Situation humanitaire au Mali : • Le nombre de déplacés en hausse • Plus de 1000 écoles toujours fermées

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Dans son  dernier rapport trimestriel sur la situation humanitaire au Mali ; rendu public le 28 décembre 2020, le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres,  dresse un bilan quelque peu sombre.

Situation des droits de l’Homme ; mise en œuvre de l’Accord ; la situation sur le plan régional sont, entre autres des points saillants du dernier rapport trimestriel du Secrétaire général de l’ONU sur la situation humanitaire au Mali. Le document de 21 pages traite des principaux faits survenus dans le pays depuis le précédent rapport, le 29 septembre 2020.

Sur le plan  humanitaire

Il ressort de ce rapport que la situation humanitaire reste très préoccupante. La pandémie de maladie à coronavirus (Covid-19), la violence à l’intérieur des communautés et entre elles, ainsi que les effets des changements climatiques ont encore accru les besoins humanitaires. Selon Antonio Guterres, le nombre de personnes déplacées au Mali a augmenté, passant de 287 496 en juillet 2020 à 311 193 en octobre, et quelque 143 301 réfugiés maliens étaient toujours présents dans les pays voisins. La sécurité alimentaire s’est aussi fortement dégradée au cours de la période considérée, durant laquelle les partenaires humanitaires se sont mobilisés pour venir en aide à trois millions de personnes. En octobre, les intervenants humanitaires en ont aidé 2,35 millions, soit 78 % du total.

Toutefois, sans financements supplémentaires, cette aide ne peut être maintenue.

Au vu de la pandémie de Covid-19, note le Secrétaire général de l’ONU, les partenaires humanitaires ont revu à la hausse le nombre d’enfants âgés de 6 à 59 mois dont on estime qu’ils pourraient souffrir de malnutrition aiguë sévère. Ce chiffre, qui était de 166 000 plus tôt dans l’année, est maintenant de 188 000.

Si la plupart des écoles du pays ont rouvert à la rentrée scolaire, le 14 septembre, 1 261 écoles sont néanmoins restées fermées en raison de l’insécurité, principalement dans le centre et le nord. Les intervenants humanitaires ont continué d’aider le Gouvernement à établir des protocoles de lutte contre la Covid-19 dans les écoles et à les équiper en matériel de prévention et de contrôle. Les partenaires humanitaires sont venus en aide à 274 489 personnes de cette façon.

Selon les données officielles, les inondations saisonnières ont touché 80 760 personnes, en ont tué 18 et en ont blessé 25, endommageant 6 478 maisons, détruisant 7 030 tonnes de nourriture et emportant 274 hectares de cultures. Malgré l’aide déjà fournie par les autorités maliennes et les partenaires humanitaires, de graves lacunes subsistent. Les stocks d’urgence qui avaient été placés à l’avance dans les régions en cas d’inondations ont été utilisés pour faire face à la pandémie de Covid-19, ce qui a réduit les capacités d’intervention.

Au 1er décembre, sur les 474 millions de dollars demandés dans le cadre du plan de réponse humanitaire révisé, un montant de 214,1 millions (soit 45,1 %) avait été financé.

Mise en œuvre de l’Accord pour la paix

La mise en place des institutions de transition a contribué à détourner encore davantage les parties prenantes maliennes de la mise en œuvre de l’Accord, mais la transition a néanmoins fait apparaître de nouvelles possibilités de faire avancer l’application dudit Accord.

En octobre, pour la première fois, des représentants des groupes signataires ont rejoint le Gouvernement de transition, avec la nomination de quatre ministres, à savoir Harouna Toureh et Alhamdou Ag Ilyene, de la Plateforme des mouvements du 14 juin 2014, une coalition de groupes armés, et Mossa Ag Attaher et Mohamed Ould Mahmoud, de la Coordination des mouvements de l’Azawad. En outre, pour la première fois également, neuf femmes ont intégré le Comité de suivi de l’Accord en tant que représentantes des parties signataires.

Après une interruption de cinq mois, le Comité de suivi de l’Accord a repris ses réunions ; sa quarante et unième session s’est tenue le 16 novembre. La délégation malienne, composée de neuf ministres, était dirigée par le M. Ouane. Le Commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine, les envoyés spéciaux de l’Union européenne pour le Sahel et des représentants du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord étaient présents, et le Ministre algérien des affaires étrangères a participé par visioconférence. Le Premier Ministre a réaffirmé la volonté des autorités de transition de mettre en œuvre l’Accord. Toutes les parties signataires ont convenu de revitaliser le cadre de concertation intermalien. Comme suite à la recommandation du Comité de suivi de l’Accord, les parties signataires ont organisé un atelier de quatre jours, du 24 au 27 novembre, visant à établir un plan révisé des mesures prioritaires à mettre en œuvre pendant la transition.

Redéploiement des forces de défense et de sécurité

Au cours de la période considérée, les parties signataires sont convenues de lancer la deuxième étape du processus accéléré de désarmement, de démobilisation et de réintégration d’ici la fin de l’année. À l’issue de cette étape, 1 687 combattants auront été intégrés dans les forces de défense et de sécurité en vue d’atteindre le plafond autorisé, fixé à 3 000 combattants. Au 24 novembre, 1 313 combattants avaient été intégrés et 451 avaient été enregistrés dans le cadre de la phase de « rattrapage », et tous attendaient d’être transférés du nord au sud du Mali pour recevoir une formation préalable à leur intégration et à leur redéploiement. Des délibérations sont en cours entre des parties signataires pour résoudre la question des quotas d’intégration, qui retarde les processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration. Le programme socioéconomique relatif aux combattants non intégrés devrait démarrer au cours du premier trimestre de 2021 avec l’appui de la Minusma et de la Banque mondiale.

