Ousmane Sy : «Si on avait continué avec la volonté politique de la décentralisation de 1993 jusqu’à 2002, on aurait pu éviter la crise de 2012»

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Pour son 10ème numéro, le Grand débat économique a ouvert une réflexion sur «le transfert des ressources aux collectivités : les enjeux de la gouvernance économique». Les invités étaient Ousmane Sy, ancien ministre de la Décentralisation, membre du Centre d’études et de réflexion du Mali, et Dr. Abdoulaye Sall, ancien ministre, également chargé des institutions avec la République, président de Cri 2002.

 Selon Ousmane Sy, la décentralisation est une réforme qui se construit dans la durée. Il a souligné que le Mali aurait mieux fait depuis 15 ans de décentralisation.  Mais, à l’en croire, le résultat est appréciable parce que ce qui paraissait comme illusion au début, est devenu une réalité aujourd’hui. «Nous sommes passés de 19 communes à 703 communes. Aujourd’hui, partout au Mali, il y a les mairies, les centres de santé et les écoles», a déclaré Ousmane Sy.

Il a outre expliqué que la décentralisation a donné un visage à la démocratie, mais avec des problèmes énormes. Selon lui, elle a décrédibilisé les élus parce qu’on leur a donné des responsabilités, sans leur donner les moyens d’assumer ces responsabilités. Aux dires d’Ousmane Sy, le grand handicap des collectivités qui existent, c’est la faiblesse des capacités humaines et financières.

Pour l’ancien ministre de la Décentralisation, le souci de gérer le pays en associant les  populations et en amenant la décision à la base de la société, est un souci vieux que le Mali lui-même. Puisque, selon lui, dans la Constitution de 1960 et celle qui a été faite par l’Udpm, les principes de la décentralisation étaient ancrés. Mais la mise en œuvre n’a pas été à hauteur de souhait. Il a indiqué que les questions d’approche de la décentralisation étaient liées à la conjoncture. Mais, pour Ousmane Sy, ce qui était important dans l’approche, c’était la progressivité et l’implication des populations. À ce sujet, il dira que le Mali a été le seul pays où il y avait une dynamique collective de société civile et l’ensemble des acteurs locaux pour penser et mettre en œuvre les réformes.

«Là où il y a la plus grosse panne aujourd’hui, c’est qu’on a construit des collectivités locales, mais l’Etat est resté centralisé. La volonté politique qui accompagnait la décentralisation dans les années 1993 jusqu’en 2002, s’est fortement rétractée. Si on continuait avec cette volonté, on aurait pu éviter la crise de 2012», a déclaré l’ancien ministre de la Décentralisation.

Pour Abdoulaye Sall, la construction de la décentralisation n’est pas déconnectée de la démocratie, de la bonne gouvernance et de la déconcentration.  Selon lui, le bilan de la décentralisation au Mali  est bon, pour la simple raison que le sujet est en train d’être discuté aujourd’hui. À l’en croire, l’approche a été mauvaise parce que la décentralisation n’est pas une politique, mais une stratégie. «Si on doit transférer les compétences, on doit aussi transférer les ressources», toute chose, selon Abdoulaye Sall, qui n’a pas été faite. Il a également noté d’autres principes qui sont plus importants que ce principe de concomitance. Il s’agit du principe de l’exclusivité, du principe de la délégation…

Il faut noter que le Grand débat économique est une initiative d’un groupe de journalistes et de communicateurs réunis au sein de l’association Forum de la presse du Mali. Il  est animé par Issa Fakaba Sissoko. L’initiative vise à mettre en confrontation d’idées les universitaires, les ténors de grandes organisations du secteur économique et financier.

Diango COULIBALY

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5 COMMENTAIRES

  1. «Si on avait continué avec la volonté politique de la décentralisation de 1993 jusqu’à 2002, on aurait pu éviter la crise de 2012»” Je n’y crois pas car la racine du mal est plus profonde qu’il ne pense. N’oublions qu’avec Si, on peut mettre PARIS dans une Bouteille.

  2. La crise multidimensionnelle que connait le Mali n’est pas une crise de décentralisation du pays. Quel que soit le niveau de la décentralisation, elle n’aurait pas permis d’éviter la crise. Les indépendantistes ont mûri, construit leur projet sur la durée, il en est de même pour les djihadistes. La crise Libyenne, la faiblesse de l’armée, le contexte de terrorisme mondial, la cupidité de pouvoir de certains maliens ont été des facteurs déclencheurs et aggravants. Le Mali était impuissant devant le contexte géopolitique mondial. Nous sommes tous comptables de la faiblesse de l’armée, imagine un seul instant en 2000 que le gouvernement proposait une loi de programmation militaire de la taille de celle que IBK à fait adopter, tous les maliens, les intellectuels en premier lieu allaient s’opposer. Et même si l’AN adoptait la mise en oeuvre allait être confronté à tous les problèmes. Personne n’avait prédit que le Mali allait être confronté à un tel défi sécuritaire, même les chargés d’assurer la sécurisation du pays. En matière de décentralisation le Mali est en avance sur beaucoup de pays en Afrique même si comparaison n’est pas raison.

  3. @Sangaré
    La generation Alpha comprend aussi ATT ainsi bien que IBK ou Soumaila. C’est une generation d’amateurs bourgeois arrivistes de tous bords avec une vision colmatée. Nous vivons les consequences de cet amateurisme. C’est une generation qui est à la base de la perte du Mali. Les maliens doivent savoir et comprendre que cette generation n’a jamais eu rien à offrir, n’en a pas et n’en aura jamais. Il n’y aucun acte durable qu’ils ont posé. Leurs équivalents dans les régions Nord sont ceux qui sèment la pagaille actuelle. A vrai dire ces derniers sont préférables aux premiers car après tout, eux ont permis aux maliens d’ouvrir les yeux et de comprendre ce qui se passe! Même les officiers militaires de cette generation ne savent pas faire la guerre. Il n’y a aucun domaine à part ma belle famille qu’ils ont pu gérer

  4. La décennie ATT n’avait pas la même passion pour la décentralisation que celle de ALPHA OUMAR KONARE.
    Notre soldat de la démocratie s’est contenté de poursuivre les réalisations,en termes d’infrastructures,initiées par AOK(logements sociaux ,routes…).Il lui manquait une vision réelle de conduite des affaires.Sinon,il aurait compris l’importance de mettre aussi l’accent sur la décentralisation qu’ il en a fait pour les infrastructures.
    L’ alternance aussi a ses inconvénients.
    ALPHA OUMAR KONARE dix ans de plus le MALI aurait il l’avenir qu’ il a aujourd’hui?

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