30 mars 2015- 30 mars 2019. Ce samedi marque le 4ème anniversaire du décès de notre estimé aîné, Baba Dagamaïssa. A cette occasion, nous republions le bel hommage à lui rendu par notre non moins estimé confrère, Alfousseiny SIDIBE.
Hommage à Baba Dagamaïssa : LA VOIX S’EST ETEINTE, L’ESPRIT DEMEURE
La disparition de Baba Dagamaïssa, qui est parti comme il savait rendre visite à ses amis, à… l’improviste. Notre dernier entretien avec lui remontait au 21 mars dernier. Nous nous étions rencontrés à son domicile de Baco Djicoroni. Nous venions nous rassurer sur son état de santé. Notre aîné donnait ce jour là l’impression de se porter beaucoup mieux.
Lors de notre conversation et dans la manière caustique dont il commentait l’actualité nationale, il prouvait qu’il n’avait rien perdu de son humour, ni de son ironie. Ce 21 mars encore, Dag se préoccupait de la situation politique générale du pays. Pour sa part, faisait-il remarquer avec un sourire en coin, il s’occupait de ses animaux, principalement de son cheval. Et son sport favori, précisait-il, était le matin la revue de la presse ; et le soir, les promenades au bord du Djoliba pour changer d’air.
La maladie l’avait un peu affaibli, c’est vrai. Mais ce qui amenait une profonde amertume chez Dag, c’était d’être obligé de rester à la maison, « sans même savoir où aller et chez qui aller » comme lui-même le disait. Depuis qu’il avait quitté la direction de l’ORTM, il était resté cloîtré chez lui, attendant que l’on lui fasse appel. Entretemps, il avait essayé de frapper à certaines portes, sans succès. Malheureusement et comme nombre de cadres relevés, Dag était devenu une sorte de pestiféré. Pourtant, cela n’aurait jamais dû arriver à quelqu’un de sa compétence. Et surtout pas en ces temps-ci.
Journaliste émérite, notre aîné avait fait Radio Mali avec les Djibril M’Bodj, Tiona Mathieu Koné, Thierno Ahmed Thiam, Fatim Sidibé, Daouda N’Diaye, Papus Daff ou encore Baba Sangaré. Avec eux, il avait constitué une belle génération de jeunes loups qui a fasciné des dizaines de cadets et incité ceux-ci à embrasser le métier de journaliste. Car il y avait un plaisir inégalé à écouter ces voix d’or.
Mais, au-delà du timbre inimitable qui était le sien, Dag était un journaliste rompu à la tâche, et surtout courageux. On se rappelle encore ces débats télévisés avec les ministres de la République dans les années 1980. Cela se passait à une période où la liberté d’expression était un risque que peu prenaient, surtout dans les médias d’Etat. Il fallait être Dag pour oser une certaine impertinence ! Ce qui lui a valu d’ailleurs l’estime et l’amitié du président Moussa Traoré, à en croire les confidences qu’il nous avait faites un jour.
C’est surtout au Cabinet du ministre de la Communication où nous avons eu à côtoyer l’homme, qui venait d’y être nommé chargé de mission, après avoir été relevé de son poste de PDG du CESPA. C’est du Cabinet du département de la Communication que sous la Transition Dag a été nommé directeur général de l’ORTM. Une nomination saluée par les professionnels des médias. Surtout pendant une période exceptionnelle où le pays a failli naufrager sous le double effet du coup d’Etat militaire du 22 mars et de l’occupation des deux tiers du pays par les djihadistes.
Pendant le temps relativement court qu’il a passé à la tête de l’ORTM, Dag ne s’est pas départi de son professionnalisme. L’on se rappelle encore qu’il s’était chargé de la présentation du JT du 22 septembre 2012. L’événement a donné lieu à une édition presque spéciale. Des milliers de téléspectateurs ont été heureux de retrouver sur le petit écran, celui-là même qui avait présenté presque trente ans plus tôt, un 22 septembre 1983, le premier journal télévisé de ce qui était à l’époque la nouvellement née Radiodiffusion télévision du Mali.
Rendre hommage à Dag, c’est avant tout saluer son franc-parler. C’est rappeler que l’homme n’avait jamais eu sa langue dans la poche. Dag disait haut ce que tout le monde hésitait même à murmurer tout bas. Il avait le courage de ses opinions. Nous avons encore en mémoire ses sorties remarquées lors des réunions hebdomadaires de cabinet. Quand il ne parlait pas, le ministre le provoquait.
Ce que nous avons pu aussi apprécier chez Dag, et qui est rare chez nombre d’hommes maliens, c’est son amour et son profond respect pour son épouse Fifi. Il nous confiait un jour : «Heureusement que ta chérie s’occupe bien de ton grand frère, sinon je risquais de craquer ». Ses deux garçons étaient pour lui ses copains.
Pour épuiser ce que nous aurions pu dire sur Dag, cet article serait insuffisant. Nous nous limiterons donc à rendre hommage à un grand frère qui nous a chéris et pour qui nous avons eu une estime des plus affectueuses et des plus chaleureuses. Dors en paix, Dag ! Qu’Allah le Tout Puissant et le Très Miséricordieux t’accueille dans son éternel Paradis ! Amen !
Alfousseiny SIDIBE