Par ailleurs, le rapport a noté, sur le plan des réformes politiques et institutionnelles qu’après des mois d’inaction, la mise en place, début décembre, du Conseil national de transition, le parlement de transition, devrait permettre de progresser dans la mise en œuvre des réformes constitutionnelles et institutionnelles ainsi que dans l’organisation des élections législatives dans les régions de Ménaka et de Taoudenni, dans le nord du Mali.

Situation des droits humains

Il ressort du rapport de M. Guterres que la Minusma a relevé de graves violations de ces droits et atteintes à ces droits commises dans le cadre d’opérations militaires, des activités des groupes armés et des accords d’échange de prisonniers, qui sapent les efforts de lutte contre l’impunité.

La Mission onusienne a recensé 483 violations des droits humains (88) et atteintes à ces droits (395), soit 237 de moins que pendant la période précédente. Il s’agissait d’exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires (29 victimes), d’autres meurtres (96), de violations du droit à l’intégrité physique ou d’atteintes à ce droit (123), de disparitions forcées (2), d’enlèvements (111), d’actes de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants (15), de détentions illégales, y compris de détentions prolongées et de violations des garanties d’une procédure régulière (107), ainsi que de nombreux cas de destruction de biens et de pillage, d’attaques contre le personnel humanitaire et d’atteintes à la liberté de conscience par des groupes extrémistes violents.

Les auteurs présumés étaient les forces nationales (29), les autorités judiciaires (50), les groupes armés qui ont signé l’accord ou coopérant à son application (74), les groupes armés et milices communautaires (157) et les groupes extrémistes violents (173). Comme lors des périodes précédentes, la plupart des violations et atteintes ont été recensées dans le centre du Mali : 202 dans la région de Mopti et 71 dans la région de Ségou. D’autres ont également été constatées dans les régions suivantes : Gao (36), Kayes (6), Kidal (57), Koulikoro (1), Ménaka (26), Sikasso (5), Taoudenni (3) et Tombouctou (26), ainsi qu’à Bamako (50).

On rapporte, selon le Secrétaire général de l’ONU, que des membres des forces armées maliennes auraient été impliqués dans de graves violations des droits humains : au moins 24 membres de la communauté peule auraient été sommairement exécutés et 3 autres auraient été blessés à Libé, dans la région de Mopti, le 22 octobre. Ce jour-là, soutenus par des chasseurs traditionnels de la communauté dogon (dozos), ces membres des forces nationales auraient en outre brûlé des habitations et des greniers, pillé du bétail et détruit un réservoir d’eau.

Les civils restent, dit-il, les principales victimes de l’extrémisme violent. La plupart des attaques sont survenues dans le centre, mais d’autres ont été enregistrées dans différentes régions du pays. Le 13 octobre, 13 civils ont été tués par des combattants du GSIM le long de l’axe Parou-Songobia dans la région de Mopti.

Dans le centre du Mali, la dynamique changeante et la hausse de la violence intercommunautaire ont continué de compromettre l’exercice des droits humains et des libertés dans les zones touchées, comme l’illustre la situation à Farabougou, dans le cercle de Niono (région de Ségou).

« La Minusma a recensé 225 violations graves commises contre 155 enfants, un chiffre en légère baisse par rapport aux 230 violations commises contre le même nombre d’enfants au cours de la période précédente. Si les auteurs de nombreuses violations (99) n’ont pas été identifiés, 41 violations ont été attribuées à la Coordination des mouvements de l’Azawad, 28 à la Plateforme, 19 à la Katiba du Macina, 17 à Dan Nan Ambassagou, 9 aux dozos, 6 à des groupes armés peuls, 5 aux armées maliennes et 1 à l’EIGS. Au total, 102 enfants (79 garçons et 23 filles) âgés de 12 à 17 ans ont été recrutés dans les régions de Ménaka (45), Mopti (31), Kidal (23) et Tombouctou (3), notamment par la Coordination des mouvements de l’Azawad (41), la Plateforme (28), la Katiba du Macina (18), Dan Nan Ambassagou (11), les forces armées maliennes (2) et les dozos (2) », détaille le rapport.

La Minusma a recensé 10 cas de violence sexuelle liée aux conflits (contre 5 au cours de la période précédente), qui comprennent des cas de viol et de viol collectif perpétrés par des membres de groupes armés communautaires et des individus armés non identifiés contre neuf femmes et une fille dans les régions de Gao, de Ménaka et de Mopti. Pour enrayer ce phénomène, la Minusma et l’équipe de pays des Nations Unies ont mobilisé des soutiens à l’échelle du système, notamment un appui à un centre de services intégrés dans la région de Mopti où les rescapé(e)s de violences sexuelles et fondées sur le genre reçoivent des soins complets.

La Minusma a continué d’offrir un soutien logistique et technique et un soutien en matière de renforcement des capacités à la Commission vérité, justice et réconciliation, qui à ce jour a enregistré 18 722 dépositions, dont celles de 7 482 femmes et de 790 enfants. La Commission a tenu sa deuxième audience publique à Bamako le 5 décembre.

« Au sein de la Minusma, la Division des droits de l’homme et de la protection continue de surveiller la situation, sur le plan des droits humains, de l’ancien Président, Ibrahim Boubacar Keïta, et des autres membres du gouvernement évincés par l’armée le 18 août, qui ont été libérés après avoir été détenus arbitrairement », souligne le patron de l’ONU.

Le document prend aussi en compte l’évolution de la situation politique dans le pays ; le rétablissement de l’autorité de l’Etat dans le Centre ; les progrès dans la mise en œuvre des mesures prioritaire ; l’évolution de la situation régionale ; la situation régionale, etc.

Synthèse par Bakary SOGODOGO

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