A la loupe : Rebelles mais bientôt terroristes

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Des délégués des rebelles touareg participent à une réunion de médiation sous l'égide du Burkina Faso, à Ouagadougou
Des délégués des rebelles touareg participent à une réunion de médiation sous l’égide du Burkina Faso, à Ouagadougou le 10 juin 2013
© AFP
Des délégués des rebelles touareg participent à une réunion de médiation sous l’égide du Burkina Faso, à Ouagadougou le 10 juin 2013

En juin 2012, après de brefs mais sanglants combats, le Mouvement national de libération de l’Azawad (Mnla) est défait à Gao et chassé de toutes les localités du nord malien par le Mujao (Mouvement pour l’unité et le jihad en Afrique de l’Ouest), aidé en cela par l’ensemble des populations locales excédées par les nombreuses exactions des rebelles touareg. Alors que la plupart de ses combattants se sont dispersés entre Aqmi, Ansar Eddine et même Mujao beaucoup plus nantis, ses responsables ont trouvé refuge au Burkina Faso, en Mauritanie, au Niger et dans certains pays européens dont la France et la Suisse. Au cours de ces affrontements avec le Mujao et, plus tard, avec Aqmi, le Mnla a perdu l’essentiel de ses moyens humains, matériels, logistiques, militaires et financiers. En janvier 2013, quand le Mnla reviendra à Kidal dans les bagages d’un Serval vainqueur des groupes jihadistes, il était toujours démuni, ses combattants ayant été promus au grade de supplétifs des forces françaises dans la grande offensive de l’Occident contre les islamistes.

Réarmement miraculeux
Miraculeusement, le Mnla, en quelques mois, est remis en selle au point de résister aux forces armées maliennes (Fama), le 17 mai, lors de la visite du Premier ministre à Kidal, et de les vaincre, quatre jours plus tard dans la même ville. Quel est ce miracle ? Comment le Mnla a-t-il obtenu tous ces moyens qui lui ont permis de mettre les Fama en déroute ? Qui l’a financé ? Depuis janvier 2013 où ils ont repris le contrôle de la ville de Kidal, les combattants du Mnla n’ont été en relation qu’avec les forces françaises qui les utilisent pour diverses missions sous prétexte qu’ils maitrisent la zone et sont donc capables de les aider à débusquer les dernières poches de résistance. Le bon sens veut donc que la France soit accusée du réarmement, du rééquipement et du financement du Mnla. On se rappelle que, même au moment où des mandats d’arrêt internationaux étaient émis contre des responsables du terrorisme et du narcotrafic au Mali, des leaders touareg étaient hébergés et dorlotés dans des pays européens et africains où ils n’ont couru aucun danger. On se rappelle aussi que c’est sous la pression de ces communautés internationales que les autorités maliennes ont annulé ces mandats et sursis aux poursuites judiciaires contre les présumés terroristes et narcotrafiquants que les Occidentaux prétendent combattre dans les confins du désert malien alors qu’ils sont réfugiés chez eux-mêmes, en Europe où ils bénéficient de toute l’assistance nécessaire.

Pendant ce temps, ce sont les Etats-Unis qui établissent des listes noires sur lesquelles figurent des groupes armés comme Ansar Eddine mais pas le Mnla, qui fournissent aux nations unies de l’aide logistique et refusent de s’engager au sol, qui donnent à la France des drones de surveillance qu’ils ont pris le grand soin de désarmer auparavant.
Tous est fait comme si le Mnla devait rester seul maitre à bord du nord malien, dictant ses lois aux autres, imposant ses points de vue et faisant de Kidal un territoire indépendant de fait. Le contrôle de cette ville, la restriction de mouvements imposée aux Famas, l’interdiction faite au chef du gouvernement de fouler le sol kidalois, l’occupation des bâtiments publics, symboles de l’Etat, sont les signes de la volonté des indépendantistes de réaliser leur rêve séparatiste autrement.

