé à la préparation et à l’exécution du génocide des Tutsis (mais aussi de l’exécution sommaire de centaines de Hutus modérés). C’est dans les colonnes du magazine panafricain, Jeune Afrique du 06 avril dernier, que Paul Kagamé a fait cette déclaration à l’occasion du vingtième anniversaire de cette tragédie. Sainte Nitouche, la France outragée et outrée a voulu réduire sa représentation à son seul ambassadeur en poste à Kigali. Elle n’aura même pas ce plaisir car ce dernier s’est vu refuser, par téléphone, une accréditation. Selon les méchantes langues, on lui aurait même coupé le courant pour l’empêcher de suivre l’événement à la télé. Bien que les faits se soient déroulés à une période assez lointaine, à partir d’avril 1994, et dans une zone très éloignée de l’Afrique de l’ouest, dans la région des grands lacs, ils n’ont guère étonné ici. Ici en Afrique occidentale où les populations ont une certaine perception de la France, cette ancienne puissance coloniale devant qui, chaque fois qu’elle est présente, se déroulent des guerres intercommunautaires, comme en Côte d’Ivoire, ou des épurations ethno-musulmanes, à l’image de ce qui est en train de se passer en République Centrafricaine. Les faits n’étonnent guère, ici au Mali, où le pays est confronté à une division de fait de son territoire, à cause d’une politique française trouble et sournoise qui, forcément, s’est discréditée et dépréciée au fil des mois.
Depuis son « succès » dans les Balkans, la France ne se contente plus d’user du devoir d’ingérence si cher à Bernard Kouchner, son inventeur, mais d’abuser d’un droit d’ingérence qu’elle s’est unilatéralement arrogée, notamment en ce qui concerne ses anciennes colonies dont les « dirigeants » doivent avoir l’onction du pouvoir parisien, qu’il soit de gauche, de droite ou du centre, avant d’entreprendre la moindre action. Principalement, en ce qui concerne le Mali qui, depuis des décennies, peine à se doter d’un pouvoir fort. Ce pouvoir fort, le pays pense l’avoir trouvé en la personne d’Ibrahim Boubacar Kéita, élu en août dernier, investi en grandes pompes le 04 septembre devant un parterre de chefs d’Etat, dont François Hollande de France, et de personnalités venues du monde entier. Si IBK a été plébiscité, c’est parce qu’il représente aux yeux du peuple malien et de beaucoup d’Africains celui qui peut apporter des réponses précises aux questions sécuritaires surtout mais aussi économiques et sociales. Encore aujourd’hui, la majorité croit qu’il peut apporter ces réponses pourvu qu’il bénéficie d’un accompagnement sincère de la part de la communauté internationale. Ce qui ne semble pas être le cas à la lecture de récents événements qui pourraient affecter ou affectent déjà les relations internationales du Mali.

           
La France, de plus en plus suspecte
La popularité dont jouit le président de la République et le soutien qu’il pouvait espérer des Maliens, y compris des rebelles touaregs avec lesquels il a accepté des compromissions, avaient fait croire que ce nouveau président mettra fin rapidement à la crise sécuritaire, qu’il était en mesure de faire en quelques mois ce que ses prédécesseurs n’ont pu faire pendant plus d’un demi-siècle. Aujourd’hui, cet « échec » lui est jeté à la figure. Pire, il est l’objet d’une campagne médiatique et diplomatique de dénigrement, de délation et de diffamation. Des articles de presse, savamment nourris par des sources policières et judiciaires, des réseaux politiques et diplomatiques, sont publiés ça et là par des journalistes peu scrupuleux.
Certes, IBK a, pour le moment, échoué à apporter une réponse au problème du nord, ce pour quoi il a été en partie élu, mais s’il a échoué, c’est parce que dans certains milieux français on s’échine à lui mettre des bâtons dans les roues.

