C’est l’histoire d’une partie de chasse à l’initiative du roi, le lion. Pour mieux contrôler la vie en brousse, il lance une invitation aux autres prédateurs et à quelques courtisans comme le lièvre.
Mes chers amis, leur dit-il, j’ai organisé cette partie de chasse dans le but de nous éviter d’éparpiller désormais nos forces (c’est de là que vient l’origine de la création des partis politiques, un instrument absolu pour la préservation du pouvoir). En tant que leader des prédateurs, je me vois mal laisser le désordre s’installer dans notre milieu de vie. Comprenez seulement qu’Allah nous a créés pour vivre des autres et pour préserver cet acquis, nous ne devons absolument donner le temps à nos proies de savoir dans quelle assiette elles seront dévorées. Si on leur donne le temps de s’organiser, cela se fera sûrement à notre propre péril. Un leader qui ne peut pas rassembler, qui ne parvient pas à créer un parti de rassemblement, ne peut pas prétendre vivre du sang des autres. Il eut un tonnerre d’applaudissements. Le butin de la chasse se compose de deux gazelles bien grasses, d’une biche, de deux ânes sauvages, d’un phacochère et de quelques écureuils.
Vient maintenant le moment du partage. Le lion désigne l’hyène pour cela. Très honorée, l’hyène se place au milieu du groupe, à proximité du lion. Il prononce un petit discours plein de sens pour lui. Il exprime toute sa volonté de vouloir être le plus juste possible. Notre société, dit-elle, est minée par l’injustice ; tous nos malheurs proviennent du fait que la justice est mal distribuée; je m’efforcerai d’être le plus équitable possible.
Je propose, dit –elle, qu’on réserve une antilope pour le roi, la biche pour la panthère, et le reste doit être équitablement partagé entre le reste du groupe.
A peine eut-il fini de prononcer cela que le roi lui administre une gifle très puissante qui la crucifie sur place, les quatre pattes en l’air.
Le lion demande qui est volontaire pour faire un bon partage. Alors, le grand courtisan, le lièvre, se propose. Il commence d’abord par faire l’éloge du roi, sans le chef, dit-il, nous n’aurons jamais un tel butin, sans compter que c’est sur son initiative personnelle que nous sommes réunis. Je propose que les 2 antilopes et la biche soient données au chef, que notre grande sœur, la panthère partage le reste de façon que chacun ait la part qui lui revient naturellement de droit.
S’en suit un tonnerre d’applaudissements, le lion très content s’adresse au lièvre. Alors benjamin, qu’est-ce que tu es intelligent, mais d’où te vient cette idée géniale de faire la meilleure proposition ?
Pas difficile de comprendre chef, regardez seulement l’oreille sanguinolente de ma grande sœur l’hyène et apparemment, elle n’a pas repris encore connaissance.
Cette fable tirée de notre terroir illustre à suffisance ce que le peuple malien vit depuis au moins l’avènement de la démocratie pluraliste et multipartite.
On voit mal encore le bout du tunnel quand on sait que de telles pratiques sont encore monnaie courante au Mali. Si le bateau Mali continue de tanguer sans chavirer, difficile de savoir combien de temps il lui reste encore pour atteindre le rivage, et entre temps, les passagers qui s’y trouvent arriveront-ils au bord avec un souffle de vie ?
AlmatarMahamar Touré