Dans son dernier rapport trimestriel de 2020, sur le plan sécuritaire, le Secrétaire général des Nations Unies ne donne pas une bonne note au Mali. Aussi bien que sur le volet de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix que sur la gestion de la crise au centre, le tableau n’est pas reluisant.
La mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, le sujet qui tient le plus à cœur la communauté internationale, demeure caractérisée par une lenteur qui s’explique difficilement.
A l’instar d’autres rapports, le récent document indique que la mise en place des institutions de transition a contribué à détourner encore davantage les parties prenantes maliennes de la mise en œuvre de l’Accord. Toutefois, souligne le document, la transition a néanmoins fait apparaître de nouvelles possibilités de faire avancer l’application dudit accord.
En octobre, pour la première fois, des représentants des groupes signataires ont rejoint le Gouvernement de transition, avec la nomination de quatre ministres, à savoir Harouna Toureh et Alhamdou Ag Ilyene, de la Plateforme des mouvements du 14 juin 2014, une coalition de groupes armés, et Mossa Ag Attaher et Mohamed Ould Mahmoud de la Coordination des mouvements de l’Azawad. En outre, pour la première fois également, neuf femmes ont intégré le Comité de suivi de l’Accord en tant que représentantes des parties signataires, soutient le document. Après une interruption de cinq mois, poursuivra-t-il, le Comité de suivi de l’Accord a repris ses réunions; sa quarante et unième session s’est tenue le 16 novembre. La délégation malienne, composée de neuf ministres, était dirigée par le M. Ouane. Le Commissaire la paix et à la sécurité de l’Union africaine, les envoyés spéciaux de l’Union européenne pour le Sahel et des représentants du Royaume-Uni étaient présents, et le ministre algérien des Affaires étrangères a participé par visioconférence. Le Premier ministre a réaffirmé la volonté des autorités de transition de mettre en œuvre l’Accord. Toutes les parties signataires ont convenu de revitaliser le cadre de concertation intermalien. Comme suite à la recommandation du Comité de suivi de l’Accord, les parties signataires ont organisé un atelier de quatre jours, du 24 au 27 novembre, visant à établir un plan révisé des mesures prioritaires à mettre en œuvre pendant la transition. Redéploiement des forces de défense et de sécurité maliennes reconstituées, réformées et inclusives.
« Au cours de la période considérée, les parties signataires sont convenues de lancer la deuxième étape du processus accéléré de désarmement, de démobilisation et de réintégration d’ici la fin de l’année. À l’issue de cette étape, 1687 combattants auront été intégrés dans les forces de défense et de sécurité en vue d’atteindre le plafond autorisé, fixé à 3 000 combattants. Au 24 novembre, 1313 combattants avaient été intégrés et 451 avaient été enregistrés dans le cadre de la phase de «rattrapage», et tous attendaient d’être transférés du nord au sud du Mali pour recevoir une formation préalable à leur intégration et à leur redéploiement. Des délibérations sont en cours entre des parties signataires pour résoudre la question des quotas d’intégration, qui retarde les processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration. Le programme socioéconomique relatif aux combattants non intégrés devrait démarrer au cours du premier trimestre de 2021 avec l’appui de la Minusma et de la Banque mondiale», précise le rapport trimestriel du Conseil de sécurité des Nations Unies.
Partant, souligne Guterres, le Représentant spécial a continué d’user de ses bons offices pour faire avancer les questions liées au redéploiement des forces de défense et de sécurité maliennes reconstituées et réformées. Du 18 au 19 novembre, il s’est rendu à Kidal où il a tenu une série de réunions à ce sujet avec les dirigeants de la Coordination des mouvements de l’Azawad, le Gouverneur de Kidal et des représentants de la société civile. Réformes constitutionnelles et institutionnelles 26. Après des mois d’inaction, la mise en place, début décembre, du Conseil national de transition, le parlement de transition, devrait permettre de progresser dans la mise en œuvre des réformes constitutionnelles et institutionnelles ainsi que dans l’organisation des élections législatives dans les régions de Ménaka et de Taoudenni, dans le nord du Mali.