Cela se passe d’abord en France même où une mésentente existe depuis longtemps au sein de cercles politiques sur la gestion de la crise malienne. A ce niveau, certains s’insurgent contre la volonté d’autres de collaborer aveuglement avec le Mnla. Cette décision politique ne semble pas être partagée par la hiérarchie militaire française, qui est la seule à commander la troupe au sol, où d’étranges alliances se sont nouées entre Touareg et ceux qui ont succombé à leur lobby, et qui continuent encore de croire que le Mnla pourrait jouer un rôle majeur dans le nord, au cas où cette zone serait dotée d’un statut spécial.

Cela, en parfait accord avec son peuple, IBK s’y refuse. Il faut donc le punir parce qu’il refuse de mener des négociations avec des groupes rebelles ailleurs qu’au Mali ; il faut le punir parce que surtout il refuse de s’asseoir à la même table que des individus malveillants qui refusent de désarmer auparavant et entendent traiter d’égal à égal avec les plus hautes autorités du pays. IBK peut se prévaloir du soutien populaire. En effet, un sondage mené récemment par le cabinet Guindo’s Institute dans toutes les régions du Mali a démontré que les Maliens, dans une écrasante majorité, surtout dans les régions concernées, sont d’accord avec la position du chef de l’Etat, notamment lorsque les autorités posent des conditions pour la réinsertion socioéconomique d’individus soupçonnés des pires atrocités. Sous prétexte de réconciliation nationale, il n’est pas question d’absoudre des crimes.

Non à des négociations en dehors du Mali
Un autre aspect, et pas des moindres qu’on reproche au président plébiscité, c’est d’avoir été un rempart au retour de la mafia politico-financière aux ordres des puissances étrangères qui a géré le pays au cours des dernières décennies. Aujourd’hui, IBK est soumis à un chantage international qui ne dit pas son nom : sous prétexte de la nécessité d’un remaniement ministériel, on veut qu’il fasse revenir au pouvoir la racaille qui a pillé et torpillé l’économie nationale en complicité avec des réseaux internationaux mondiaux dont les ramifications conduisent dans des palais occidentaux, ces cercles de décision qui, qu’ils soient de gauche, de droite ou du centre, qui concourent à l’autodestruction assistée de l’Afrique depuis les indépendances.

Aujourd’hui qu’un président est véritablement élu par son peuple, il faut le déstabiliser car il dépare et dérange cette Afrique francophone dont la plupart des dirigeants sont aux ordres du petit blanc.

Désormais, le Mali, malgré sa récente histoire, compte constituer l’exception et rappeler, à ceux qui parlent d’intransigeance et d’ingratitude, le rappel des faits pour lesquels ils croient que le Mali devrait être à jamais l’obligé de la France.

En janvier 2013, quand la force Serval a bombardé et stoppé l’avancée jihadiste à Konna, dans le centre du pays, cette intervention française a été saluée par tous les Maliens et, sans doute, par beaucoup d’autres. D’autant plus que les Français ne se sont pas limités à enrayer l’offensive islamiste mais également à libérer toutes les zones (trois régions du nord et une grande partie du centre, soit plus des deux tiers du territoire national) alors sous contrôle des groupes armés terroristes, narcotrafiquants et jihadistes. Du coup, bien que placée sous mandat onusien, la suite de l’intervention française a presque fait oublier dans l’esprit des Maliens la décision prise auparavant par une autre France d’aider un groupe rebelle, le Mnla (Mouvement national de libération de l’Azawad), à faire ce que l’armée nationale ne parvenait pas à faire. Le succès de François Hollande de France a donc fait oublier l’échec de Nicolas Sarkozy qui avait fait des rebelles son « cheval de Troie », un bien piètre tocard ! Mais si l’ancien président français a voulu utiliser le Mnla dans sa lutte contre le terrorisme international et la criminalité transfrontalière dont le nord malien était devenu le sanctuaire, et a échoué dans son entreprise parce que ses protégés ont été chassés du nord comme des chiens galeux par les islamistes avec lesquels ils ont eu une brève idylle, Hollande lui ne devait pas échouer. Non pas échouer à libérer les zones occupées par les terroristes, ce n’était pas primordial, mais à empêcher une victoire islamiste dans les zones du sud.

