«S’il y avait d’autres justifications à cette révision, je n’y serais pas engagé. Ceux qui ont lancé des injures sur les réseaux, je leur affirme que cette constitution a été écrite avec le sang des martyrs. Je l’ai dit au palais de congrès dès le lendemain du coup d’Etat idiot de mars 2012. J’avais dit aux putschistes qu’il n’est pas question de suspendre la constitution de 1992. Ils m’ont demandé de rédiger un acte fondamental. J’ai dit qu’il n’en est pas question. Ils étaient où ceux qui marchent aujourd’hui ? Qu’ils m’insultent sur les réseaux sociaux, peu m’importe».
Ces propos ont été prononcés par le ministre des Droits de l’homme et de la Réforme de l’Etat, Kassoum Tapo, maître d’œuvre du projet de révision constitutionnelle. Il était invité le samedi 17 juin à la Maison de la presse par le mouvement Trait d’union pour expliquer les tenants et les aboutissants du projet de révision constitutionnelle.
D’entrée de jeu, le conférencier a répondu à ses détracteurs sur les réseaux sociaux : «J’ai dit que je n’aime pas beaucoup les réseaux sociaux, mais je n’ai pas dit que je n’aime pas ceux qui utilisent les réseaux». Selon Kassoum Tapo, ce n’est pas la première tentative de révision de la constitution, «seulement ce qui dérange, c’est que cette fois-ci, ça va aboutir».
Il a expliqué que le texte dont le Mali s’est inspiré, à savoir la constitution française de 1958, a fait l’objet de moult révisions depuis le général De Gaule. À l’en croire, ce texte a été révisé plusieurs fois, mais ça n’a jamais suscité de débat parce que la République n’a jamais été mise en cause. «La constitution vit avec la nation. C’est un texte fondamental sur lequel repose tous les autres textes», a martelé Me Tapo.
Parlant des innovations de cette révision constitutionnelle, le ministre Tapo a souligné que trois conventions fondamentales pour les droits de l’homme ont été ajoutées au titre I de la constitution, en plus de la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 et la charte africaine des droits de l’homme. Il s’agit de la convention internationale contre le traitement inhumain et dégradant, la convention internationale protégeant les droits de l’enfant et la convention internationale protégeant le droit de la femme.
En outre, aux dires du conférencier, les droits humains ont été consolidés comme il n’est fait nulle part ailleurs. Selon lui, en titre 2 du préambule, il a été réaffirmé que la République du Mali est une République indépendante, souveraine, indivisible, laïque, sociale et décentralisée. Et Kassoum Tapo de faire remarquer que le pouvoir du président de la République «n’a été augmenté nulle part mais qu’il a été décidé seulement dans la révision, qu’il détermine la politique générale du gouvernement».
Autre innovation, «On a encadré aussi le pouvoir régalien du président de la République», a-t-il ajouté. Toujours dans le registre des innovations, Me Tapo a noté la désignation (un tiers) des sénateurs par le président de la République. D’après lui, ces dispositions permettent au niveau de la représentation des collectivités que le président de la République puisse désigner des légitimités traditionnelles et coutumières. «Ce n’est pas le fait de nommer le président de la Cour constitutionnelle qui garantit l’indépendance de cette haute institution. Elle est composée de 9 membres dont trois désignés par le président de la République, deux par le président de l’Assemblée nationale, deux par le président du Sénat et deux par le Conseil supérieur de la magistrature», a signalé le conférencier.
Et d’ajouter que la révision constitutionnelle est une exigence de la situation du moment. «La paix est une exigence du peuple malien. Cette révision tend d’abord avant tout et après tout à cela : aller vers la paix. S’il y avait d’autres justifications à cette révision, je n’y serais pas engagé. Ceux qui ont lancé des injures sur les réseaux sociaux, je leur affirme que cette constitution a été écrite avec le sang des martyrs. Je l’ai dit au palais de congrès dès le lendemain du coup d’Etat idiot de mars 2012. J’avais dit aux putschistes qu’il n’est pas question de suspendre la constitution de 1992. Ils m’ont demandé de rédiger un acte fondamental. J’ai dit qu’il n’en est pas question. Ils étaient où ceux qui marchent aujourd’hui ? Qu’ils m’insultent sur les réseaux sociaux, peu m’importe», a déclaré Me Tapo.
Selon la coordinatrice du mouvement Trait d’union, Oumou Sall Seck, en initiant cette conférence-débat, son mouvement souhaite que la population puisse être informée ou mise à jour sur le contenu du projet de révision constitutionnelle. Elle dira qu’il est important que le débat actuel quitte la rue pour venir dans un cadre formel et permettre d’engager justement un débat non-passionné «autour de ce que nous considérons comme valeurs qui cimentent notre démocratie et notre stabilité».
Diango COULIBALY