Au cours de la période considérée, les consultations entre les parties signataires sur la pleine opérationnalisation de la Zone de développement des régions du nord ont repris, avec l’appui de l’équipe de médiation internationale. Lors des débats sur la création du secrétariat du conseil consultatif interrégional, ont notamment été abordées les questions relatives au rôle des autorités locales, régionales et de district ainsi que du conseil consultatif interrégional dans la gestion transparente des revenus des impôts locaux, des fonds transférés par l’État et des ressources financières provenant du Fonds pour le développement durable et des donateurs. Cependant, les rivalités internes entre les représentants des cinq régions du nord ont entravé l’achèvement de ce processus. En outre, la sélection des projets devant être financés par le Fonds pour le développement durable a continué de prendre du retard.
Stabilisation et rétablissement de l’autorité de l’État dans le centre du pays
Selon le récent rapport, la situation dans le centre du Mali reste très préoccupante. Une série de violences graves a été enregistrée dans la région de Ségou où, depuis début octobre, le village de Farabougou et des villages voisins de la commune de Dogofri, dans le cercle de Niono, ont été la cible d’attaques et de blocus de la part de ce que l’on présume être des combattants extrémistes. Pire, soutien le document, le siège et le blocus des villages ont causé la mort d’au moins six civils et fait des dizaines de blessés, et se sont traduits par l’enlèvement d’au moins 20 civils, le déplacement de plus de 2000 familles des villages des communes de Dogofri, de Mariko, de Siribala et de Sokolo et des vols de bétail. On estime que près de 4000 personnes sont actuellement bloquées dans le village de Farabougou, privées d’accès aux biens de première nécessité et aux soins de santé et constamment menacées de violences. Plusieurs initiatives de médiation et d’aide humanitaire ont été mises en place autour de Farabougou, avec des objectifs distincts, notamment l’accès humanitaire, l’atténuation et la désescalade des conflits et la réconciliation. La force de la Minusma a effectué 25 sorties d’hélicoptères militaires dans les zones touchées afin de transporter 64 soldats des Forces armées maliennes et de livrer plus de 30 tonnes de vivres et autres fournitures.
Dans la région de Mopti, les milices d’autodéfense et les groupes extrémistes ont continué d’exploiter les conflits intercommunautaires, alimentant la violence contre les civils et entraînant des atteintes à la sécurité, principalement dans les cercles de Bandiagara, Bankass, Douentza et Koro.
Plus inquiétant, de nouvelles dynamiques et rivalités inquiétantes ont été constatées au sein des groupes armés communautaires. Ainsi, Dan Nan Ambassagou, un groupe armé affilié aux Dogons, a fait face à une opposition croissante de la part de villages dogons dissidents. Les groupes terroristes, en particulier le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Gsim) et l’État islamique du Grand Sahara (Eigs), ont continué d’étendre leur influence dans le centre, et ont attaqué et menacé les populations locales de plusieurs villages. Les affrontements entre communautés et groupes terroristes se sont poursuivis, entraînant le blocus de plusieurs villages, avec des conséquences désastreuses pour de nombreux civils. Le blocus le plus important a été signalé dans le village de Farabougou, dans le cercle de Niono (région de Ségou). L’utilisation d’engins explosifs improvisés par des groupes armés a continué d’entraver la liberté de mouvement des civils et des forces de sécurité. Six officiers ont été blessés dans deux attaques menées contre l’armée malienne à l’aide d’engins explosifs improvisés, les 1eret 11 novembre, dans les cercles de Mopti et de Douentza, dans la région de Mopti. L’explosion d’un tel engin dans le cercle de Bandiagara, dans la région de Mopti, a fait deux blessés parmi les soldats de la paix de la Minusma.
Oumar KONATE.