Un cheval de Troie boiteux
Une telle éventualité pouvait causer la prise en otage par les islamistes de milliers de Français et d’Occidentaux qui résident dans les villages et villes du sud: coopérants, diplomates, opérateurs économiques, acteurs du développement, touristes, résidents binationaux, etc. Le phénomène aurait même pu se propager à des pays voisins. C’est d’ailleurs pourquoi une intervention armée au Mali avait été envisagée, préparée longtemps avant les velléités jihadistes de prendre le contrôle de tout le pays. En janvier, la fulgurance et la réussite de Serval n’ont été possibles que grâce à cela. Et, contrairement à ce qui s’est dit officiellement, la France, qui bénéficiait d’un bon réseau de renseignement, est intervenue bien avant l’appel au secours officiel du président de la transition.

L’ancienne ( ?) puissance coloniale, bien que s’entourant des atours onusiens, n’a jamais laissé l’initiative des opérations à d’autres concernant ses anciens ( ?) sujets, en particulier le Mali d’où ses intérêts étaient hautement menacés. Son empressement à faire gérer la crise malienne par des sous-fifres, par l’imposition d’une transition politique, l’organisation d’élections générales traduisaient en fait sa volonté de garder la main mise sur le pays, en le divisant si nécessaire.

Mais si le président couac-couac, Sarkozy, a misé sur le mauvais cheval de Troie en armant et finançant le Mnla non pas contre les terroristes mais contre l’armée malienne, le politique Hollande de France non plus n’a pas eu la main heureuse dans l’élection d’un président malien. Même s’il appartient lui aussi à l’Internationale socialiste, IBK n’était pas le choix initial du socialiste président français. Hollande et sa flopée de conseillers Afrique ont dû, à la lecture et à l’analyse de la situation sociopolitique malienne, se résoudre à faire contre mauvaise fortune, bon cœur. Les grands acteurs politiques sur lesquels comptait la France hollandaise s’étaient disqualifiés et discrédités pendant la crise politico-institutionnelle née du putsch du 22 mars 2012. A l’exception de celui qui a su jouer positivement ses cartes : IBK.

Cheick TANDINA

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10 COMMENTAIRES

  1. Pourquoi ne faisons nous pas comme la Russie un referendum sur l autonomie de kidal ce sera déjà une façon des maliens de montrer le non massif l emportera assez parlé posons des actes de façon concrète pour la destinée du Mali car elle est en péril sinon et de façon imminente si des actes ne sont pas posés aucune puissance ou nation ne doit décider à notre place

  2. A méditer
    (la France) Allez, Peuples ! emparez-vous de cette terre (l’Afrique). Prenez là. A qui ? A personne. Prenez cette terre à Dieu. Dieu donne la terre aux hommes, Dieu offre l’Afrique à l’Europe. Prenez-la. […] Versez votre trop-plein dans cette Afrique, et du même coup résolvez vos questions sociales, changez vos prolétaires en propriétaires. Allez, faites ! Faites des routes, faites des ports, faites des villes; croissez, cultivez, colonisez, multipliez.

    Victor Hugo

    ps : Il est temps que l’Afrique réponde !!!

  3. L’instabilité au nord du Mali n’est ni le fait du mnla ou de groupes djihadistes mais purement et simplement le fait de la France qui reste un Etat néo colonisateur. Depuis les indépendances la France a toujours déstabilisé les régimes africains qu’elle croit éveillés et opposés à ses intérêts. De Sékou Touré à Modibo Kéita et son tombeur Moussa Traoré en passant par Thomas Sankara et tout récemment Mahamar Kaddafi, ouvrons bien nos yeux et analysons les évènements, on saura bien faire la part des choses.

