Echostar / Lobi Traoré, le précurseur du « bamanan blues » n’est plus

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Guitariste exceptionnel et très ancré dans la culture bambara, Lobi Traoré a été de la catégorie des artistes maliens qui pouvaient se targuer d’être les vrais ambassadeurs de notre pays à travers le monde. Parti de son Ségou natal, cet artiste a fait la fierté du Mali avec un rythme et des sonorités dont il était le seul à en avoir le secret. Lobi Traoré, virtuose de la guitare, n’est plus. Il s’en est allé le 1er juin 2010 et a été enterré le 2 juin 2010, à Kalaban Coura. En cette période de tristesse, nous devons nous souvenir du parcours de cet émérite artiste.

De son vrai nom Bourama Traoré, alias Lobi Traoré est né en 1961 à Bakaridianna, sur la rive gauche du fleuve Niger, à une vingtaine de kilomètres de Ségou. Selon plusieurs témoignages, le talent dont a fait preuve Lobi Traoré n’était pas un fait du hasard. Bourama Traoré est né et a grandi dans un environnement qui a sûrement guidé ses premiers pas. Comment ne pas devenir artiste musicien quand on naît dans une famille où les parents étaient déjà chanteurs de la société secrète du « Komo » ? Samba Traoré et Nana Djiré, père et mère de Lobi Traoré, ont pendant longtemps, dans cette contrée du Mali située à quelques kilomètres de Ségou, fait le bonheur des adeptes du « Komo ». Et, c’est à côté de ces parents, artistes traditionnels que Lobi Traoré a fait ses premiers pas. Cet environnement ne tardera pas à produire son effet sur l’artiste.

A 16 ans, il n’avait plus grand-chose à prouver dans son village en terme de musique. Et la logique a voulu qu’il débarque à Ségou avec armes et bagages pour frotter son talent à d’autres grands artistes de l’époque. Il intègre un orchestre folklorique en tant que chanteur du répertoire bambara. Bien qu’il fût au niveau d’un orchestre folklorique, Bourama Traoré, alias Lobi Traoré, ne va pas s’attarder au niveau de Ségou qui ne lui offrait pas beaucoup d’opportunité pour montrer de quoi il était capable. A cette époque au Mali, la seule ville qui pouvait lui permettre de s’exprimer afin de se hisser sur un piédestal à la hauteur de son talent naissant était Bamako.

Dès que cette idée a effleuré l’esprit du jeune homme, la décision fût prise de rallier Bamako. Contrairement à ses attentes, dans la ville des trois caïmans, l’artiste allait vite se raviser et intégrer un autre orchestre folklorique. Il a eut raison, car quelques temps après, il allait rencontrer son premier maître musical qui va lui offrir sa première guitare. Et, c’est après avoir passé trois ans dans cet orchestre folklorique, qu’il découvre l’orchestre  « Djata Band » de Zani Diabaté qui n’allait pas tarder à se tailler la réputation qu’on lui connaît. Signalons de passage que le « Djata Band » fait partie des premiers orchestres maliens qui ont eu l’opportunité de tourner en France dès le début des années 1980. Maîtrisant parfaitement le répertoire bambara, il ne tardera pas à devenir la coqueluche des mélomanes.

Après une virée à Abidjan par le biais d’un orchestre folklorique, Lobi Traoré reviendra au Mali pour entamer une carrière solo. Il joue dans les bars et les mariages. Au début des années 1990, suffisamment formé par la multitude des expériences accumulées ça et là, Lobi Traoré deviendra un véritable phénomène de mode. Son mélange d’instruments traditionnels comme la Kora, le djembé, la calebasse, le ngoni et la guitare électrique ne pouvait laisser les mélomanes de la capitale indifférents. Le bar Bozo de Bamako, choisi comme temple pour distiller son « blues bambara » ne désemplissait plus. Tous les mélomanes de l’époque s’y donnaient rendez-vous pour voir le « ton jon » de Ségou jouer.

Et comme tous ne pouvaient pas accéder à ce lieu, l’artiste devait passer à une autre étape de sa carrière : la production d’une série de disques. Son premier disque « Bambara Blues » est sorti en 1991. Le second intitulé « Bamako » a été mis sur le marché en 1994. « Segou », le troisième album est sorti en 1996. « Duga » le quatrième en 1999. Il a fallu attendre 2004 pour voir l’enfant prodige du « Bambara Blues » arriver avec « Mali Blues » son cinquième album. « The Lobi Traoré group » et « Yougouba », sortis respectivement en 2006 et 2007, confirment désormais la carrière internationale de l’artiste parti d’un village à la lisière de Ségou pour conquérir le monde.

Il faut dire que sa rencontre avec Vincent Bucher, l’harmoniciste de blues parisien, fut une expérience exceptionnelle dans la vie du Malien. Mais l’homme propose Dieu dispose. C’est le moment où l’artiste s’apprêtait à nous prouver qu’il n’avait pas encore atteint les limites de son talent, que Dieu a choisi de le rappeler à lui. Lobi Traoré repose en paix et que la terre de tes ancêtres te soit légère !

Assane Koné


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