Dans son rapport d’octobre 2019, le Conseil de sécurité a mis l’accent sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. Ainsi que dans l’élaboration et l’exécution d’une stratégie globale axée sur les aspects politiques et visant à rétablir la présence et l’autorité de l’État, entre autres.
Au plan sécuritaire, le rapport indique que la présence des forces armées maliennes s’est renforcée au centre du pays. Ce, grâce à l’intensification de la collaboration de la Minusma avec les principales parties prenantes gouvernementales en vue de l’élaboration d’un plan d’action pour le Centre, fondé sur le Plan de sécurisation intégrée des régions du Centre. Par ailleurs, la Mission a continué d’appuyer le rétablissement de l’autorité de l’État et des services sociaux de base dans le Centre. Elle a soutenu les efforts de réconciliation déployés par les autorités maliennes aux fins de la réduction des violences et des tensions intercommunautaires – élément indispensable au retour des agents de l’État – notamment en fournissant une assistance technique et une aide au renforcement des capacités en vue de la création de trois comités de réconciliation municipaux et de district dans les districts de Mopti, Bandiagara et Bankass (région de Mopti), et a renforcé le comité de réconciliation régionale à Ségou. Dans le cadre de ses activités de communication menées dans le Centre, la Mission a lancé des programmes radiophoniques spécialisés pour sensibiliser les populations locales à son action en faveur du Gouvernement.
L’opération Oryx I lancée le 30 mars par la Minusma, précise le document, a continué d’assurer une présence dissuasive dans le Centre. Les patrouilles conjointes de la Minusma et de la police des Nations Unies (patrouilles de moyenne et longue distance) dans les districts de Bandiagara et de Bankass (région de Mopti) ont contribué à réduire les incidents signalés. L’opération Oryx II, une opération plus puissante d’une durée de trois semaines, a renforcé l’opération Oryx I, deux compagnies supplémentaires ayant été déployées dans le district de Koro (région de Mopti). Les forces de défense et de sécurité nationales ont déployé cinq compagnies supplémentaires dans la région et deux compagnies de gendarmerie, avec le soutien de la composante police de la Minusma.
Le 4 septembre, les forces armées maliennes auraient mené une attaque aérienne contre une base de la milice dozo Dan Nan Ambassagou, dans le village de Bandiougou, cercle de Bandiagara (région de Mopti). Aucune victime n’a été signalée. Le 6 septembre, Dan Nan Ambassagou a publié un communiqué condamnant l’attaque et appelant au désarmement et au cantonnement de tous les groupes armés du centre du Mali.
Faits nouveaux en matière de sécurité
Parlant des principaux faits nouveaux en matière de sécurité, le présent rapport révèle que la situation est restée complexe dans le nord et le centre du Mali. Les attaques perpétrées par des groupes terroristes, principalement dans le nord du Mali, ont continué de viser les forces de défense et de sécurité nationales, la Minusma et les forces internationales au moyen d’engins explosifs improvisés, de tirs de roquettes et de mortiers et de tirs d’armes légères. Les combats entre les groupes armés et leurs communautés respectives ont conduit à de violents affrontements dans les régions de Gao, Ménaka et Tombouctou. Des tensions ont persisté entre la Coordination des mouvements de l’Azawad et des membres de la communauté Daoussak affiliée au Mouvement pour le salut de l’Azawad dans les régions de Gao et Ménaka. Ainsi, un affrontement violent a eu lieu à Agarnadamos, à 45 kilomètres au sud de Talataye, dans la région de Gao, le 24 juin, faisant des victimes des deux côtés. Le 29 août, les groupes seraient parvenus à un accord sur la cessation immédiate des hostilités et auraient mis en place plusieurs mécanismes de réconciliation.
Les tensions entre les tribus arabes Tormouz et Oulad Ich, affiliées respectivement au Mouvement arabe de l’Azawad-Coordination des mouvements de l’Azawad et au Mouvement arabe de l’Azawad-Plateforme, au sujet du contrôle des points de contrôle stratégiques, se sont intensifiées à Lerneb, dans la région de Tombouctou, et ont entraîné de violents affrontements faisant de nombreuses victimes. La Minusma a appuyé les efforts de réconciliation et la mise en œuvre d’un plan d’action signé par des représentants des deux groupes; par ailleurs, les efforts de médiation du Gouvernement mauritanien ont abouti à la signature d’un accord de cessez-le-feu le 28 juillet. La Commission technique de sécurité a accepté, à sa trente-neuvième session ordinaire, de se porter garante de cet accord pendant que les équipes mixtes d’observation et de vérification enquêtent sur les affrontements.
La situation dans la région de Ménaka est demeurée instable. Dans la ville de Ménaka, l’insécurité a continué d’affecter les intervenants humanitaires et les civils. Par ailleurs, les tensions au sein des différents groupes armés sont restées palpables, notamment à la suite de l’expansion de la présence de la Coordination des mouvements de l’Azawad au détriment de la Plateforme.
