Dans une interview au Journal du Mali, le patron de la Minusma, El Ghassim Wane a expliqué le processus de retrait avec la rétrocession des emprises de Ber, Tessalit, Kidal… Il est également revenu sur les obstacles que la mission a rencontrés.
La Minusma a officiellement clos portes et fenêtres le 11 décembre 2023, après dix ans de présence au Mali. Un pari gagné malgré les difficultés selon plusieurs observateurs car, le bras de fer entre le gouvernement de Transition et la mission onusienne au Mali a été houleux et tumultueux lors de ce processus sans oublier la résurgence de l’insécurité dans le nord et centre du pays.
Lors d’une interview exclusive accordée à nos confrères du Journal du Mali, le diplomate mauritanien El Ghassim Wane non moins chef de la Minusma est revenu largement sur le processus de retrait de la mission des Casques bleus et le calendrier qu’il exige très court.
Si certains observateurs estiment qu’El Ghassim Wane a gagné le pari du retrait de la Minusma malgré le délai jugé très court. Pour M. Wane, le pari d’un retrait dans les délais fixés était loin d’être acquis en raison de l’environnement sécuritaire, de l’envergure de la mission, de l’immensité de théâtre d’opérations et d’autres contraintes, y compris les logistiques.
”Il est évident que le délai prescrit pour le retrait est exceptionnellement court. C’est une réalité ! Dans une situation normale, une opération de retrait de cette envergure prend beaucoup plus de temps. La question n’est pas que logistique et sécuritaire, il s’agit aussi d’assurer un transfert adéquat des tâches entre la mission qui part et les autorités du pays hôte et, le cas échéant, avec l’équipe-pays des Nations unies, qui regroupe les Agences, Fonds et Programmes de l’organisation, et d’autres acteurs, de manière à ce qu’il y ait une certaine continuité dans l’effort. Il faut, dans toute la mesure du possible, éviter des vides qui seraient préjudiciables à la stabilité du pays. Une fois que le délai fut déterminé, notre responsabilité était d’œuvrer à la réalisation de l’objectif fixé en préservant par-dessus toute la sécurité de nos personnels”, a déclaré M. El Ghassim Wane.
Lors de la rétrocession de l’emprise de Kidal, bastion de la CMA, certains Maliens ont dénoncé une trahison de la part de la mission. Les autorités ont évoqué un non-respect de la résolution des Nations unies.
Pour le chef des Casques bleus onusiens, des canaux de communication multiples et à différents niveaux ont été établis avec les autorités maliennes pour assurer une exécution aussi efficace et efficiente que possible du retrait de la mission.
”Dans ce cadre, nous échangeons régulièrement et dans le détail sur tous les aspects du processus de retrait, son évolution et nos préoccupations respectives.
Je l’ai dit et le Conseil de sécurité l’a souligné, la sécurité de nos Casques bleus est une préoccupation primordiale. Dans un contexte marqué par l’absence d’un mandat substantif à la suite de la demande de retrait et de la résolution du Conseil, la réduction drastique de nos capacités à nous protéger et l’augmentation très significative des risques sécuritaires, nous avions la responsabilité, l’obligation, de ne pas mettre la vie de nos personnels davantage en danger. Que ce soit lors des retraits de Ber, dans la région de Tombouctou, ou des bases situées dans la région de Kidal, nous avons fait face à des attaques et sommes, à plusieurs reprises, passés tout près de la catastrophe”, a-t-il souligné.
Depuis le 1er juillet jusqu’à maintenant, la Minusma a fermé les dix bases qui devaient l’être d’ici au 31 décembre 2023. Il ne reste que trois bases (Bamako, Gao et Tombouctou) ces bases seront converties en sites de liquidation à partir du 1er janvier 2024. Déjà la Minusma a procédé à une rétrocession partielle aux autorités maliennes de la base de Gao celle de Sénou, à Bamako, d’ici à la fin du mois.
Aux dires d’El Ghassim Wane cette phase de liquidation est mise à profit pour faire transporter hors du Mali les matériels et équipements, notamment ceux appartenant aux contingents qui n’ont pu être rapatriés avant la fin du retrait, ainsi que pour gérer tous les autres aspects, administratifs, financiers et autres, liés aux activités de la mission et disposer de ses biens.
”L’expérience des Nations unies montre que ce type d’activité requiert normalement 18 mois pour être mené à bien. Mais mes collègues qui gèrent ce dossier ont la détermination de faire en sorte que ce travail soit accompli dans les délais les plus courts qui soient. Celui-ci mobilisera des personnels civils, avec le soutien d’effectifs limités de personnels de garde pour protéger les équipements encore au Mali et assurer la sécurité intérieure des sites de liquidation”, a laissé attendre M. Wane.
Ousmane Mahamane