Saisine du conseil de securite de l’Onu : Le dilemme des autorités maliennes

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La « montagne » de la réunion du vendredi 15 juin du Conseil de sécurité de l’ONU sur la crise malienne « a accouché d’une souris » et pour cause : le Conseil veut encore des précisions sur le mandat de cette force d’intervention, son déploiement, sa stratégie militaire… L’autorisation pourrait être donnée d’ici deux à trois semaines, mais il reste un obstacle : le Conseil de sécurité a besoin d’une demande d’intervention formelle des autorités maliennes qui n’a pas encore été donnée par Bamako. Toute chose qui freine l’effort de la CEDEAO et de l’UA. Mais au regard de l’énorme enjeu, qu’attendent les autorités du Mali pour se décider enfin, plutôt que de vouloir jouer sur un orgueil de souveraineté ?

La CEDEAO demande au Conseil de sécurité des Nations Unies de soutenir le déploiement de troupes au Mali, en appui à l’armée malienne, pour déloger les groupes armés qui contrôlent le nord du pays. Cette demande fait suite à celle de l’Union africaine. Le gouvernement malien est depuis belle lurette aux abois. Quant au le pays tout entier, il « se cherche » et on sait pourquoi. La rébellion qui ressurgit aux premières heures de l’année 2012 a causé les dégâts que l’on sait. A ce jour, le pays est divisé en deux parties : le Nord occupé par des groupuscules militaires et « religieux » super-armés, et le Sud dirigé par un gouvernement dont la caractéristique majeure est qu’il ne fait pas le consensus. E, plus, on n’est pas sûr que le Président par intérim, Dioncounda Traoré, s’empresse de rejoindre son pays. Comme on le comprend : « chat échaudé craint l’eau froide ». Le Premier ministre semble sous la coupe des putschistes. La communauté internationale, l’UA en tête, ne réclame ni plus ni moins que la dissolution de l’instance de la bande du Capitaine Sanogo (CNRDRE) qui se trouve paradoxalement être la véritable maîtresse de la situation à l’heure actuelle. Pendant ce temps, la partie septentrionale du pays semble vouée à rester entre les mains du MNLA et de ses compagnons du moment qui n’entendent pas céder un pouce du terrain acquis.

C’est dans ce contexte caractérisé par le plus grand flou que le gouvernement malien a décidé de créer une nouvelle instance dénommée « Comité militaire de suivi de la réforme des forces de défense et de sécurité » et qui aura pour feuille de route d’équiper et moderniser l’armée malienne, de redonner le moral aux troupes pour faire barrage aux groupes militaro-religieux actuellement maîtres de la partie septentrionale du pays. Cependant, un hic demeure : à supposer que l’Assemblée nationale malienne entérine ledit projet de loi, ce Comité qui verra le jour « absorbera » l’actuel CNRDRE du Capitaine Sanogo. Autant dire que l’équation de la crise malienne reste entière. En effet, quelle place occupera la nouvelle instance née des cendres de l’ancienne érigée par des putschistes qui ne recueillent pas l’assentiment de tous les Maliens, mais n’en demeurent pas moins les véritables maîtres du jeu politique à Bamako ? Fallait-il absolument placer ce futur organe sous la coupe des militaires du Capitaine ? Quelle sera la véritable force de ce CNRDRE-bis puisqu’en dépit des textes et résolutions qui régissent la transition, le Capitaine Sanogo est en fait l’un des pôles du « bicéphalisme qui tient la barre du navire battant pavillon malien ». Le Conseil de sécurité n’a pas encore donné son accord pour employer la force au Mali, mais les représentants de la CEDEAO et de l’Union africaine se disent « optimistes » et « encouragés ». Aussi proposent-ils d’envoyer 3 000 hommes à Bamako pour assurer la sécurité des institutions et des dirigeants du pays. Cette force soutiendrait ensuite l’armée malienne dans sa reconquête du Nord du pays. Selon le représentant de la CEDEAO, Kadré Désiré Ouédraogo, interrogé par RFI, il s’agit de se préparer à un échec des négociations : « L’usage de la force n’est pas la première option. La première option, c’est d’obtenir une issue à travers ces négociations. Mais les Chefs d’Etat ont été clairs : si les voies de la négociation devaient échouer, l’usage de la force n’est pas exclu. Et c’est la raison pour laquelle nous venons de demander l’aval du Conseil de sécurité, à travers une résolution, pour nous permettre le déploiement de cette force au Mali ».

Face au pourrissement de la situation au Nord du pays complètement contrôlé par les dissidents touaregs et les groupes terroristes d’AQMI et du MUJAO, la désinvolture des autorités maliennes (plutôt des putschistes militaires) a fait réagir la Communauté internationale. Bien qu’ayant observé une stricte neutralité dans la crise malienne, depuis le début des combats et jusqu’à la chute des villes du Nord, la France opte dorénavant pour une solution militaire. L’Union africaine, l’ONU et la CEDEAO sont aujourd’hui perçues comme des passages obligés pour un règlement rapide de cette crise. Pourtant, le Conseil de sécurité a « douché » (découragé) les partisans d’une solution musclée, c’est-à-dire la CEDEAO et l’UA, qui avaient appelé à une intervention militaire au Nord du Mali, contre les groupes armés de tous bords qui contrôlent la région : premier couac dans le « règlement militaire » de la crise malienne ? Mais les portes ne sont pas fermées pour autant, et de nouvelles discussions sur la situation du Nord  sont prévues. Pour convaincre davantage le Conseil, les membres de l’UA et de la CEDEAO devront fournir plus d’amples informations et surtout faire pression sur le régime de Bamako afin qu’il saisisse le plus tôt possible le Conseil de sécurité de l’ONU qui n’attend que cela pour prendre une résolution dans ce sens. Mais avec les récentes déclarations du porte-parole du gouvernement malien à Paris, tout porte à croire que le Mali n’est pas au bout de ses peines car plutôt au lieu de saisir le dit Conseil, le gouvernement préfère plutôt « faire poireauter » les choses et solliciter l’aide militaire des pays du champ plutôt que celle de la communauté internationale, oubliant ainsi que ces pays du champ ont jusque-là été incapables de lutter efficacement contre les terroristes et les intégristes islamistes. Pour les autorités maliennes, il serait donc plus sage d’accélérer le processus d’unicité du pays plutôt que de faire traîner les choses car chaque jour qui passe ne fait qu’arranger les affaires des assaillants du Nord qui se renforcent chaque jour en hommes et en armes avec des soutiens financiers colossaux de certains pays arabes.

Paul N’guessan

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1 commentaire

  1. On ne refuse jamais une main tendue. si jamais on rate cette occasion les nordistes ne vont jamais nous le pardonner. que le premier ministre s’assume enfin en acceptant l’intervention des troupes de la cedeao.Tout ce qui compte pour nous c’est la libération du nord de notre pays. saisissons cette aubaine pour ne pas perdre à jamais nos trois régions.
    vive l’intervention des troupes étrangères.
    Si nous en sommes arrivés là c’est parce que nos militaires censés nous défendre sont des trouillairds.

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