L’Abbé Adrien Sangaré, prêtre du diocèse de Kayes et de la paroisse de Kita, a été inhumé à Kita le 14 février 2023. Compagnon et condisciple, l’officier général de police à la retraite, Magloire Kéita, a décidé de lui porter témoignage. Texte intégral.
Cher Abbé Adrien
N’eût été un empêchement ultime, je serais venu te dire aurevoir de vive voix et témoigner de ce que nous avons partagé et de ce que tu représentes pour moi : nous avons été admis la même année (1959-1960) au Petit Séminaire Pie XII de Bamako. Nous appartenions à une promotion de 33 séminaristes dont 3 ont pu cheminer jusqu’à la prêtrise ; à savoir, 1 de Sikasso (feu l’Abbé Pierre Berthé) et 2 de Kita (l’Abbé Marc Diarra et toi-même). D’autres séminaristes de la même promotion se trouvent aujourd’hui autour de toi, dans cette Eglise, mais aussi certains de nos aînés, dont le plus illustre, l’Archevêque de Bamako, Son Eminence Jean Cardinal Zerbo.
Cher Abbé Adrien, le sport favori au Petit Séminaire Pie XII à l’époque, était de coller un sobriquet à un camarade bon à taquiner.
Dans le même esprit, je suis tenté de décliner le tien une dernière fois. Mais, en définitive, j’en laisserai le soin à l’un des autres initiés qui sont des nôtres dans cette Eglise. De toute façon, moi-même et d’autres ici présents n’y avons pas échappé. On m’appelait “la pie”.
Je m’en tiendrai à mon seul cas, pour ne pas courir le risque de payer la noix de cola.
Cher Abbé Adrien, tu m’as témoigné une amitié sincère, profonde, discrète et vigilante qui a su résister aux assauts du temps et à l’usure. Il me plaît d’évoquer ici les moments que nous partagions, au village, durant les vacances scolaires, parmi les tiens qui m’ont adopté filialement et fraternellement.
Cher Abbé Adrien, tu fus le Pasteur qui aura vécu dans la prière, par la prière et pour la prière. Je suis sûr qu’aujourd’hui encore, face à la mort, tu nous invite à prier et rendre grâce au Seigneur, plutôt qu’à nous laisser submerger par la tristesse et le chagrin, en raison même de la promesse de l’immortalité qui nous est faite à nous chrétiens, à la suite du Christ Sauveur.
Merci d’avoir fait vibrer spirituellement de nombreux fidèles, de longues années durant, particulièrement à travers l’animation de groupes de prière charismatiques. Tu as été pour nombre d’entre nous le “sel de la terre et la lumière du monde”. Puisse ce sel continuer à renforcer la saveur de notre foi et cette lumière, à briller au firmament de nos vies spirituelles.
Cher Abbé Adrien, ta vie évoque chez moi notamment : le courage. Oui tu as su faire preuve de beaucoup de courage, dans le silence, face à la maladie ; un total détachement des choses de ce monde marqué par la propension invasive de la course effrénée au profit, qui disqualifie le recours à nos valeurs sociétales.
Aussi l’honorabilité d’un homme se mesure-t-elle désormais à l’aune de ce qu’il a et non de ce qu’il est. La ténacité dans la recherche du dialogue et de la paix. La patience, la discrétion, la fidélité, l’altruisme. J’en oublie volontiers. Puissent ces qualités continuer de m’inspirer, tout au long de ma vie.
Seigneur, pour la vie de l’Abbé Adrien Sangaré que tu as rappelé à toi, nous te rendons grâce et te disons merci.
A présent, cher ami et frère, je te souhaite une bonne route.
Puisse notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ t’accueillir en la demeure du Père et t’installer à la place qu’il t’a promise.
An Matigui Yesu Christa ka kè i djatigui yé yén bada-bada.
I Sangaré
Magloire Kéita