Il n’est pas aisé de décrire cet homme dont le charme, la gaieté et l’art ne pouvaient laisser personne indifférent. Mais on se jette à l’eau et on tente le raccourci suivant: Ba Issa aura été le frère de Dioncounda, le maître de l’ambiance et l’ami de tout le monde. Le frère de Dioncounda: non par le sang ou le lait, mais par l’amour et par la loyauté, ces valeurs qui finissent par supplanter la relation initiale et transcender le statut social ou l’âge tout en sachant raison et mission garder. Le maître de l’ambiance: pourvu que le rire et la bonne humeur fussent maintenus là où il était, Ba Issa acceptait tous les rôles, du souffre-douleur au conteur captivant m, du virtuose du ngoni à l’impresario avisé, de l’amuseur public au guide éclairé. L’ami de tout le monde enfin: parce qu’il ne savait pas se la jouer, il se mettait à la hauteur de son interlocuteur et aimait ceux que son frère aimait. Que c’est triste de le voir partir ainsi lui qui avait tant à dire, tant à apporter, lui qui aimait tant vivre et qui savait tant vivre! Nous savons nos limites devant le fait divin, mais il nous reste encore un peu de souffle pour dire: Janjo Ba Issa, merci pour tout et pardon pour l’offense inhérente à la cohabitation.
Adam Thiam