Malgré sa santé déclinante ces dernières semaines – son pronostic vital était engagé – et la demande pressante de son évacuation à l’étranger exprimée par son épouse, rien n’y fit.
Le 21 mars, Soumeylou Boubèye Maïga, ancien Premier ministre, affaibli depuis plusieurs mois par la maladie, meurt dans une clinique privée de Bamako à l’âge de 67 ans. Sa mort suscite une certaine émotion au Mali. Malgré sa santé déclinante ces dernières semaines – son pronostic vital était engagé – et la demande pressante de son évacuation à l’étranger exprimée par son épouse dans une lettre ouverte au président de la transition, Assimi Goïta, rien n’y fit.
Sa dernière apparition publique remonte à août 2021 où il indique l’abandon des poursuites engagées à son encontre, suivi peu après de son incarcération à la maison centrale d’arrêt de Bamako.
Des réactions plus nuancées voire critiques se font entendre. Soumeylou Boubèye Maïga aura montré le mauvais côté de la politique, c’est-à-dire celui qui a pris de mauvais chemins, en référence à son inculpation notamment pour « faux, usage de faux et favoritisme » dans le cadre d’une enquête sur l’achat d’équipements militaires et sur l’acquisition d’un avion présidentiel, en 2014, alors qu’il était ministre de la défense. Une affaire qui a valu en 2014 au Mali des sanctions des institutions financières, notamment le gel pendant six mois des décaissements du Fonds monétaire international (FMI)
L’achat de cet avion avait été épinglé par le Bureau vérificateur général (BVG), autorité malienne indépendante, qui avait dénoncé des pratiques de surfacturation, de détournement de fonds publics, de fraude, de trafic d’influence et de favoritisme.
Bardé de diplômes
Soumeylou Boubèye Maïga né le 8 juin 1954 à Gao a fait des études de journalisme au Centre d’études des sciences et techniques de l’information (CESTI) de l’Université Cheikh Anta Diop à Dakar au Sénégal, ainsi qu’en France où il obtient un diplôme d’études supérieures spécialisées (DESS) de diplomatie et administration des organisations internationales en 1987 à l’université de Paris-Sud et un diplôme de relations économiques internationales à l’Institut d’administration de Paris. Il exerce le métier de journaliste d’abord à L’Essor, quotidien d’État, puis au journal Sunjata.
Militant au sein du Parti malien du travail, il a été l’un des principaux artisans de la chute du régime de Moussa Traoré en 1991. Il entre au cabinet d’Amadou Toumani Touré, alors président du Comité de transition pour le salut du peuple (CTSP), en qualité de conseiller spécial d’avril 1991 à juin 1992. Vice-président et membre fondateur de l’Alliance pour la démocratie au Mali-Parti africain pour la solidarité et la justice (ADEMA/PASJ), il devient en 1992 chef de cabinet du président de la République Alpha Oumar Konaré.
En janvier 1993, il occupe le fauteuil de directeur général du service de renseignements, avant de siéger au gouvernement de Mandé Sidibé en qualité de ministre des Forces armées et des Anciens Combattants.
En 2002, il échoue à la porte de la candidature Adéma à la présidentielle qui lui préfère Soumaïla Cissé.
Grande figure politique
En 2006, son parti décide de soutenir la candidature probable du président sortant Amadou Toumani Touré à l’élection présidentielle malienne de 2007. Soumeylou Boubèye Maïga s’y oppose et annonce son souhait de se présenter ; il fonde à cet effet l’association « Convergence 2007 ». À la suite de cela, il se fait exclure de l’ADEMA. Lors de la conférence nationale des 24 et 25 février 2007 de l’Alliance pour la démocratie au Mali (ADEMA), les délégués votent l’exclusion de Soumeylou Boubèye Maïga et de plusieurs de ses sympathisants : Issa Diarra, Ibrahima Kantao, Binta Yattassaye et Oumar Ag El Méhidi. Au premier tour de l’élection présidentielle, le 29 avril 2007, il arrive en 6e position. Le président sortant Amadou Toumani Touré est réélu.
Avec les autres candidats de l’opposition regroupés au sein du Front pour la démocratie et la république (FDR) – Ibrahim Boubacar Keïta, Mamadou Bakary Sangaré et Tiébilé Dramé – il conteste les résultats d’un scrutin qu’il estime entaché de fraudes et dépose un recours devant la Cour constitutionnelle ; ce recours est rejeté le 12 mai 2007.
Le 6 avril 2011, Soumeylou Boubèye Maïga est nommé ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale dans le gouvernement de Cissé Mariam Kaïdama Sidibé.
Lors du coup d’Etat du 22 mars 2012 d’Amadou Sanogo, Soumeylou Boubèye Maïga est fait prisonnier. Il entame une grève de la faim avec plusieurs hauts officiels. Le 8 septembre 2013, il est nommé ministre de la Défense et des Anciens combattants dans le gouvernement d’Oumar Tatam Ly. Dès le premier tour de la présidentielle, il avait soutenu le futur président Ibrahim Boubacar Keïta, malgré des inimités passées.
Il démissionne de ce poste le 27 mai 2014 en réaction à la défaite de l’armée malienne à Kidal, face à des groupes rebelles. Soumeylou Boubèye Maïga est nommé Premier ministre du Mali le 30 décembre 2017 par le président Ibrahim Boubacar Keïta. Il est alors le cinquième Premier ministre nommé par Keïta depuis son élection en 2013. Il est reconduit à ce poste lors de la réélection – après des élections présidentielles qui évitent au pays un vide constitutionnel d’Ibrahim Boubacar Keïta en août 2018.
Sous le coup d’une motion de censure, il démissionne avec son gouvernement le 18 avril 2019 Le Premier ministre était très critiqué depuis le massacre de 160 Peuls à Ogossagou, le 23 mars 2019. Dans un contexte d’insécurité et de malaise social, une très grande manifestation, le 5 avril 2019, avait demandé un changement de gouvernance. Le 26 août 2021, Soumeylou Boubèye Maïga est inculpé puis arrêté par la chambre d’accusation de la Cour suprême du Mali, dans l’affaire de l’achat d’un avion présidentiel.
Fanfan