In memoriam : Dialou Damba : Qui chantera maintenant Wagadou ?

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Pourquoi  des yeux se ferment-ils non pas aux premières heures  de l’année qui frappe à nos portes mais aux ultimes secondes de l’année qui finit ?

Le mystère restera entier car le logiciel est divin   alors que nos limites, elles, sont humaines.  Alors, pour  tenir dans un espace qui peut être notre possession juridique,  et dans un temps hors de notre contrôle, acceptons  notre  impuissance. Permanente et générale :  tête bien faite séduisant les amphis, idiot du village moqué par les passants,  mère aimante couvant ses enfants, petit peuple besogneux poursuivant la pitance journalière, princes amidonnés à mille lieux de l’angoisse des pauvres.  Humilité donc et toujours humilité en sachant qu’à 56 ans, seulement 56 ans, Dialou Damba ne chantera plus ? Oui. Quel autre choix ? En plus, la sœur a tout donné. Guéséré, elle tenait de famille cet art particulier de l’exhortation, de l’exaltation. Et cet art, elle l’a délivré, entièrement, totalement, avec la passion qui la caractérisait, avec ce sourire impossible à oublier. Comme si elle était née possédée  par l’obsession de dire le Wagadu, reconstituer l’odyssée de ces gens du voyage, de Findi (Inde) à  Yamanou ou Yemen en passant par Faressi ou  Farsi donc Perse.

Après  les héroïnes de nos adolesences, Baye Tounkara, Koli Koné, Tita Koné, Wandé Kouyaté, nous avions, adultes,  la passion d’écouter Dialou Damba,  sans hélas comprendre un mot de soninké. Mais il lui suffisait de puiser dans le mélodieux répertoire du Sahel Occidental, ce creuset de civilisations et de générosités construites autour de la kola, de la femme et du cheval, comme dirait Senghor. Cette passion d’être avec elle, nous la conserverons certes grâce à la science. Oui, Domba, Miniyamba, Kanjo, Si nu ngiri, Falike, Taara et autres merveilles lui survivent.  C’est une grande consolation. Mais notre sœur est partie. Nous en sommes tristes. Peut-être même pas pour longtemps, car nous sommes tous les passagers forcés du train de la vie. Et si pas quand, nous ne savons comment cela finira. Sois en paix, Dialou. Et accepte notre pensée émue pour un frère authentique, un homme de cœur et de sourire : Karfala Kouyaté, lui aussi arraché à notre affection en même temps que toi.

Adam Thiam / maliweb.net

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8 COMMENTAIRES

  1. Je réagis à cet article malgré moi même, car le forum était trop outrageant et moins vertueux dans un passé récent. Toutefois, face à un tel talent d’orateur du Journaliste Thiam je ne peux que saluer la prouesse rédactionnelle de cet hommage et prier pour le repos éternel de l’âme de cette brave dame de Mourdia. Jamais, je n’oublierai cette voie qui a marquée mon enfance dans cette bande cassette audio sur Amari DAOU ou sur les Soninké….. Que la terre lui soit légère.

    • Que son âme repose en paix elle avait une très belle voix et un sourire impécable on ne peut rien contre la volonté dieu amen

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