C’est la menace qui plane sur les ressources du FNACT, destinées aux populations des régions de Kidal, Gao et Tombouctou. Les élus de la région de Gao vivent le calvaire. Et pour cause? Les ressources du Fonds National d’Appui aux Collectivités Territoriales (FNACT), de plus d’Un milliard de francs, destinées à la réalisation d’investissements sous la maîtrise d’ouvrage des collectivités territoriales, risquent de retourner dans les comptes des bailleurs, pour raison d’absence de service public.
Au cours de ces dix dernières années, le FNACT, géré par l’ANICT, a financé, en faveur des trois régions près de 900 points d’eau (puits à grand diamètre, puits modernes, adductions, forages), près de 350 bâtiments administratifs ou annexes, plus de 1.000 commerces (boutiques artisanales, hangars de marché, parcs animaliers), plus de 1.700 salles de classe et fourni près de 13.750 tables bancs et mobiliers pour maîtres, ainsi que près de 200 CSCOM, maternités, centre de soins et leurs équipements.
Hélas, la belle aventure risque de prendre du plomb dans l’aile, dans le cadre du financement des investissements au titre de 2013. Car, si l’ANICT a promis près de quatre milliards pour les trois régions, leur utilisation est loin d’être acquise. Si, à Kidal, l’ANICT n’a pas repris ses activités, à plus forte raison recevoir les marchés et les étudier, il va en va tout autrement pour les régions de Gao et Tombouctou. Le personnel des mairies ou des conseils de cercle de ces deux régions vit la croix et la bannière dans sa démarche pour rassembler ces pièces.
Sans égards pour le traumatisme dans lequel les ont plongés deux longues années d’une occupation archaïque et criminelle, ils peinent à trouver le moindre document. Le problème est lié à l’absence des services déconcentrés de l’Etat et à la faiblesse des ressources propres, d’où l’impossibilité de faire face à leur participation financière aux différents projets. Il est à noter que le dernier délai pour la constitution de ces pièces était fixé au 31 décembre 2013.
Le Premier ministre interpellé
L’affaire préoccupe les populations des régions de Gao et Tombouctou, et les plus hautes autorités ont été informées de la menace. Lors de sa visite à Gao, le Premier ministre, Oumar Tatam Ly, avait préconisé, tout en œuvrant au retour de l’administration, à la prise de dispositions spéciales, allégeant ou exonérant ces régions des procédures administratives de validation des pièces administratives et contrats de marché. L’interpellation est restée lettre morte depuis.
Si la réaction du PM a eu pour effet de faire revenir les différents Directeurs seulement trois jours après, il faut regretter que la suite relève simplement du banditisme administratif. Ayant fait acte de présence au Gouverneur, ils sont allègrement retournés dans leur nid douillet, à Bamako. La maire de Goundam, Madame Seck Oumou Sall, s’en était fait l’écho durant le Forum sur la décentralisation, tenu du 21 au 23 octobre 2013, en pointant du doigt la conduite des cadres de l’Etat, «qui dorment à Bamako».
Les collectivités peuvent en témoigner, elles à qui la secrétaire ou le planton indique la route de Bamako si elles veulent enregistrer leurs contrats ou payer leurs quotes-parts. Après même que lesdits cadres aient allègrement empoché les 250.000 FCFA octroyés par le contribuable pour aider au retour et à l’installation des fonctionnaires en poste dans les régions du Nord. Les budgets peinent à être approuvés par les Préfets, pourtant sur place.
Les Gouverneurs de la région, alertés de cette situation, ont tenté de limiter les dégâts. Le Gouverneur de Tombouctou, la région sœur, a assigné les cadres des services publics présents au Gouvernorat, afin de traiter et de valider les pièces constitutives des dossiers pour l’accès au financement du FNACT. Reste le problème du paiement des quotes-parts des collectivités, exprimé par le Président du Conseil de Cercle de Tombouctou, en raison du dénuement total de ces collectivités après la crise.
Quant au Gouverneur de Gao, il s’est contenté de demander aux usagers du service public de venir dénoncer à ses services les cas d’absence des représentants de l’Etat. Le service public est une permanence, dont le contrôle et la coordination relèvent du Gouverneur de la région. Mais, à Gao, tout laisse croire que le renouveau du service public (alliant modernisation et changement des mentalités) est une notion inconnue. Si la médiatisation de l’arrestation des magistrats vaut son pesant d’or pédagogique dans la dissuasion et la prévention du crime économique, le rôle sacro-saint de l’Etat reste dans la saine distribution du service public en faveur des contribuables.
La conduite de nos cadres d’Etat est inacceptable et révoltante dans le contexte actuel du Mali, revenu de la crise dont on connaît l’ampleur et surtout lorsque l’on témoigne, à Gao et à Tombouctou, de la qualité du service des forces de libération, notamment les valeureux (oui!) soldats de la Force Serval, même dans les services de proximité rendu aux populations (réhabilitation de ponts, distribution de médicaments, réhabilitation d’adduction d’eau, etc).
Le Gouvernement doit prendre ses responsabilités
Les élus des régions du Nord vivent un calvaire qui mérite que le Gouvernement s’y attarde. Près de Quatre milliards de Francs d’investissements sont menacés de retourner dans la cagnotte du bailleur de fonds, au moment où le Président élu, Ibrahim Boubacar Kéita, nous engage au défi de prouver, au «monde et à la ville», notre capacité à absorber trois milliards et demi d’Euros, consentis lors de la conférence des bailleurs de Bruxelles.
A défaut de mettre en œuvre, sans délai, l’engagement du PM à prendre des dispositions particulières d’exonération en faveur des régions du Nord, l’Etat se doit de prendre ses responsabilités, en usant de ses prérogatives, pour faire regagner leurs postes aux fonctionnaires en service dans les régions du Nord, afin de distribuer le service public.
A noter que le dernier délai de mobilisation des dépenses liées au FNACT est fixé au 31 décembre 2014.
Almeymoun Maïga dit Ardo
Je crois que le délai de mobilisation est fixé au 31 décembre 2013, et non 2014 comme vous l’écrivez. Je crois également que DG de l’ANICT a repoussé ce délai au 31 janvier 2014, donc dans 2 semaines. Je suis d’accord avec vous, l’Etat doit s’assumer et intimer à ses cadres d’assumer le service pour lequel le contribuable les paye. IBK doit arrêter de brandir le doigt et mettre le pays résolument au travail. Cela doit commencer par la mise au pas du service public, dont il est l’employeur. Notamment, la priorité doit commencer par le fait que l’administration investisse, m après m, compétence après compétence, les régions déjà libérées.
En attendant, l’Etat doit prendre des mesures de facilitation des procédures au profit des régions du Nord.
Quelle indignité ! L’Etat malien malmené, humilié se met en quatre pour octroyer 250.000 F à ces cadres véreux qui parcourent, sans crainte du danger, 1.600 km jusqu’à Gao ou Tombouctou ou Kidal, pour toucher l’argent et une fois cela fait les régions ne sont plus assez sures pour leur prétendue mais “en réalité” prostituée vie. Quelle indignité. Ils comptent surement sur le soutien de leurs syndicats respectifs. Quel honte ! C’est cela le sens du service public, dans un pays flagellé et humilié. Les syndicats qui sont prêts à monter au créneau pour n’importe quel strapontin ont une belle occasion de s’exprimer.
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