Dans le centre du Mali, affirme le document où les conflits intercommunautaires étaient exacerbés, les visites du Premier ministre, conjuguées à l’intensification de mesures politiques ou liées à la sécurité et d’efforts de réconciliation entrepris par le Gouvernement avec l’appui des partenaires locaux et internationaux, ont permis de réduire légèrement la violence. Et semblent avoir contribué à une diminution des attaques à grande échelle. Toutefois, le massacre du village de Sobane Da le 9 juin a coûté la vie à plus de 35 civils parmi les Dogons, pour la plupart des enfants. Des attaques de moindre envergure, y compris des actes de représailles, continuent d’être signalées presque quotidiennement.
Attaques asymétriques et autres
Nonobstant cette baisse de tension intercommunautaire, l’ONU note la continuité des attaques asymétriques. Sur les 62 attaques asymétriques menées par les extrémistes, le nord du Mali en enregistrant la majorité avec 67% des attaques est suivi de 31% dans les régions de Mopti (17 attaques) et de Ségou (2), et une attaque dans la région de Kayes.
Au cours de la période à l’examen, il y a eu 32 attaques contre les forces de défense et de sécurité nationales, qui ont fait 42 morts et 33 blessés, contre 35 attaques ayant fait 67 morts et 51 blessés au cours de la période précédente.
Processus de désarmement
Selon le rapport onusien, des progrès ont été enregistrés dans le processus accéléré de désarmement, démobilisation et réintégration. Au 9 septembre, la Minusma avait transporté 1 448 anciens combattants relevant du Mécanisme opérationnel de coordination vers des centres de formation des forces armées nationales. À l’issue d’une formation militaire de base, ils suivront une formation spécialisée sur le lieu où leurs unités seront finalement redéployées. Toutefois, il faut avant cela que le plan exhaustif de redéploiement des forces nationales de défense et de sécurité reconstituées soit achevé.
Depuis le 10 juin, la Minusma a transporté de Gao et Tombouctou à Bamako d’anciens membres du Mécanisme opérationnel de coordination et leur a fourni des rations et du carburant pour les transports terrestres. Une fois arrivés à Bamako, le Gouvernement a assuré leur transport jusqu’aux centres de formation des forces armées maliennes dans les régions de Ségou et de Koulikoro, où ils ont reçu leurs numéros d’immatriculation et d’identification marquant leur intégration formelle dans les forces armées et la Garde nationale et reçu une formation militaire de base qu’ils ont terminée le 2 septembre.
Malgré les doutes exprimés au départ par les groupes signataires concernant le retrait de leurs combattants de Kidal, les parties sont parvenues à un accord facilité par les bons offices de mon Représentant spécial. Lors de la trente-neuvième réunion de la Commission de sécurité technique, le 5 août, les participants ont convenu du transport des éléments restants de la Coordination des mouvements de l’Azawad et de la Plateforme de Kidal à Gao. Le 17 août, la Minusma a commencé le transport de Gao vers le sud.
Au total, 668 anciens déserteurs qui ont rejoint des groupes armés en 2012 ont réintégré les forces armées nationales et ont été redéployés dans leurs anciennes unités en conservant leur grade, conformément aux dispositions de l’Accord.
Le 25 juin, la Commission nationale de désarmement, démobilisation et réinsertion et le Conseil national pour la réforme du secteur de la sécurité ont achevé le projet de décret sur l’intégration des combattants relevant du Mécanisme opérationnel de coordination dans les forces de défense et de sécurité nationales. Le 3 septembre, le Conseil national a adopté un plan d’action concernant une stratégie nationale de réforme du secteur de la sécurité ainsi que le projet de décret sur les modalités d’octroi des grades, le commandement, et la reclassification des ex-combattants des mouvements signataires dans les structures étatiques compétentes, notamment la fonction publique et les forces de défense et de sécurité nationales.
Évolution politique
En matière de politique, les faits nouveaux concernent principalement les préparatifs d’un dialogue national ouvert à tous après la signature, le 2 mai, de l’accord entre le Gouvernement et plusieurs partis d’opposition. Le dialogue, qui devait au départ comporter des consultations des parties prenantes sur la révision de la Constitution, a progressivement englobé les réformes politiques et institutionnelles majeures présentées dans l’Accord. Les consultations sur le mandat du dialogue, sa durée et les participants se sont poursuivies au sein des partis politiques et de la société civile et entre eux.
Certains partis d’opposition, dont la coalition Front pour la sauvegarde de la démocratie dirigée par le chef de l’opposition Soumaïla Cissé, ont exprimé des réserves quant au choix des facilitateurs, tandis que d’autres ont annoncé qu’ils ne participeraient pas au dialogue national inclusif. Le 27 juillet, un nouveau groupe réunissant des membres de la société civile et des groupements politiques, Awn Ko Mali Dron, a critiqué l’absence d’ouverture, certains demandant une plus grande participation des représentants au niveau local.
Oumar KONATE