Dialoguer rien qu’avec les armes
Les événements du 17 mai, la riposte des rebelles à la tentative de récupération du gouvernorat de la région le 21 et l’attaque des positions des Fama dans cette ville démontrent à suffisance que ces rebelles, même si leurs chefs n’osent pas encore revenir dans le nord malien préférant exposer des combattants sans cervelle, croient pouvoir se permettre tout ce qu’ils veulent. Même en présence des forces françaises et des troupes onusiennes.
Pendant ce temps, tous, France, Etats-Unis, ONU et le reste des communautés internationales poussent les autorités maliennes au dialogue et aux négociations. C’est vrai, le Mali doit aller au dialogue mais les Famas ne doivent plus dialoguer qu’avec les armes pour réaffirmer la souveraineté nationale sur tout le territoire. C’est vrai que le Mali doit aller aux négociations mais la seule chose à négocier avec des terroristes c’est la manière dont ils seront définitivement mis hors d’état de nuire.

Après ce qui s’est passé ce 21 mai, mais déjà après ce qui s’était passé en janvier 2012 puis d’avril à juin de la même année, le Mnla ne doit plus être perçu que comme un groupe terroriste. Au même titre qu’Ansar Eddine, le Mujao, Aqmi. De même que ses complices du MAA et du Hcua.

Ne négocier que la peine
En France, la chose est de plus en plus comprise et admise même si certains cercles de décision répugnent encore à franchir le pas en inscrivant le Mnla sur la liste noire des groupes terroristes. Une telle répugnance est comprise vu la complicité entre des Français et ces terroristes mais le pas serait déjà franchi si tout le monde suivait les instructions. En effet, il n’y a pas qu’à Bamako où les militaires n’obéissent pas aux politiques. A Paris, selon plusieurs sources concordantes, la présidence et la hiérarchie militaire n’auraient pas la même perception de la gestion de la crise malienne, notamment en ce qui concerne le Mnla.
Ce mouvement, dont les actes terroristes et les intentions criminelles ont été éventés, ne serait plus en odeur de sainteté dans certains cercles politiques où on fustige l’indulgence dont il bénéficie de la part des forces spéciales sur le terrain. Longtemps considérés comme des rebelles avec des revendications politiques, les Mnla, Hcua et MAA doivent désormais répondre de leur statut de groupe terroriste sans autre justification que de semer la terreur.

Cheick TANDINA

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2 COMMENTAIRES

  1. Les droits de l’homme sont réservés aux puissants, les faibles n’ont aucun droit. Sinon, c’est un secret de polichinelle que la supposée puissante France, la supposée développée France, la supposée France des droits de l’homme, a armé, soutenu des terroristes pour attaquer le Mali faible.
    Nous n’avons aucune autre solution que d’avoir une armée aérienne et terrestre forte quelqu’en soit son coût. Mais cet IBK qui n’a d’autres soucis que ses loisirs le peut-il? La société civile malienne l’y forcera au besoin…
    En attendant, nous sommes obligés de laisser pour quelque moment Kidal aux terroristes de SERVAL/MINUSMA/MNLA/HCUA et autres AQMI. Aussi sûr que 2 et 2 font 4, ils s’entredéchireront, l’armée malienne se renforçant en renseignement, en appui aérien et à la sécurisation de la Boucle du Niger.

  2. Le MNLA, un gentil criminel
    Maliactu du 5 mai 2014
    Par Aliou Hasseye

    En 2012, le Mali a vécu un enfer, certains l’appelleraient le sort du destin, d’autres le prix du laxisme ou de la naïveté. Mais si tout le monde s’accorde sur une chose, c’est bien l’identité des déstabilisateurs.

    Pour les maliens, il n’existe point de qualification supplémentaire à « groupes armés ». Mais pour la communauté internationale, la distinction « groupes armés rebelles » et « groupes armés terroristes » est primordiale. C’est ainsi que certains groupes, comme le MNLA, furent différenciés des « terroristes ».

    Malgré les preuves d’actes criminels du MNLA, il continue de bénéficier d’un traitement plus doux par rapport aux autres mouvements armés. Des fois, il est même adulé, protégé et aidé par « son amie », la France.

    Quant à l’ONU, elle le tolère, bien qu’au vu de ses constats sur le terrain, le mouvement se distingue à peu d’égards des autres groupes armés appelés « terroristes ».

    Le secrétaire général de l’ONU reconnait, dans un récent rapport, que « depuis le début de l’offensive menée au début de 2012 contre les forces armées maliennes, le MNLA a été responsable de pillages généralisés d’installations publiques, d’actes visant les ressortissants du sud du pays, de viols et de violences sexuelles, ainsi que du recrutement et de l’utilisation d’enfants et de jeunes provenant de fractions Touaregs locales et de proches de cadres du Mouvement. ».

