Assises : Faute de preuves

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    Une enquête mal conduite a suffi pour relâcher le groupe de Binafou et ses compères, présumés coupables de vol à main armée.

    L’insécurité et la criminalité ont atteint des seuils inquiétants dans notre capitale ces dernières années. Il est aujourd’hui difficile, voire impossible de passer un jour sans assister ou apprendre un acte de banditisme : vol à main armée, braquage sur les routes, un meurtre, aussi bien au centre-ville que dans les quartiers périphériques. Les rues de Bamako ne sont plus sûres pendant la nuit et les domiciles reçoivent quotidiennement la visite de malfrats de plus en plus audacieux. Ces voyous déploient une inventivité sans limites, tant ils se montrent rapides à exploiter la moindre situation favorable. Les malfrats armés sont le plus redoutables. Ils sont devenus maîtres dans l’art d’agir promptement tout en semant la terreur. Le nombre croissant des attaques à main armée prouve que cette race de malfaiteurs a encore de beaux jours devant elle. Il est indiscutable qu’actuellement dans le District de Bamako les braquages, les vols, les attaques, les cambriolages ne diminuent point malgré l’omniprésence des forces de l’ordre sur le terrain.

    LES CITOYENS DE PLUS EN PLUS RETICENTS. Conscients de la situation, les services de sécurité notamment la gendarmerie et la police ont redoublé de vigilance pour enrayer à la situation. Mais, leurs efforts seront vains sans l’implication des citoyens qui doivent dénoncer les bandits. Cependant, une chose est de dénoncer les malfrats une autre chose est de témoigner au tribunal si vous êtes témoin de scène délits ou actes criminels. Malheureusement, les citoyens sont de plus réticents à témoigner devant le tribunal. En l’absence de preuve ou de témoins, le juge n’a d’autres choix que de relaxer les malfrats. Comme ce fut le cas qui opposait vendredi le ministère public au groupe de Binafou Dembélé alors de la présente session de la cour d’assises.

    Les faits remontent à la nuit du 28 au 29 janvier 2010. Selon arrêt d’accusation, Binafou Dembélé un jeune homme (26 ans) forma un groupe avec Amadou Didimidé alias “ Tout Petit ” (20 ans), Djibril Diarra, Daouda Tangara, Moriba Keita alias “ P ”, Amadou Touré (28 ans), Adama Touré (27 ans) et Daouda Tangara (28 ans) pour se rendre à Faladié à bord d’une voiture de marque Peugeot 406 de couleur grise. Ils auraient garé le véhicule devant une maison avant de pénétrer à l’intérieur de la dite maison. L’un d’entre eux en tee-shirt blanc, aurait pointé une arme sur le gardien et le second a profité pour soustraire une moto. Après avoir commis leur forfait ils réussirent à s’enfuir sans difficulté. La police a été informée par un certain Abdoulaye Touré et son gardien. À la suite de cette dénonciation, une patrouille de police localisa le véhicule, mais les occupants refusèrent d’obtempérer aux injonctions de s’arrêter. Poursuivant sa patrouille, la police identifia l’homme en tee-shirt blanc qui se trouvait dans la voiture. Il était cette fois-ci à pied en compagnie d’une autre personne et les appréhenda. Au lieu d’interpellation, les policiers remarquèrent des traces de pneus qui les conduisirent dans une maison où ils trouvèrent le véhicule dont les occupants avaient refusé d’obtempérer. Binafou Dembélé, Amadou Didimidé “ Alias tout petit ”, Djibril Diarra (32 ans), Moriba Keita alias “ P ”, furent interpellés et inculpés pour association de malfaiteurs, vol qualifié et complicité. On apprendra dans le dossier que le groupe s’était ligué dans le seul but de commettre des vols de motos, que les inculpés déclarent tous se connaître et ont l’habitude d’opérer ensemble, qu’il ne sont pas à leur premier coup ensemble. Aussi ils reconnaissent tous en partie les faits d’association de malfaiteurs.

    Un procès très animé. Les vols qu’ils ont commis ont tous été faits en bande, à main armée et pendant la nuit, La partie civile rapporte dans sa déclaration le témoignage d’un gardien qui indique qu’au cours du vol, l’un des prévenus était armé. Et Djibril Diarra, Daouda Tangara, Adama Touré ont sciemment agi ensemble et de concert dans le groupe conduit par Moriba Keita, notamment en écoulant les produits volés par le groupe. Pour le ministère public, il s’agit de mettre hors d’état de nuire une association de bandits très structurée qui constitue sans doute un danger pour les populations. Il rappellera les méfaits de ces associations de malfaiteurs sur la sécurité dans la ville de Bamako. “ Ces malfaiteurs ne reculent devant rien. Pour parvenir à leurs fins, ils sont capables de tout, même du pire. En effet, certaines communes habituellement tranquilles sont en train de devenir les terreaux fertiles de cette délinquance croissante ”, a rappelé le ministère public.

    Les quatre avocats de la défense, très à l’aise dans le dossier et surtout très convaincants dans leurs argumentaires, démontèrent un à un les différents chefs d’accusation. Ils ont été aidés dans leurs démarches par les lacunes du dossier. Ainsi, pendant deux heures d’horloge, la défense réussit à convaincre les jurés de la non-culpabilité des accusés. “ Voici un dossier mal ficelé par la police, donné à un procureur mauvais metteur en scène. Bref, il n’y a ni partie civile, ni témoins à charge, ni même preuve de la culpabilité de nos accusés. Nous conclurons que nos clients ont été victimes de policiers à la recherche de résultats et de promotion ”, a développé un avocat dans sa plaidoirie. Il faut dire que cette éloquence de la plaidoirie de la défense a payé. Après délibération des jurées, les accusés ont été purement et simplement acquittés pour manque de preuve suffisante. Habitués qu’ils sont à vivre de larcins et de vols, nos malfrats ne mettront sûrement pas du temps à se faire alpaguer par la police. Espérons que cette fois ils ne vont pas bénéficier de circonstances atténuantes et qu’il y aura suffisamment de preuves pour les envoyer croupir en prison.

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