L’interview d’IBK à la faveur de la Célébration du 56ème anniversaire de l’Indépendance : Les bons et les mauvais points

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L’événement a été modestement célébré à Kati en présence du Chef de l’Etat, Ibrahim Boubacar Keita. Cette sobriété dans l’organisation, qui se traduit notamment par le caractère local de la cérémonie (Kati), se comprend fort bien au regard de la situation sécuritaire du pays. Et l’ORTM, même avec un commentaire en français souvent exécrable, a pu donner une ampleur plus ou moins nationale à l’événement, par ailleurs, rehaussé par la présence du Chef de l’Etat dont le message était naturellement attendu en pareille circonstance et au regard de l’actualité souvent triste depuis bien longtemps  maintenant.

L’interview du président : les bons et les mauvais points

Commençons par les bons points qu’on a pu attribuer au président à la suite de son interview par l’ORTM. Le premier bon point est relatif aux ‘’Pupilles de la République’’, en particulier les enfants des soldats morts sur le front que la République prendra en charge jusqu’à leur épanouissement. Cette annonce va sûrement donner du baume au cœur des soldats qui se plaignent souvent du fait que, aussitôt le décès d’un des leurs annoncé, on s’empresse de faire partir sa famille d’un logement d’astreinte. Bref l’incertitude devant l’avenir démotive de nombreux soldats, d’où l’importance des Pupilles de la République.

‘’Les acquisitions en cours’’ : un serpent de mer ?

Ce qui a aussi réjoui – peut-être un peu trop vite – de nombreux Maliens, c’est lorsque le président évoque la Loi d’orientation et de programmation militaire, et précisément d’ ‘’acquisitions en cours’’. Il a été compris par là que l’armée devrait acquérir de nouveaux équipements, selon les propos du président. Le hic est que cela fait longtemps qu’il est question d’équipements pour l’armée, de nouvelles acquisitions qui se font apparemment toujours attendre. A moins que, passé oblige, ce ne soient ces accessoires (uniformes, chaussettes, galons…) qu’on appelle abusivement et pompeusement ‘’équipements militaires’’. Ce qui nous amène aux mauvais points’’ accordés au président.

Les mauvais points

En effet, les Maliens, ils sont nombreux en tout cas, ont comme l’impression que la priorité pour le président, en ce qui concerne l’armée, reste ‘’la tenue’’. C’est sur cela en tout cas qu’il a insisté pour souligner un ‘’changement’’ qui se serait opéré au sein des forces armées ; « la bonne tenue (les uniformes), l’organisation du défilé… ». C’est tout demême triste de souligner ces choses dans un pays en guerre. L’historien Jean B. Konaré, de manière fort intelligente et courtoise l’a relevé sur les plateaux de l’ORTM. Pour le paraphraser, il ressent une certaine mélancolie, habitué qu’il était, comme de nombreux compatriotes, ‘’a voir des MIG dans le ciel bamakois’’. C’est là un message tacite à l’endroit des autorités et par rapport à cette grande plaie des FAMA , joli nom en bambara mais vide de sens dans la réalité. Il faut tout de même reconnaître qu’un ciel bamakois sans appareils volants est préférable à la mise en scène opérée par ATT qui est allé jusqu’à tromper la vigilance de ses compatriotes avec des avions et autres équipements militaires empruntés à la Libye de Kadhafi. C’était là une véritable preuve de haute trahison : faire croire au peuple qu’il a une armée bien en place alors que c’était tout à fait le contraire.

Autre mauvais point pour notre président, c’est cette fâcheuse habitude à profiter de chaque occasion pour lancer des piques à ‘’ceux qui l’accuseraient injustement de ceci ou de cela’’. Un président se doit d’être au-dessus de ces choses-là, de ces conversations de bazar.

Les enseignements de Jean B. Konaré

L’historien estime, amèrement bien sûr, que ‘’les Maliens n’ont pas une bonne foi de l’armée, de leur armée…Or l’armée est une institution indispensable’’, a-t-il dit en substance. Ce qui est fort juste, quoi que, historien qu’il est, il est mieux placé pour comprendre les causes de la rupture, du divorce qui s’est opéré entre le peuple et son armée jadis adulée et considérée, pendant un certain temps, avec exagération parfois, comme l’une des plus fortes d’Afrique.

‘’Le fait que les chèvres se battent dans la bergerie est préférable à l’intermédiation de la hyène’’ dixit Jean B. Konaré

Cet adage rappelé par l’historien fait dire à Niazan Coulibaly (un cadre valeureux au passage) de l’ORTM : « Bonne réflexion pour les partis politiques ». Ceci n’est sûrement pas faux, mais si l’on a bien suivi la pensée de l’historien, ‘’la hyène’’ ici ne devrait être que ‘’la France’’ ou encore ‘’l’Algérie’’. Il est vrai qu’un tel propos ne pourrait être jamais tenu par un confrère de l’ORTM. Pour autant, l’historien et le journaliste vont un peu plus loin s’accorder lorsque M. Konaré dit que « l’impulsion doit toujours être donnée par les leaders » et que le journaliste ajoute : « Les pintades regardent toujours la nuque de celle qu’elles suivent » (‘’tant qu’il n’y a pas de coup de feu’’ dirait le comédien Magma, d’après l’autre historien sur le plateau, Modibo Keïta). Tout le problème du Mali est sûrement dans cette triste réalité : les leaders demandent d’adopter des comportements qu’eux-mêmes n’affichent guère.

L’ère Modibo Keita : une référence ?

L’unanimité est faite sur les valeurs qui caractérisaient les Maliens de l’ère Modibo Keïta, le premier Président du Mali indépendant : « Dignité, refus de manger la part de l’autre… »entre autres, a rappelé Jean B. Konaré, pour regretter une époque révolue et fustiger ce qui est devenu aujourd’hui la norme, la règle. Mais il y a un problème que peu de gens parviennent à dénouer. En effet, il se trouve que les fossoyeurs d’aujourd’hui-ou présumés tels – sont justement, pour la plupart en tout cas, des cadres se prévalant des valeurs de cette époque, nés, éduqués ou formés à cette époque. Quel changement se serait-il donc opéré en eux au point de les rendre méconnaissables… ?

La Rédaction

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