    En réalité, si la qualification « terroriste » doit s’employer dans son sens strict, le MNLA ne saurait faire l’exception. Le mérite de la distinction aurait dû revenir aux seules victimes qui ont vécu l’enfer et connaissent chacun de leurs bourreaux. Quand bien même ce droit ne leur fut pas reconnu, la communauté internationale devait procéder à une requalification après la découverte des faits terroristes du mouvement.

    Quoi de plus criminel ou terroriste que le meurtre ou la mutilation d’innocents enfants ?

    « Pendant les premiers mois de 2012, le MNLA était le principal groupe qui recrutait et utilisait des enfants, commettait des actes de violences sexuelles et se livrait à des meurtres et des mutilations d’enfants. » (Rapport – Secrétaire General des Nations Unies).

    Les maliens se demandent ce que le MNLA a de si particulier pour être considéré comme saint malgré son penchant criminel. Comment peut-il avoir commis les exactions avec ses alliés AQMI, MUJAO, Ansar Dine et jouir d’un traitement amical par les forces qui étaient censées rétablir, rien de plus, rien de moins que l’intégrité territoriale du Mali ?

    « En 2012, 211 cas de violences sexuelles et sexistes (viol, esclavage sexuel, mariage forcé, violence sexuelle en détention et viol en bande) perpétrés par des acteurs armés, notamment le MNLA, le MUJAO, Ansar Dine et AQMI, ont été signalés. Ces groupes utilisaient la violence sexuelle comme tactique de guerre pour humilier les populations, leur faire peur et exercer un contrôle sur celles-ci. C’est pourquoi en 2013, j’ai inscrit Ansar Dine, le MNLA et MUJAO sur la liste des entités ayant commis des violences sexuelles » (Rapport – Secrétaire Général des Nations Unies).

    L’ONU ne sert-elle à rien ? La France n’a-t-elle plus de principe ? Pourquoi collaborer avec le MNLA, une organisation terroriste ? Pourquoi héberge-t-elle chez elle les leaders du MNLA ? Pourquoi l’armée française n’a pas suivi les objectifs premiers de sa mission ? Pourquoi a-t-elle permis une nouvelle atteinte à la souveraineté du Mali en laissant s’installer des criminels armés ? Pourquoi avoir permis qu’une déclaration d’indépendance d’une partie du Mali soit prononcée sur son territoire ?

    « Deux sœurs songhaïs âgées de 14 et 16 ans auraient été emmenées de force de leur domicile de Gao par des éléments du MNLA et violées par plusieurs hommes toute la nuit » (Rapport – Secrétaire Général des Nations Unies).

    Le MNLA est un groupe armé qui n’a aucune légitimité, porté par aucune aspiration de défense des principes fondateurs de l’humanité mais il continue à agir en toute impunité car protégé le par le grand pays des libertés, la grande démocratie, le pays des droits de l’homme, la France.

    « Lors du pillage d’un entrepôt du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et du Programme alimentaire mondial (PAM) à Gao, en avril 2012, un garçon a été tué par balle par le MNLA…En juin 2012, le MNLA a tué trois élèves âgés de 13 et 14 ans qui protestaient à Gao contre le meurtre d’un directeur d’école. » (Rapport – Secrétaire Général des Nations Unies).

    Evidemment, ce rapport du Secrétaire Général des Nations Unies pointe également du doigt les islamistes. Cependant, cette mise au point est nécessaire pour ressortir, le rôle non moins important, mais occulté, du MNLA dans la terreur qu’ont vécu les populations du septentrion malien pendant l’occupation en 2012 – 2013.

    Dans un souci de clarté et de cohérence, les alliés du Mali doivent coordonner leurs actions sur le terrain avec les objectifs qu’ils se sont assignés.

    Les maliens auraient aimé avoir des sauveurs du Mali et non des sauveurs du Mali et de ses ennemis. Cela fait encore plus mal quand on est obligé de côtoyer, supplier le MNLA pour qu’il prenne part à d’hypothétiques pourparlers dont l’issue éventuelle risque bien d’aboutir à une distribution de privilèges.

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