Si l’objectif était de rassembler les Maliens sous l’arbre à palabre pour qu’ils se parlent directement, alors la conférence d’entente nationale prévue par l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, aura atteint son objectif. Mais les Maliens peuvent-ils dépasser leur égo et réaliser la paix ?
Les rideaux sont tombés sur la conférence d’entente nationale . Sa tenue n’aura pas été facile à cause des nombreux clivages. Mais, elle s’est tenue quand même. Et cela a permis au Chef de l’Etat, président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita, de nommer ce grand rassemblement « train de la paix » dans lequel il a invité tous les Maliens à embarquer à bord. Si au démarrage du « train de la paix », certains noms ont manqué à l’appel, à l’arrivée, on a noté la présence de tout le monde. Et c’est l’essentiel, selon les organisateurs et certains observateurs pour qui, c’est un processus qui démarre et dont la finalité devra être la « paix » comme l’a dit si bien le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita dans son discours lors de la cérémonie d’ouverture invitant ainsi ceux qui n’avaient pas encore embarqué dans le train à le faire à la prochaine gare. Boucana Ibrahim, Assistant spécial du représentant de la CEDEAO au Mali, disait la même chose que « la paix est un objectif. Ce n’est pas une action immédiate ». D’ailleurs, il serait utopique/ illusoire de dire qu’à l’issue des travaux de la conférence d’entente nationale, il y aurait la paix au Mali. On ne peut décréter la paix au Mali à partir de ce 02 avril 2017, date à laquelle la CEN a clôturé ses travaux. C’est un processus qui est en marche depuis la signature de l’accord pour la paix et la réconciliation. Il appartient et il même du devoir de chaque Malien d’y apporter sa contribution afin de construire la paix dont le Mali a tant besoin.
C’est vrai que tout le monde parle, en ce moment de paix. Mais pour Tenzin Gyatso, ce Moine bouddhiste tibétain, « …On ne peut réaliser la paix à l’extérieur si l’on héberge en soi la colère ou la haine ». Les Maliens se sont, certes parlés durant la conférence d’entente nationale. Le président « IBK » parle d’un « exercice qui a vu les Maliens échanger entre eux avec franchise, lucidité et responsabilité » ; un « exercice qui ne pouvait être totalement dénué (selon lui) de passion, car abordant des sujets inévitablement polémiques. »
Mais, la colère et la haine des uns et des autres, sont-elles, pour autant, estompées ? La suite du processus nous le dira. Mais, si nous (Maliens) voulons parvenir à la paix, il nous faudra, cependant, cultiver en nous-mêmes la tolérance, le pardon, le respect pour l’autre etc.
Dans son discours de clôture, le chef de l’Etat dira : « la sauvegarde de notre Mère-Patrie impose que toutes les filles et tous les fils du pays transcendent leurs réserves pour se trouver réunis afin de mener à bien une entreprise aussi déterminante pour le futur de notre Nation ». Mais, nous notons que la fin des travaux de la conférence d’entente nationale, ne met pas fin aux discussions.
Des réserves sont soulevées ça et là et il faudra trouver des solutions dans lesquelles tout le monde se retrouvera. Cela est certes, difficile de parvenir à un consensus du moment où les intérêts sont divergents et peuvent être liés au calendrier politique. Mais, là, il s’agit de paix et de cohésion sociale, deux points essentiels pour préserver l’unité nationale. Peut-on gouverner sans paix et sans cohésion sociale ?
Si le processus de l’accord pour la paix et la réconciliation, dont la conférence d’entente nationale est partie intégrante, permet d’aplanir toutes les difficultés et d’aller vers la convergence des points de vue, il y a de forte chance que le Mali puisse un jour, se reconstruire dans la paix. Est-ce dans un avenir proche ? On ne saurait le dire. Mais ce dont nous sommes certains, c’est que la conférence d’entente nationale a servi de déclic en sens que tout le monde s’est senti interpellé et raison pour lequel tous se sont embarqués dans le « train » avant sa destination finale. Le discours du président « IBK » n’est finalement pas tombé dans l’oreille de sourd.
Le reste du processus, reste, toutefois plus délicat, car, il s’agit maintenant de parvenir à un large consensus autour des principales recommandations formulées par la CEN. Un travail d’experts va se constituer, dit-on, pour examiner la question de près. Tout comme, une campagne de sensibilisation et surtout d’information, va s’ouvrir afin de partager le contenu des recommandations avec l’ensemble des Maliens et de parvenir à la rédaction d’une charte de la paix dans laquelle tout ou presque tout le monde se reconnaîtra. Si c’est le prix à payer pour la paix, alors, il faut le faire. Mais avec beaucoup de lucidité et surtout de responsabilité.
Tièmoko Traoré