  4. Belle analyse surtout quand tu dis que la france n’a pas attendu l’appel des autorités de la transition parceque ses interêt étaient ménacés pas seulement au Mali mais dans toutes l’Afrique de l’Ouest celui qui prend le Mali est maître de la Guinéé ;du Sénégal du Niger du Burkina et de la Mauritanie qui est le seul pays techniquement capable de faire face aux jihadistes le reste c’est du pipo Français pour faire croire qu’il le font pour les beaux yeux des maliens.J’ai lu sur Maliweb l’analyse de Aminata Traoré et je trouve que se sont seulement ces deux analyses qui ont retenue mon attention toutes les autres analyses j’ai l’impression que ce sont les SR français qui les ont écrit.
    ALLAH ka mali deme

  5. Nous ne sommes pas naifs, après des analyses nous avons réalisé beaucoup de choses.
    – D’abord pourquoi jusqu’aujourd’hui Blaise Compaoré reste le seul maître du Burkina-faso?
    – Quand les rebelles s’attaquent á Idriss Deby, on attend les toutes dernières minutes pour lui venir en aide. Pourquoi?
    – On viole la charté de l’ONU, on tue Khadaffi. pourquoi?
    – Le président malien appelle à l’aide pour arrêter l’avancée des Islamistes qui était pourtant programmée.
    Malheureusement le centrafricain Bozizé n’a pas eu la même chance que Deby et Dionkounda Traoré, pour que son SOS soit favorablement répondu. On connait la suite.
    Réveillez vous dans ce monde il y a pas d’amis mais des intérêts.

  6. Il faut que la France comprenne certaines choses. D’abord les maliens n’accepteront jamais une quelconque autonomie de la région de Kidal au profit des bandits armés, sur ça il n’y a l’ombre d’aucun doute.
    Les maliens seront même prêts à se battre jusqu’au dernier malien et jusqu’à la dernière goutte du sang s’il le faut.
    Il n’y aura ni indépendance ni autonomie pour la région de Kidal.
    Le fait d’avoir aidé le Mali à se débarrasser des terroristes et djihadistes narco trafiquants,ne lui donne pas tous les droits sur le Mali.Le Mali n’appartient ni à la France ni à la communauté dite internationale.Le Mali appartient aux maliens et c’est aux maliens de décider de l’avenir de leur pays.
    Donner l’autonomie ,ce serait un encouragement à la rebellion et aux futures rebellions.Ce serait également un prime pour la rebellion.
    donner l’autonomie à une région du pays ,ce serait menacer tout le pays dans son existence en tant que nation.
    Aucun responsable politique malien ne prendra le risque d’une telle follie,même dans son pire cauchemar.

  7. Belle analyse de la part du journaliste, vous avez touché du doigt la face cachée du complot contre le Mali. Il faut beaucoup de vigilance du peuple, qu’on ne se laisse pas distraire par les actions malveillantes des ennemis de notre nation. D’abord, ils montent le peuple contre son président et petit à petit déstabilisent définitivement pour avoir ce qu’ils sont venus chercher.

  8. La prochaine guerre du Mali sera bel et bien contre la France et sa velleité d’occuper le Mali par personne interposée (le MNLA).

  9. La France doit cesser de jouer à l’hypocrisie avec l’Afrique car elle va devoir beaucoup à notre Afrique,on est éveillé dans tous les sens pendant la face à face sakossi et holan,Mr holland disait qu’il faut soutenir le Mali c’est ça son soutien au Mali? Vraiment, mon cher holland révisez votre position d’hypocrite. Que dieu bénisse le Mali

  10. Merci de nous avoir présenté les dessous extérieurs de nos problèmes.
    A présent, démasquez les réseaux intérieurs et leurs motivations. leur soif de retour aux affaires à la faveur du remaniement gouvernemental ne nous suffit pas. Présentez -nous les pour que l’on sache qui est qui et qui veut quoi et comment? ,
    Vous avez ce devoir d’information du peuple.
    Mais “ntiè tè fanguelé”. Que ceux qui croient que tout ça là est du bobard, nous présentent ce qui est, selon eux, de notre intérêt .

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